« La clientèle du CSF de C.-B. reflète la francophonie internationale du 21e siècle ». C’est dans ces termes que le CSF présente son dernier rapport annuel. Les connaisseurs de l’institution y verront l’annonce des évolutions récentes dans la politique de communication du Conseil. Dans la logique précédemment énoncée, les publicités bilingues forment un premier pas vers une communication tournée vers les couples exogames : « The CSF, for a true francophone education ». Malaise chez certains, signe de modernité chez les autres.
Selon Roger Hébert, président du CSF, « les familles exogames représentent plus de 50% des familles dont les enfants sont scolarisés avec le CSF ». Chiffre qui se retrouve dans les statistiques. Sur les 5050 élèves du conseil en 2013 (le rapport de 2014 n’ayant pas été publié à l’heure où nous écrivons cet article), seuls 35% d’entre eux parlent le français dans leurs foyers, tandis que plus de la moitié parlent l’anglais, les autres langues représentées étant majoritairement l’arabe et l’espagnol…ainsi que le swahili ! On peut dés lors comprendre que l’institution cherche à s’adresser aux parents non francophones pour promouvoir l’éducation de leurs enfants en français… dans la langue de Shakespeare. Cohérent certes, mais difficile à avaler pour certaines personnes qui ont fait de la défense du français en milieu minoritaire un combat sans cesse renouvelé.
Avec une croissance du nombre des élèves inscrits d’environ 5% en 2013-2014 (sur 5 300 élèves), le Conseil suit de près la tendance générale de la province (+7% d’habitants en Colombie-Britannique sur la même période). Cette augmentation des effectifs ne semble pas affecter la qualité de l’enseignement car les élèves scolarisés avec le CSF obtiennent des résultats généralement meilleurs que ceux des écoles anglophones (tant dans les langues que dans les sciences sociales, voire les mathématiques !) avec des résultats en moyenne de 15% supérieurs à ceux de leurs camarades.
Devant ces résultats tout à fait honorables, tant au niveau de la croissance que dans la pratique, il faut se demander si le changement de communication de l’institution est véritablement approprié ? Il est à noter que celle-ci, pour toucher davantage de personnes, dispose désormais d’un budget moins important que les années précédentes (de l’ordre de 100 000$). La totalité de cette somme n’est pas uniquement attribuée à la communication extérieure, elle sert aussi à la communication interne, tant au sein du CSF qu’au niveau des écoles entre elles. Pour toucher toujours plus de monde avec des moyens réduits, le passage au bilinguisme s’explique aisément, ce qui n’empêche pas certains puristes de grincer des dents.
La communication du CSF est également passée d’un « directeur » des relations publiques à une « coordinatrice » des relations publiques. Honorable certes, mais légèrement moins prestigieux. Le changement de l’intitulé du poste pourrait s’expliquer principalement de deux façons : ou bien la structure est suffisamment solide et implantée pour nécessiter un moindre investissement, ou bien le CSF connaît quelques soucis financiers qui l’obligent à l’économie.
Depuis plusieurs années déjà, le Conseil se bat contre le gouvernement provincial, arguant ne pas être traité avec équité comparativement au système anglophone. Dans la seule année 2013, ce ne sont pas moins de 13 audiences et 11 décisions de justice qui ont été rendues dans les procès qui les opposent. Au motif des griefs, Monsieur Hébert énonce aussi bien les bâtiments trop petits que les problèmes de transports et d’espaces non adaptés pour les élèves. Or les procès coûtent cher, et même si la Cour suprême du Canada a exceptionnellement demandé à la province de rembourser les frais d’avocats des appelants le 26 juillet 2013, il n’en reste pas moins que l’interminable bataille qui oppose le CSF et Victoria pèse lourdement sur les épaules de l’institution qui y engage sans cesse de nouvelles ressources. Le 2 décembre 2013 s’engageait un nouveau bras de fer entre les deux entités. Début 2015, le CSF finissait le dépôt des informations nécessaires à sa nouvelle plainte. La balle est actuellement dans le camp du gouvernement qui a désormais 4 mois pour les examiner et faire savoir sa décision. Au risque d’une nouvelle escalade entre les deux ?