Jeunes filles au pair: Une histoire de confiance réciproque

Photo par Hayet

Photo par Hayet

Le phénomène n’est pas nouveau, loin de là. Pourtant, on en recense de plus en plus, notamment au Canada, récent eldorado des Français en quête de nouvelles expériences. Les jeunes françaises ont la côte outre-Atlantique, c’est peu dire. Il ne faut pas aller chercher bien loin la raison. Cela s’explique par l’histoire même du Canada, où la langue de Molière est enseignée à l’école.

On est quand même en droit de s’interroger sur ce choix parfois surprenant de faire venir une jeune française plutôt qu’une Québécoise. Qu’est ce qui a donc bien pu pousser Roxanne et Ron, résidents quadragénaires de Nord Vancouver, à tenter le coup ?

Plus qu’une nanny ou une baby-sitter, la jeune fille au pair fait vraiment partie intégrante de la famille qui l’a choisie. Nourrie et logée, elle doit être un soutien aux parents et à l’enfant, un lien entre les deux. C’est une histoire de confiance réciproque. Le processus de sélection doit ainsi être rigoureux.

Hayet, arrivée début septembre après un bac L en poche, confirme : « Je me suis inscrite sur le site aupair-world.com. J’ai eu plusieurs propositions, de Grèce, d’Angleterre… mais je savais où je voulais aller. Et finalement, cette proposition est arrivée. Mais il a fallu un entretien skype avec eux, un autre avec la petite fille quelques jours plus tard, et ensuite ils ont appelé mes parents pour savoir si tout allait bien dans nos relations. »

Amanda, 7 ans et demi, et sa complice Hayet. | Photo par Hayet

Amanda, 7 ans et demi, et sa complice Hayet. | Photo par Hayet

Savoir s’adapter au mode de vie de la famille

La jeune femme, qui s’est octroyée une année sabbatique avant de reprendre ses études, ne regrette visiblement pas son choix : « Les parents parlent le français, et la petite Amanda 7 ans et demi, en fait de même à l’école. Je pense qu’ils préféraient une Française pour cette raison. Car il y a quand même une petite différence avec le français parlé au Québec. »

Si elle reconnaît volontiers se sentir chez elle ( « C’est ma famille » ) elle ne cache pas qu’elle le doit avant tout aux parents : « Ils sont adorables. Par exemple, ils achètent de la viande hallal spécialement pour moi et m’ont invité aux réunions de famille. J’ai même eu droit à mon parfum préféré en cadeau de Noël. »

En plus d’un peu d’argent de poche et du toit, Hayet dispose de temps libre dans sa journée. « Le matin je dois lever Amanda à 7h20, l’habiller, la coiffer et lui faire prendre son petit-déjeuner, ce qui n’est pas toujours facile, et aussi préparer sa boîte à lunch. »

Mais n’allez pas croire qu’elle ne fait rien de 8h à 15h30. Elle a un planning à tenir : dépoussiérage, lessive, ménage… C’est aussi ça être au pair. Elle a tout même le droit d’accueillir des amies dans la maison. Mais pas d’amis. Ce sont les règles.

C’est également son rôle de veiller à ce que les devoirs soient bien faits au retour des parents, aux alentours de 17h30. S’en suit le moment convivial de la journée où ils peuvent échanger sur divers sujets (l’affaire Hollande-Gayet entre autres) : le dîner. « Ce sont des gens très cultivés et qui aiment le bon vin et le fromage. A table, on parle beaucoup des différences entre le Canada et la France, de la façon de vivre, de politique, de Sarkozy… »

Tout n’est pas si rose

Si l’exemple d’Hayet dresse un tableau idyllique, tout ne se passe pas toujours aussi bien. Manon* a tenté l’expérience en freelance, et elle a vécu un enfer : parents séparés, hygiène douteuse des enfants (de 3 et 5 ans), trajets de bus très longs pour aller les chercher à l’école, suspicion maximale… La jeune française a préféré couper court à l’expérience pour trouver un autre travail dans la restauration : « C’était invivable. Ils avaient instauré des horaires stricts pour l’ouverture du frigo et surveillaient ce que je mangeais. » Après deux mois elle avait quitté cette « famille de fous » et regrettait vraiment de ne pas avoir fait plus attention où elle mettait les pieds. Bien qu’elle en garde un mauvais souvenir, elle ne se fait pas de fausses idées : « Il y en a pour lesquelles ça se passe mieux. Si j’ai un conseil à donner, c’est de ne jamais s’engager avec une famille où les parents sont séparés. Il y a trop de conflits. »

 * Son prénom à été volontairement modifié.