On ne choisit pas son père ni sa mère, mais on peut choisir son maire ou sa mairesse. C’est un gros avantage. À nous d’en profiter. Allez, le 15 novembre, tout le monde aux urnes ! Enfin quand je dis tout le monde, je veux dire ceux que ça intéresse.
Si j’en juge par le taux de participation aux élections municipales en général, il faut reconnaître qu’elles suscitent très peu d’intérêt. Et pour cause. Face au gouvernement fédéral et au gouvernement provincial, les municipalités possèdent peu de pouvoir.
Pourtant, à mon avis, elles en ont suffisamment pour nous inciter à aller voter. Rassurez-vous, je ne reçois aucune commission, aucun cachet de la part d’aucun parti engagé dans ces élections. Personne, jusqu’à présent, n’a réussi à me soudoyer. Je ne dis pas que ce soit impossible. Après tout, j’aimerais bien me payer un voyage aux enfers ou m’acheter un château de sable en Espagne. Non, ma démarche est purement philanthropique. Je veux, honni soit qui mal y pense, notre bien. J’essaie tout simplement, peut-être en vain, de réveiller l’esprit démocratique qui doit animer tous les citoyens de ce vaste pays, de cette immense province, de nos charmantes villes, de nos riants villages, de nos belles municipalités. Je comprends aisément qu’il soit difficile de faire un choix. La plupart des candidats sont inconnus ou ont très peu fait parler d’eux. Ils sont nombreux et de surcroît pas forcément intéressants. Il ne faut pas leur en vouloir. Comme tout le monde, mais avec plus d’audace, plus d’aplomb ou d’ambition, ils cherchent la gloire. Celle-ci les attend au tournant, s’imaginent-ils. Qui sait ? La politique municipale peut servir de tremplin à une belle carrière politique. De nombreux maires sont devenus premier ministre. Et être maire, c’est peut-être marrant. Combien d’entre eux rêvent de devenir les Rob Ford de leur génération ? Certains doivent penser que si Gregor Robertson a pu se faire élire, pourquoi pas eux ?
Alors, guidés par une ambition naissante, nos futurs politiciens en herbe se mettent à fabuler. Ils se voient déjà en haut d’une affiche, comme le chante Charles Aznavour. Ou, plus exactement, ils rêvent de voir leur nom et leur large frimousse sur une pancarte électorale, plantée au beau milieu des pelouses, à côté de celle d’un agent immobilier avec son panneau « À vendre ». Être célèbre, l’espace d’une élection seulement, suffit à satisfaire le plus petit égo du candidat le plus marginal, le plus banal. Le jeu en vaut la chandelle. Chandelle, que tous devront tenir pour ne pas faire ombrage aux autres élus des deux plus hauts paliers de gouvernement.
Au milieu de toute cette cacophonie électorale, l’électeur essaie, tant bien que mal, de se faire une idée. Il aimerait surtout comprendre les programmes et connaître les positions proposées par les différents partis et que tentent d’articuler, tant bien que mal, plutôt mal que bien d’ailleurs, les divers candidats au cours de débats fades, futiles et d’interviews insipides. À les entendre tous, je ne sais plus si je dois en rire ou en pleurer. Un vrai cirque. L’un après l’autre, ils mettent les pieds dans les plats. J’en ris. Puis ils se mettent à faire des promesses qu’ils ne tiendront pas. J’en pleure. Tous des clowns. Ils me font peur. Je souffre de coulrophobie (ou phobie des clowns, mot que je viens de découvrir).
Il faut pourtant choisir. Mais comment ? Voyons la situation à Vancouver par exemple. Si vous vous fiez au nom des partis, vous êtes mal parti.
VISION est un nom choisi pour vous en mettre plein la vue. Vous espérez, en votant pour eux, avoir droit à une consultation gratuite chez l’oculiste. Vous souffrez définitivement de cécité.
Le NPA (Non Partisan Association) que je traduis librement par Association sans parti pris. Vraiment ? Si un parti ne prend pas parti, il sera pris à partie. La partie pour ce parti est perdue d’avance.
Et COPE (Coalition Of Progressive Electors) : des électeurs progressifs qui se réunissent, cela donne quoi ? Un parti qui, malgré ses bonnes intentions, ne progresse pas. Ce ne sont pas des électeurs mais des élus dont ce parti à besoin.
Quant aux VERTS ? Désintéressés par le poste de maire, les Verts, de (se) taire, s’enterrent. Ils com-
ptent sur du beurre qu’ils mettront chichement dans leurs épinards.
J’en conviens encore une fois, le choix s’avère compliqué. Mais, malgré tout, je continue à croire que chaque citoyen doit se rendre aux urnes, quitte à voter blanc (ou vert) pour exprimer son mécontentement. J’ai, pendant longtemps, adhéré au slogan « Élections, piège à cons’ »suivi logiquement par mon abstention, jusqu’au jour où je me suis rendu compte que le slogan lui-même était aussi un piège. Depuis je vote… toujours du mauvais côté de la barrière. Mes candidats rarement l’emportent. Je dois leur porter la guigne. Ils préfèreraient, peut-être, que je m’abstienne, histoire d’améliorer leur chance de se faire élire. Cependant, ce 15 novembre, comme moi, n’hésitez pas à faire valoir votre droit.
Que vous votiez à gauche, si le cœur vous en dit, à droite, si votre portefeuille vous le dicte, ou au centre, si vous êtes sur une voie à sens unique, votez pour un lui, votez pour un nom, votez pour une elle ou pour untel, mais votez, même si ce n’est pas votre tasse de thé.