Dans ses rêves (les moins) fous, Brandon Letsinger s’imagine vivre dans un tout nouveau pays dont les frontières sont définies par un environnement, une géologie, une culture et un état d’esprit communs. Et du rêve à sa réalité, il n’y a qu’un pas. Brandon Letsinger est le directeur de CascadiaNow!, un mouvement citoyen qui demande l’indépendance d’une partie de la Colombie-Britannique, des États de Washington, Orégon, Idaho, du sud de l’Alaska et du nord de la Californie.
Le groupe formé en 2008 à Seattle possède déjà sa charte d’indépendance et son drapeau bleu (représentant le ciel et l’océan pacifique), blanc (pour la neige et les nuages) et vert (en hommage aux vastes forêts de conifères de la région), le tout fendu par un sapin noir solitaire, symbole d’endurance, de défi et de résistance. Tout un programme.
« Nos frontières actuelles sont arbitraires, lance d’emblée l’Américain Brandon Letsinger. Notre but n’est pas la sécession à tout prix. Ce que nous souhaitons ce sont des frontières qui correspondent mieux à la population de cette région. Une population qui est unie par des liens écologiques, environnementaux, culturels et économiques uniques. C’est une manière de faire de la politique autrement car le système actuel a atteint ses limites. »
Une république de 15 millions d’habitants
Et à ceux qui seraient tentés d’y voir le discours hasardeux d’un illuminé, Brandon Letsinger répond avec sa rhétorique bien léchée et sa série d’arguments : « Quinze millions de personnes vivent au sein des potentielles frontières de Cascadia, l’équivalent d’un pays comme l’Équateur ou le Guatemala. En termes économiques, la région Cascadia génère chaque année plus de 675 milliards de dollars (US) en biens et services. Les secteurs comme le tourisme, la pêche et les nouvelles technologies s’y épanouissent déjà très bien », affirme-t-il. Sa surface de 1 400 000 km2 ferait également de Cascadia le 20e plus grand pays du monde, derrière la Mongolie.
Brandon Letsinger ne se rêve pas président de Cascadia. D’ailleurs, la notion de Cascadia et de biorégionalisme n’est pas son idée. Le terme Cascadia a été adopté en 1970 à Seattle par le professeur David McCloskey pour décrire l’identité régionale grandissante de la zone du Pacifique nord-ouest. Depuis, les frontières de Cascadia, sa mission et sa définition exacte n’ont cessé d’évoluer, mais le concept est bien là et commence même à gagner une certaine notoriété.
Fort d’une base de données de 8 000 sympathisants et totalisant plus de 10 000 autres sur les réseaux sociaux, le Cascadia de Brandon Letsinger a beaucoup gagné en popularité ces deux dernières années. Aujourd’hui, cinq personnes sont employées pour faire tourner sa petite structure. Le groupe vient tout juste d’obtenir le statut d’organisation à but non-lucratif par l’État de Washington. Un pas de plus vers une plus grande reconnaissance de leur projet.
Enthousiasme moindre en Colombie-Britannique
En Colombie-Britannique, en revanche, l’engouement est moindre « mais le mouvement est en marche », assure Brandon Letsinger qui dit recevoir de plus en plus de messages de soutien en provenance de l’Ouest canadien. Il espère pouvoir bientôt constituer une équipe britanno-colombienne pour relayer l’esprit Cascadia par delà la frontière américano-canadienne qui demeure, pour l’heure, la seule officielle.
Autre projet pour 2015, le premier grand sommet de Cascadia aura lieu au printemps dans un lieu encore tenu secret. Brandon Letsinger et ses équipes veulent profiter de ce rendez-vous pour lancer officiellement le mouvement Cascadia dans la cour des grands, c’est à dire en faire une institution avec des membres à part entière et un système d’adhésion. Un institution qui compte bien avoir son mot à dire dans les débats de société à venir…
Plus d’informations :
www.cascadianow.org