À la levée du rideau de la nouvelle année scolaire, le premier acte commence par un couac. La rentrée a raté son entrée. Et oui ! la rentrée a commencé comme elle avait terminé : par la poursuite de la grève qui avait entaché les derniers jours d’école en juin dernier. En fait, la grève, durant l’été, était toujours en vigueur. Ce sont les piquets de grève qui avaient pris congé. Ils ont donc, depuis le début septembre, réapparu. Ils ont vécu l’été dans des entrepôts alors que les élèves ont passé leurs vacances entre potes.
Faute de les voir, je les avais oubliés. Et puis tout à coup les revoilà, repris en main par leur propriétaire : les membres du syndicat des enseignants de la Colombie-Britannique. Adieu oisiveté. Retour à la normale ou plutôt, dans ce cas, retour à l’anormale : la grève. Après la Fête du travail, reprise des hostilités. Pas de travail pour les enseignants. Beau travail, Madame tête à Clark. Bravo aussi Monsieur Peter Fassbender, ministre de l’Éducation qui s’est arrangé pour maintenir le tempo d’un conflit qui, selon moi et sans aucun doute la grande majorité des Britanno-Colombiens, n’a déjà que trop duré. À quoi ça sert un ministre de l’Éducation quand il y a 500 000 élèves qui sont privés d’éducation ? Ce ministre, de toute évidence, devrait être au chômage et son salaire redistribué dans la cagnotte réservée aux enseignants. Ce sera toujours ça de gagné lorsqu’il s’agira de satisfaire une partie des revendications salariales.
Il est possible que, d’ici la parution de cet article, le gouvernement et le syndicat se soient mis d’accord pour arriver à une entente, une forme de compromis, qui ne fera ni l’affaire ni des uns, ni l’affaire des autres, mais qui aura l’avantage de voir le retour des élèves en classe d’où ils sont bannis depuis le 2 septembre. J’espère, bien que j’en doute, que le bon sens va prévaloir. Je soupçonne, en effet, que Micesse Clark et Cie préfèrent faire durer le plaisir (j’ai toujours l’esprit mal tourné et une dent de sagesse contre ce gouvernement néo-libéral). Leur campagne de dénigrement anti-syndical étant leur gagne-pain, il n’y a aucune raison et surtout aucun intérêt pour eux à régler rapidement le litige. Plutôt que de tirer sur le pianiste il est préférable de tirer sur l’enseignant. Dans notre province, depuis l’arrivée du Parti libéral provincial, qui n’est ni plus ni moins que l’ancien Parti créditiste, l’éducation de nos enfants est loin d’être une priorité. Car, pour nos économistes conservateurs provinciaux, il n’y a pas de profit à tirer dans l’éducation. L’éducation coûte et représente une dépense qu’il faut réduire coûte que coûte au même titre que la santé et les arts.
La campagne médiatique menée, à nos frais, par le gouvernement provincial, a pour but de faire passer les enseignants pour des enfants gâtés avec des exigences déraisonnables. Venant de la part de politiciens dont un grand nombre bénéficient d’énormes privilèges et qui, la plupart je suppose, envoient leurs enfants dans des écoles privées, il va sans dire que cela passe mal. Dans notre chère province, il est temps de considérer l’éducation comme une priorité au même titre que les ressources naturelles. La principale ressource de tout pays c’est son peuple. Et c’est dans ce peuple qu’il faut investir. N’importe quel élève, provisoirement privé de classe, comprend cela. Ça prend pas la tête à Papineau pour le savoir. À moins de vouloir réduire toute une population future à l’abrutissement général et à la soumission totale, le gouvernement provincial se doit de ne pas faire la sourde oreille aux revendications, la plupart légitimes, du syndicat des enseignants.
Il suffit de faire un tour sur le site du syndicat pour se rendre compte jusqu’à quel point notre province a pris du retard par rapport au reste du pays. Comment notre gouvernement peut-il faire preuve d’autant de cécité face à une pareille disparité ? Ce manque de vision représente un danger pour l’avenir de ces enfants que l’on prive actuellement d’enseignement. Si le gouvernement de j’en-ai-ma-Clark ne voit pas cela, c’est qu’il est ignorant. Or l’ignorance, j’en sais quelque chose, ça se soigne. Comment ? Par l’éducation.
Je recommande donc que l’on renvoie sur le banc d’école, une fois la grève terminée, tous les membres de ce gouvernement afin de les éduquer comme il se doit. Et si la grève perdure, je les autorise, avec l’accord du syndicat, de passer les piquets de grève afin de combler leurs lacunes cérébrales et, à la limite, pour certains, essayer de peaufiner leur compréhension d’une société saine et active. Allez, madame Clark, faites un geste, lâchez du lest. Négociez de bonne foi. Vous n’en ferez pas une crise de foie. Il est temps de laisser entrer la rentrée.