Avertissement : Cette rubrique peut contenir des scènes de nudité qui risquent de choquer les personnes au puritanisme exacerbé. Il est suggéré, pour ces individus, de ne pas en faire la lecture avant d’avoir consulté leur chef spirituel. Elle, la chronique qui suit, n’est pas recommandée aux enfants de plus de 30 ans et elle, toujours la chronique, est interdite aux personnes âgées souffrant d’hyperventilation ou de problèmes cardiaques. Vous la lisez à vos risques et périls. L’auteur et la direction de ce journal déclinent toute responsabilité en cas d’accident ou d’incidents attribuables à une lecture trop assidue. En cas de pépin mental, consultez le psy le plus proche. Si le traumatisme dure au-delà d’une certaine période de temps, considérez-vous comme inguérissable. Pour tous frais encourus concernant une perturbation quelconque suite à la lecture de ce texte, envoyez la facture à votre député local qui la remettra au ministère de la Santé, à moins qu’il ou elle, par crainte de ne pas être réélu, décide de la payer de sa poche.
Comme vous pouvez le constater, je prends toutes mes précautions. Je ne tiens pas à être poursuivi. Mais, me direz-vous, de quoi ai-je peur ? Que crains-je ? Mais surtout, de quoi est-il question ? Eh bien voilà : pour tout vous dire, j’ai été choqué d’apprendre, il y a deux semaines, que le Conseil de la Radiodiffusion et des Télécommunications Canadiennes (CRTC) a statué que certaines chaînes de télé porno canadiennes ne répondaient pas aux critères requis en matière de contenu canadien. L’organisme de surveillance et de réglementation n’apprécie pas que les chaînes, appartenant à l’entreprise torontoise Channel Zéro, ne se conforment pas aux exigences prescrites par l’agence fédérale stipulant que dans la programmation, il doit y avoir au minimum 35% de contenu canadien. Au début, j’ai cru que c’était une blague, un poisson d’avril. Mais non, l’annonce a été faite au début du mois de mars. J’ai donc été obligé de me pincer, sans trop me faire mal, car je ne suis pas maso pour un sou, afin de m’assurer que j’étais toujours bien sur terre et non sur une planète de martiens. Rassurez-vous, je n’ai rien contre les martiens. Bien au contraire, ils ont l’air d’avoir la tête sur les épaules et les yeux bien en face des trous.
Ayant beaucoup de temps à perdre, en attendant de préparer mes mauvais coups prévus pour le premier avril, je me suis mis à réfléchir sur les implications de cette décision du CRTC. Leurs préoccupations, bien que très proches des miennes, m’intriguent au plus haut point. Vous me direz qu’il y a d’autres chats plus faméliques à fouetter. J’en conviens. Le nationalisme montant en Ukraine comme en Crimée devrait davantage me préoccuper. Je vous l’accorde. Mais, voyez vous, j’ai l’esprit mal tourné. Tout ce qui touche à la sexualité me fait perdre les pédales. Comme disent les anglophones, « je flippe. » D’où mon intérêt soudain pour cette question, a priori triviale qui, si nous n’y prêtons pas attention, pourrait avoir de sérieuses répercussions dans un avenir proche. La vie sexuelle de toute la nation peut en pâtir.
Ayant maintenant suscité un certain intérêt parmi les quelques lecteurs qui me restent, je me permets, excusez l’expression, d’entrer dans le vif du sujet. Qu’entend-on par contenu canadien dans un film porno ? Est-ce que les protagonistes, tout vêtus de nu, doivent se planter un drapeau canadien dans le cul pour satisfaire les exigences du CRTC ? Doivent-ils se sodomiser au sirop d’érable ? Est-ce qu’au lieu de dire « J’aime ça. Encore, encore », on doit leur imposer « Maudit, qu’c’est bon en tabarouette ? » Quant aux choix des acteurs, il semblerait que ce soit une autre paire de hanches car, de manches, dans leur état et leurs ébats, ils ou elles n’en portent pas. Si ces « pornographeurs » ne possèdent pas la nationalité canadienne, il faudra vérifier leur identité et exiger d’eux qu’ils prêtent serment d’allégeance à la Reine avant de commencer à forniquer. À ce que je sache, les membres du CRTC ne sont pas prêts à fermer l’œil, pendant qu’ils se rincent l’autre, sur ces questions de principe. Ils vont sans doute exiger de cacher ces seins qu’ils ne sauraient voir, à moins que ceux-ci ne soient estampillés d’un Made in Canada bien proéminent.
Les conseillers du CRTC, au fond, ne font que leur travail. Que bien leur fesse. Excusez-moi, que bien leur fasse.