Depuis quelques années, le tourisme autochtone de la Colombie-Britannique attire un public non seulement plus nombreux mais aussi plus connaisseur.
Avec 3.7 millions de visiteurs en 2010, soit le double qu’en 2006, le tourisme vers les communautés autochtones de la province augmente radicalement chaque année. Les touristes canadiens et américains viennent de partout à la rencontre de ces cultures anciennes. Dégustations de spécialités culinaires, concerts, ballets et golf, les activités sont désormais variées sur la Côte ouest.
Mais ce succès tient surtout des visiteurs étrangers, qui représentent désormais environ 37% de la part de marché, un chiffre en forte hausse. Japonais, Chinois, et autres visiteurs de plusieurs pays d’Asie s’ajoutent aux touristes réguliers venus d’Allemagne, de Grande-Bretagne ou de France. Tous font le choix d’intégrer un élément culturel et historique dans leur voyage.
À la recherche d’une expérience authentique
« Ce public est aussi plus instruit, en partie grâce à l’ère internet, » explique Keith Henry, le directeur exécutif de l’Association du tourisme autochtone de Colombie-Britannique (AtBC.)
« Désormais les gens savent ce qu’ils veulent, ils font des recherches en amont et sont exigeants. » Il précise que leurs demandes vont au-delà du choix des activités. Les visiteurs souhaitent une expérience authentique.
Daniel Heath Justice, un professeur à l’Université de Colombie-Britannique, spécialiste en art autochtone, explique cet engouement par le fait que ces cultures sont plus accessibles que jamais. Il ajoute que la culture autochtone devient plus en vogue : « Il y a une nouvelle génération, un renouveau de la popularité de cette culture, et ce, à tous niveaux : littérature, musique, théâtre… »
Un public connaisseur est aussi un public exigeant. Désormais la notion de tourisme éthique est incontournable. Keith Henry précise que l’AtBC travaille exclusivement avec les communautés entièrement propriétaires de leur société de tourisme, ou à moitié lorsque la structure atteint une plus grande taille. « C’est notre mandat. Cela fait une différence pour le public, » ajoute le directeur, lui-même un homme métis d’origine autochtone du Manitoba.
En effet, de 2006 à 2012, le nombre d’entreprises gérées par une communauté autochtone a augmenté de 85%. Le directeur de l’association depuis 2008 insiste sur le fait que ce développement se fait avec précaution et encadrement. « Nous organisons des séries d’ateliers durant lesquels tous les membres peuvent s’exprimer, » explique-t-il.
Des relations respectueuses
Mark Aquash, ex-directeur du NITEP, le programme d’éducation autochtone d’UBC, désormais assistant professeur, reconnaît ce succès, mais rappelle que ce type de divertissements n’est pas nouveau.
Lui-même danseur traditionnel autochtone reconnu, il affirme qu’il y a une histoire de tourisme autochtone de longue date, mais que les termes ont changé. Les spectacles autochtones sont désormais interactifs. « Tout le monde peut se lever et danser. Ce n’est plus un cirque comme avant. Il s’agit désormais d’une expérience, » précise le membre du conseil de la communauté autochtone des Trois Feux, située dans les territoires d’Aazhwaakwaa en Ontario.
Et selon Mark Aquash, le succès du tourisme dans certaines communautés n’enlève rien à leurs problèmes. Tout reste à faire. « Nous détenons les tristes records dans tous les domaines : alcoolisme, délinquance, échecs scolaires…etc. » Il milite pour un meilleur partage des ressources, qu’il voit comme une réponse partielle à ces problèmes. Également enseignant, il insiste sur le problème des écoles autochtones qui disposent de moins de financement public que les autres.
Cependant, il admet que le tourisme est un moyen de créer des liens. « Ce qui compte c’est la prise de conscience des gens. Mais il y a encore du chemin à faire du côté du partenariat. » L’AtBC prévoit d’ailleurs une augmentation totale du secteur du tourisme autochtone de 10% chaque année.
Pourtant l’association voit plus grand. Elle souhaite que les expéditions vers les communautés autochtones soient l’attraction principale des touristes, et non plus une portion seulement de leur voyage.