Auteur : Ann E. Burg
Date de publication : Septembre 2013
Editeur : Scholastic
Genre : fiction réaliste jeunesse pour les 10 ans et plus
Serafina’s Promise : un roman en vers poignant qui capture le quotidien d’une famille haïtienne dont la vie se trouve bouleversée par le tremblement de terre qui a ravagé l’île en 2010. Un sujet malheureusement plus que d’actualité, suite au typhon aux Philippines le mois dernier mais qui, sous la plume d’Ann E. Burg, lauréate du Jefferson Cup Award 20101, se fait porteur d’une belle leçon de vie et d’un message d’espoir pour toutes les victimes de crises dans le monde.
Dans la campagne environnant Port-au-Prince, Serafina, 11 ans, travaille fort chaque jour pour aider sa Manman enceinte et sa grand-mère aux tâches ménagères, pendant que son père travaille à la ville pour subvenir aux besoins de la famille. Mais Serafina a d’autres aspirations et rêve de devenir médecin comme Antoinette Solaine, qui a tenté, en vain, de sauver son petit frère malade. Seulement, pour y arriver, elle doit aller à l’école et sa famille n’a pas l’argent pour l’y envoyer. De plus, qui s’occuperait des corvées quotidiennes? Jour après jour en allant chercher de l’eau, Serafina ressasse son secret et se fait la promesse de trouver un moyen d’aller à l’école. Mais quand la chance se présente, une inondation, puis un tremblement de terre frappent l’île, déjà en proie à l’instabilité politique, séparant la famille et bouleversant les rêves de Serafina…
Serafina’s Promise est l’un de mes grands coups de coeur de cette année. C’est son aspect visuel qui m’a en premier lieu attirée: la magnifique couverture tout en couleurs pastelles, réalisée par Sean Quall, invite au voyage et annonce un roman coloré, lumineux et empreint de poésie.
Poétique, le roman l’est de fait de par sa structure composée de façon tout à fait originale, d’une suite de courts poèmes en vers libres. La mise en page est très aérée, avec peu de texte, ce qui pourra séduire les lecteurs réticents. Cependant, il ne faut pas se fier aux apparences: les poèmes sont extrêmement riches en images, émotions et petits détails sur la vie quotidienne à Haïti qui se trouvent, de fait, mis en valeur par le style dépouillé car ils nous sont livrés à l’état brut, sans ornement. Peu de mots, donc, mais des mots qui frappent juste et marquent le lecteur.
Par ailleurs, le texte est ponctué de créole haïtien qui apporte une couleur locale. Un glossaire et un guide de prononciation sont inclus à la fin, invitant le lecteur à se laisser bercer par les sons et rythmes d’Haïti et à s’immerger dans l’atmosphère caractéristique de l’île, que l’auteure s’est attachée à rendre la plus authentique possible. Pour ce faire, elle a choisi de dépeindre le quotidien des petites gens et les difficultés auxquelles ils font face dans un style à l’image de la jeune héroïne, optimiste et confiant en l’avenir, sans le mélodrame habituel des médias.
Certes, le contexte d’instabilité politique est brièvement abordé à travers les Tonton Macoute. Et le tremblement de terre de 2010 est un élément déterminant dans l’intrigue, mais le roman ne se réduit pas à cela. Il raconte avant tout la lutte de Serafina pour sortir de la pauvreté et aller au bout de ses rêves malgré l’adversité. Il met en avant ses émotions conflictuelles, entre son désir d’aller à l’école, décuplé par la jalousie de voir une de ces amies y aller, et son sentiment de culpabilité à l’idée de sacrifier sa famille – son frère nouveau-né, dans le besoin urgent de médicaments – à ses ambitions personnelles. Mais elle ne renonce jamais et essaie de tirer parti au mieux de ces coups du destin.
Serafina’s Promise célèbre la persévérance et la détermination, mais également l’amitié et le sens de la famille, des valeurs universelles qui trouveront résonance chez les lecteurs, même ceux qui ne vivent pas dans des conditions aussi extrêmes.
Un roman émouvant et optimiste qui sonne comme une promesse, particulièrement en ces temps de crise.