C’est une question d’actualité qui se pose à l’occasion du café-philo organisé par la Simon Fraser University (SFU), le 2 février au Roundhouse Community Arts & Recreation Centre. Autour de Suzanne Smythe, professeure adjointe en littérature et en éducation des adultes à SFU, le public pourra échanger ses idées sur la place de l’informatique et son accès dans la société canadienne d’aujourd’hui. Tour d’horizon des grandes lignes de ce débat.
Facebook, Google, Apple, Microsoft… Nous connaissons tous aujourd’hui ces noms qui se sont imposés depuis des décennies dans notre vie quotidienne et dans notre travail. Sans conteste, l’informatique a une place cruciale dans notre société. C’est le cœur de métier de plusieurs des plus grandes sociétés actuelles et il a envahi progressivement tous les domaines de la connaissance. Il participe aux menaces sur notre mode de vie avec des impacts sociaux majeurs mais aussi aux solutions avec un accès à une base d’information illimitée à des personnes parfois isolées du reste de la société. L’informatique et Internet servent ainsi à créer une nouvelle société numérique ouverte à tous et pour tous. « C’est une société dans laquelle tous les membres ont un accès constant aux outils informatiques nécessaires pour jouer un rôle dans le fonctionnement de leurs communautés et dans les affaires de leur pays, explique Suzanne Smythe. Cela ne signifie pas que tout le monde doive avoir le dernier ordinateur sorti ou la meilleure connexion Internet possible; cela signifie que tout le monde devrait être en mesure d’accéder aux outils et de les utiliser pour des gestes du quotidien ».
Une société inégalitaire ?
Cette idée d’un accès universel à l’informatique laisse songeur et pose question. Est-ce que réellement tous les individus ont les outils informatiques et les compétences adéquates pour faire partie de cette société numérique ? « Non, répond d’emblée Suzanne Smythe. Nous vivons dans une société très inégale quand il s’agit d’accéder à des outils et à des compétences informatiques (…) Par exemple, le gouvernement de la Colombie-Britannique soutient que 93 % des Britanno-Colombiens ont accès à une connexion Internet. Mais cela ne signifie pas que 93 % d’entre eux ont réellement une connexion. La politique du gouvernement ne considère pas l’accessibilité, et nous savons, d’après une enquête statistique menée en 2012 au Canada, que seulement 58 % des ménages ayant un revenu de 30 000 $ ou moins par an ont Internet à domicile. Cela contraste avec les ménages ayant un revenu de plus de 87 000 $ par an, qui bénéficient, eux, à 97 % d’Internet à domicile. » Voilà qui porte un coup d’arrêt aux défenseurs d’un Internet ouvert et abordable pour tous. Cependant, comment ne pas omettre la place prépondérante que le forfait Internet occupe dans notre budget mensuel aujourd’hui. « Dans notre centre d’accueil informatique, je travaille avec beaucoup de personnes qui ne peuvent pas se permettre financièrement une connexion Internet, ajoute-elle. S’ils le font, c’est pour trouver du travail, mais alors, ils doivent faire des coupures dans leur budget alimentaire ou autres. »
Des solutions plus politiques qu’efficaces
Les autorités semblent être à court de solutions pour résoudre cette problématique. Il y a deux ans, le gouvernement fédéral a annulé le Community Access Program for Computers. Ce programme national devait permettre à tous les Canadiens l’accès à un ordinateur de travail, à une connexion Internet et à quelques leçons afin d’apprendre et mettre à jour leurs compétences informatiques. Depuis lors, les bibliothèques et les centres d’accueil exécutent ces missions, mais faute de budget, les ressources sont insuffisantes et toutes les bibliothèques du pays ne peuvent fournir le même soutien. Les coupes budgétaires touchent également les programmes d’éducation des adultes à l’informatique. Sans soutien et sans logistique, des personnes isolées ne peuvent développer leurs compétences dans un domaine aussi « vivant » que ce dernier, qui demande une mise à jour régulière de leurs aptitudes afin d’utiliser les nouveaux outils et logiciels. « Le sentiment général est que tout le monde a une connexion Internet et donc les programmes visant à promouvoir son accès ne sont pas nécessaires, résume Suzanne Smythe. C’est plus politique de promouvoir une économie numérique orientée sur les affaires et sur les questions commerciales telles que la vitesse, la sécurité et l’innovation. Peu de politiques s’occupent des besoins quotidiens des Canadiens qui veulent participer à cette économie et à cette culture numérique émergente. » L’Internet au 21e siècle a encore des barrières à franchir avant de devenir un droit universel.
Is Canada a Digitally Inclusive Society ?
Le 2 février à 19h
Au Roundhouse Community Arts & Recreation Centre, Mezzanine meeting room, 181 Roundhouse Mews, Vancouver