La rubrique Espace francophone s‘intéresse aux acteurs de la francophonie en Colombie-Britannique. Cette semaine nous nous intéressons au révérend Benoît Laplante, curé de la paroisse francophone Saint-Jean-Baptiste à Victoria. À l’occasion des célébrations de Pâques, c’est l’occasion de revenir sur son parcours œcuménique ainsi que sur l’histoire de la seule paroisse francophone de la capitale provinciale.
Tout le monde connaît le père Benoît Laplante comme le prêtre des francophones de Victoria. Au sein de la petite paroisse de Saint-Jean-Baptiste, il assure le service religieux et est devenu l’un des piliers de la communauté francophone. Originaire du Québec, Benoît Laplante aura pourtant vu du pays avant de poser ses bagages à Victoria en 1999.
Ordonné prêtre dans les années 60, il fait partie de cette génération d’hommes d’Église qui répond à l’appel du Pape Jean XXIII. « À l’époque on disait que l’Amérique du Nord devait aider l’Amérique du Sud », explique-t-il. Comme de nombreux jeunes prêtres il part pour l’Amérique latine et c’est au Nicaragua qu’il s’établit. « Mon coeur est resté là-bas », confie-t-il. Il y reste 15 ans avant que la dictature en place dans les années 70 ne profite d’un de ses voyages à l’extérieur du pays pour l’expulser définitivement. Ses activités d’alphabétisation des masses passent mal auprès du régime. « Avant de savoir lire la Bible, il faut d’abord savoir lire tout court, constate le prêtre. Mais un peuple qui sait lire est vu comme une menace par toute dictature… »
Très fatigué physiquement, il revient au Canada et c’est à Vancouver qu’il arrive dans un premier temps où il restera 8 ans.Parachuté ensuite dans la petite paroisse de Saint-Jean-Baptiste, le père Laplante se retrouve à rythmer la vie religieuse de la communauté, soit 52 familles. Pour celui qui célébrait seul des messes devant 58 000 personnes au Nicaragua, l’adaptation n’est pas évidente. La ferveur n’est pas la même non plus.
La paroisse vieillit, la communauté francophone se réduit inexorablement. Les jeunes ont déjà déserté l’église depuis un moment. « J’ai l’âge moyen de mes paroissiens », plaisante presque Benoît Laplante. « C’est une petite communauté mais on la fait vivre comme on peut, il faut tout faire », continue le prêtre, habitué à cela depuis ses premiers pas en Amérique latine. Il s’inquiète en revanche pour l’avenir du français dans une communauté dont l’Église et la paroisse ont longtemps été le coeur. Le français est de moins en moins parlé au sein de la seule paroisse francophone de Victoria et sur l’Île de Vancouver. « C’est pas facile de maintenir le français dans une paroisse francophone », observe le prêtre qui constate que « la deuxième génération ne parle déjà plus français. »
Il note aussi qu’autour de l’église il n y’a aucune famille francophone, une situation quelque peu ubuesque. L’édifice avait été racheté à bas prix aux anglicans qui construisaient une plus grande église de leur côté. Depuis, le bâtiment n’a jamais vraiment été bondé et les autobus ne s’arrêtent que très loin. « Les gens arrivent en retard à la messe car il n’y a pas de transports publics, du coup ils vont dans d’autres églises, où la messe est dite en anglais », constate le père Laplante.
Reste qu’il compte bien comme chaque année célébrer Pâques comme il se doit. Et comme chaque année, il sait qu’il pourra compter sur un groupe de fidèles irréductibles. Ceux qui continuent de faire vivre la paroisse Saint-Jean-Baptiste, et à travers elle, l’histoire du fait français à Victoria.