La tenue d’un référendum sur le financement des projets de Translink est la concrétisation parfaite de la pratique de la démocratie. Que la majorité s’exprime ! C’est la voix du peuple qui se fait entendre.
La première question qu’il faut donc se poser est : « Quelle sera la question ? » Viendront ensuite les débats sur la manière de la poser, puis sur la manière de la faire connaître, parce que dans un plébis-
cite, il doit y avoir de la publicité, sinon personne ne comprendra ni l’enjeu ni la question. En principe tout cela est d’un niveau de complexité de premier degré. Ça devrait être simple. Mais encore !
Pensons d’abord au célèbre référendum sur la souveraineté du Québec de mai 1980, pour ceux qui s’en souviennent. La question était longue, mais la publicité s’est faite d’elle même, le débat était ferme et le taux de participation a été élevé, soit 85%. En 1995, à la deuxième ronde référendaire, la question était très brève, le débat était national, la publicité se faisait encore toute seule et le taux de participation de 93,5%, encore plus élevé qu’en 1980. CQFD, si vous soulevez l’intérêt des électeurs, ils se sentiront engagés et se prononceront.
À Vancouver, en 2004, on demandait aux Vancouvérois si leur ville devrait être divisée en 14 arrondissements, chacun élisant un conseiller le représentant spécifiquement, comme c’est le cas presque partout ailleurs en Amérique du Nord.
Pour illustrer la question, le service des communications a envoyé à toutes les adresses postales une affichette illustrant une pizza divisée en 14 portions pour bien expliquer le principe. Le résultat fut qu’une bonne partie de ces affichettes se sont retrouvées dans les bacs à recyclage. La majorité des Vancouvérois ont cru qu’il s’agissait d’une publicité pour une chaîne de restaurants de pizza, qui voulait mousser ses affaires. CQFD, si la campagne de publicité n’est pas claire et l’objectif ne l’est pas non plus, pas de chance. Le taux de participation a été un dérisoire 22%.
Aujourd’hui, la question référendaire qui se posera concernera le financement de tous les coûts de développement de Translink. Le référendum devrait avoir lieu en novembre 2014, en même temps que les prochaines élections municipales, aussi bien dire très bientôt. Il aurait donc fallu faire vite pour trouver la bonne question dont la réponse doit absolument déboucher sur une réponse affirmative, puis travailler activement à faire connaître le projet et l’importance de l’issue souhaitée, pour assurer un taux élevé de participation. Après une première défaite en 1997, Denver a mis près de 7 ans avant que son projet soit approuvé lors d’un deuxième référendum en 2004.
Il s’agit donc d’une question importante. Mais quelle est-elle au juste? S’agit-il de payer plus cher pour le développement du système de transport collectif ou pour le développement du réseau routier ? Et si oui, pour l’un ou pour l’autre, ou pour les deux, avec quel argent puisé de quelle source ? De l’augmentation de la taxe sur l’essence ? De l’augmentation des impôts fonciers résidentiels et commerciaux ? De l’augmentation des tarifs pour les utilisateurs de Translink ou de l’imposition de péages sur tous les ponts et tunnels ? Devrait-il y avoir une nouvelle taxe sur l’utilisation des voitures dans le Grand-Vancouver, ou une taxe de vente spéciale pour la région, pour payer pour tous les projets attendus et débattus tels le prolongement de la ligne Millenium vers UBC, ou les trois lignes de trains légers depuis longtemps espérées à Surrey, ou le nouveau tunnel remplaçant le tunnel Massey ? C’est comme dans la chanson de Petula Clark : « Tout le monde veut aller au Ciel, oui mais personne ne veut mourir. »
En plus, rajoutez dans cette équation : 21 maires qui ne s’entendent pas toujours sur l’établissement des priorités en matière de transport collectif, de développement routier et d’infrastructure; Translink, l’entité qui chapeaute le développement de tout ce qui touche les transports collectifs et les réseaux routiers, mais qui n’étant pas un conseil élu, n’a pas l’autorité légale de lever des impôts; le ministre provincial des transports qui accuse les maires de ne pas savoir ce qu’ils veulent; et la première ministre qui, pressée de remplir une promesse électorale, insistait pour que le référendum soit tenu en même temps que les élections municipales, ce qui ne fait pas l’affaire des politiciens municipaux qui aimeront mieux faire campagne sur des questions locales que régionales.
Voilà sans doute à quoi Christy Clark pensait quand elle a décidé qu’il serait sans doute plus sage de reporter le référendum à une date ultérieure.
Pouvez-vous répéter la question ? De toute manière, la réponse est dans vos porte-monnaie !
Une bonne analyse des problèmes. Merci, je l’ai partagé.