Parmi les millions de visiteurs qui viennent chaque année à Rome et ne manquent pas de visiter le Vatican, beaucoup ne s’aperçoivent pas qu’en entrant sur la place Saint-Pierre, ils ont quitté le territoire italien et pénétré dans le plus petit pays du monde. Je soupçonne que la plupart des visiteurs se fichent éperdument du statut diplomatico-juridique de ces 440 mètres carrés qui forment un État souverain depuis les accords de Latran signés en 1929 entre le Saint-Siège et le Gouvernement italien (Mussolini, à l’époque). Ils sont là pour visiter les 11 musées, voir le dôme de St-Pierre ou se presser parmi les fidèles venus des quatre coins du monde pour recevoir la bénédiction du Saint-Père lors des grandes occasions. Seul un amateur de bizarreries géopolitiques, comme moi, serait intéressé avant tout par le fait de se trouver dans le plus petit pays du monde.
Plutôt que de faire la queue pendant des heures pour entrer dans la fameuse église ou les musées, je fouille sur internet pour en savoir plus sur ce micro-état. Il est unique à bien des points de vue. D’abord, c’est une monarchie absolue. Le pape est le chef d’État et le « Patron » des 900 résidents et des 3 000 employés qui travaillent au Vatican mais résident à Rome. Mais le Pape a d’autres chats à fouetter (ou à bénir) que de s’occuper de la gestion quotidienne de son mini-pays. Il confie cela à son Secrétaire d’État, Pietro Parolin. Qui dit État, dit budget et économie. De quoi vit le Vatican?
Son budget annuel total, qui approche le quart de milliard d’euros, est assuré par les dons des fidèles (Denier de Saint-Pierre), les dépenses des visiteurs, les émissions de timbres-poste et de pièces de monnaie, très prisées des collectionneurs mais aussi, et peut être surtout, par les services financiers. Le minuscule État profite de ses investissements mais reste discret sur leur nature et leurs montants. Il est vrai qu’en tant qu’État indépendant, il n’a de compte à rendre à personne. On estime que la Banque du Vatican, l’Institut pour les œuvres de religion, gère quelque six milliards d’euros. Mais là encore, le secret bancaire du Vatican ferait pâlir d’envie un banquier suisse. Trop secret, selon des institutions gouvernementales américaines et européennes qui affirment que cette banque ne se plie pas aux normes internationales en vigueur pour lutter contre le blanchiment de l’argent sale. En janvier 2013, les guichets automatiques du Vatican ont été fermés à la demande des autorités bancaires de l’Union européenne auprès desquelles la banque vaticane n’est pas en odeur de sainteté.
Autres particularismes de cet État: on n’y enregistre aucune naissance et les quelque 900 personnes qui sont dotées d’un passeport du Saint- Siège ont cette citoyenneté de façon temporaire, le temps que durent leurs fonctions gouvernementales et diplomatiques. Comme tout État qui se respecte, il possède son armée. 130 gardes suisses qui portent des beaux habits multicolores. Mais ne pensez pas qu’ils ne sont là que pour la décoration. En dehors des lieux publics généralement ouvert à tous, comme la place Saint-Pierre, il faut passer par des postes de contrôle sérieux pour entrer dans le pays et montrer patte blanche à ces gardes suisses qui sont dotés d’un véritable entraînement militaire et ont des armes à portée de la main. Ils sont également appuyés par la gendarmerie du Vatican.
Pour ce qui est des langues officielles, c’est assez spécial aussi. Cela dépend des fonctions et des départements. C’est l’italien pour la gestion de l’État. Le latin pour l’église et le domaine juridique et le français pour la diplomatie. Le Vatican est d’ailleurs enregistré comme pays francophone auprès des organisations internationales. Pour ce qui est de l’armée, les fameux gardes suisses, le français et l’allemand sont les langues de travail.
Une des armes culturelles de ce mini-État est Radio-Vatican. Fondée en 1931, elle diffuse en 40 langues à partir d’une vaste propriété située en banlieue de Rome et est gérée par des jésuites. Le budget annuel d’approximativement 25 millions d’euros est à peine suffisant pour maintenir un personnel (presque entièrement laïc) de 400 personnes à tel point que depuis 2009, Radio-Vatican passe de la pub.
Bien sûr, certains juristes, politologues et autre coupeurs de cheveux en quatre diront que ce reliquat des anciens états pontificaux ne remplit pas complètement la définition d’un État souverain tel que décrit par la convention de Montevideo et que c’est pour ça que le Vatican n’a que le statut d’observateur aux Nations-unies. Quoi qu’ils en disent, je suis content d’avoir fait le tour du pays à pied en moins d’une heure. Pour ce qui est du tour de France, je laisse ça à d’autres mais j’aurai au moins fait le tour du Vatican.