Diriez-vous que votre situation économique se porte mieux maintenant qu’au cours des dernières années? Si vous répondez un peu oui et un peu non, ce qui vous place, comme de nombreux Canadiens, dans la colonne des personnes qui pensent qu’il y a encore place à l’amélioration, vous êtes parmi les électeurs cibles pour les conservateurs de Stephen Harper. Si convaincus sont-ils que l’économie continuera d’être le thème dominant au cours des prochains mois, qu’ils sont les premiers à ne pas vouloir donner l’impression que nous sommes sortis du bois après le choc économique vécu en 2008.
C’est pourquoi ils jouent fortement la carte de la prudence économique en faisant preuve d’un optimisme modéré. C’est parce que, mérité ou non, les conservateurs de Stephen Harper continuent d’avoir le dessus sur leurs adversaires sur les questions économiques. Ce n’est pas que les Canadiens donnent une note exceptionnelle au gouvernement, mais plutôt qu’ils le considèrent comme le moins risqué des choix qui s’offrent à eux. En fait, quand vient le temps de juger de la confiance envers la capacité de bien gérer l’économie, ce n’est pas tellement qu’il y a un premier choix clairement exprimé, mais plutôt qu’il y a celui qui est perçu comme le moins pire lorsqu’on le compare aux autres.
Le budget fédéral présenté la semaine dernière est en quelque sorte assez habile en ce sens qu’il fait preuve de prudence fiscale alors que la population comprend un tant soit peu la nécessité de cette direction. De plus, justement parce que bon nombre de Canadiens sont encore inquiets par rapport à la performance économique du Canada, les partis d’opposition marchent sur des œufs et doivent donc faire attention de ne pas sombrer dans la surenchère lorsqu’ils proposent des mesures en contrepartie de l’énoncé budgétaire du gouvernement.
Pour les conservateurs, ce budget trace la voie vers l’équilibre budgétaire pour l’année 2015–2016. C’est un objectif que le gouvernement Harper ne peut se permettre de ne pas atteindre. Peu importe ce que cela prendra, il n’est pas question pour ce gouvernement de ne pas déposer un budget avec un confortable surplus l’an prochain. Car, comme on le sait, outre ses positions envers la lutte contre la criminalité et son image de dur à cuir envers les criminels, le Parti conservateur sait très bien que l’électorat conservateur tend à faire de l’équilibre budgétaire un thème central de sa pensée économique. S’il est un gouvernement qui doit absolument redresser le tir, c’est donc celui présentement en place.
Et justement, sur ce sujet, ils sont vulnérables puisque comme gouvernement ils ont été aux commandes pour plus de budgets déficitaires qu’équilibrés. Cela explique leur quête quasi obsessionnelle pour l’équilibre budgétaire avant les prochaines élections générales. Il est vrai qu’ils ont eu à composer avec la crise financière de 2008, mais ils ont quand même eu un rôle à jouer dans leur malheur avec la décision, dès leur premier budget en 2006, de réduire le taux de la taxe sur les produits et services.
Une autre raison, du moins pour l’actuel ministre des Finances, de présenter un budget avec un surplus confortable est qu’il y a fort à parier que le budget qui sera présenté en 2015 sera le dernier du ministre Jim Flaherty, que je ne vois pas être de la lutte aux prochaines élections fédérales. Il n’y a donc aucun doute qu’il voudra que son dernier budget soit comme son premier : en position de surplus.