On lui attribue gentillesse, patience, obéissance mais aussi… vulnérabilité, malchance et faiblesse. Le mouton n’a pas la meilleure des réputations au sein de la communauté chinoise qui va devoir composer avec ce signe astrologique toute cette année.
Simple superstition ou véritable croyance, le signe astrologique de l’année en cours peut avoir des répercussions des plus surprenantes. Selon une enquête du Washington Post datant du printemps dernier, bon nombre de couples chinois auraient calculé la conception de leur bébé pour que celui-ci naisse avant l’année du mouton qui a débuté le 4 février 2015. D’après l’article, certaines femmes sont même allées jusqu’à planifier une césarienne pour être sûre de ne pas donner naissance à un petit mouton…
Une impératrice dépensière à l’origine ?
À Richmond, Sherman Tai, expert en Feng Shui et en divination, notamment en astrologie chinoise, donne quelques explications : « Le mouton est un animal conservateur, perçu comme un suiveur ne pouvant être un meneur. Il a besoin d’être guidé, faute de quoi il risque de se perdre. C’est faux. » Trop silencieux et sans réelle créativité, les traditions ne donnent pas cher de sa peau. Un dicton chinois prédit le bonheur d’un mouton sur dix. Mais selon Sherman Tai, les personnes adoptant ces préceptes comme des avertissements pour l’avenir ignorent la plupart du temps les origines historiques de ce désamour et s’arrêtent aux croyances populaires sans les étudier.
L’histoire de l’impératrice Cixi, dernière représentante de la dynastie Qing ayant exercé le pouvoir en Chine de 1861 à sa mort en 1908, serait à l’origine de la mauvaise réputation du mouton qui était son signe. Accusée d’avoir conduit l’empire à sa perte par des dépenses fastueuses ainsi que par de mauvaises prises de décisions, elle représente une des raisons pour lesquelles naître sous le signe du mouton est une malchance. Une femme responsable de la chute d’un empire, y a-t-il pire référence dans un pays qui pratiquait jusqu’à l’année dernière la politique de l’enfant unique ? En outre, la plupart de ses collaborateurs étaient également du même signe. De quoi renforcer l’imaginaire collectif.
« C’est grâce à un mouton que nous avons la lumière ! »
Pour Sherman Tai, les écrits astrologiques grand public ne sont que mensonges et entretiennent les superstitions. « Tout le monde a œuvré pour avoir un enfant l’année du cheval précédant celle du mouton. Second signe le plus prestigieux après le dragon. Tous les signes ont de bonnes et de mauvaises personnes, l’important est d’éduquer les gens pour éviter les incidents », souligne l’astrologue qui se bat contre le déterminisme astral.
D’ailleurs, des exemples significatifs du succès des moutons existent, tel que Thomas Edison. « C’est grâce à un mouton que nous avons la lumière ! », insiste Sherman Tai. Peu recherchées dans le monde actuel, les qualités du mouton restent à observer en tant qu’elles aident à la réussite : la persévérance, le courage, l’honnêteté. « Le courage, c’est lutter quand les gens vous blessent, sans les heurter sans raison» précise Sherman Tai. Sur le plan familial, l’enfant mouton se soucie de ses parents. Ayant besoin de temps pour se réaliser, il avance lentement mais sûrement.
Moins de pression pour les moutons
Carmen, 25 ans, est bénévole pour la section musée du centre culturel chinois de Vancouver, et Steve, 26 ans, est agent d’accueil au même centre. Pour le jeune homme, être du signe du mouton se révèle être un atout auquel certains parents commencent finalement à penser. « Les parents chinois mettent beaucoup de pression sur les épaules de leurs enfants en matière de réussite. Il y a davantage de naissances lors des années dragon ou cheval, mais la compétition pour obtenir de bonnes écoles augmente tout comme le stress. Dans ce contexte, le mouton est un avantage. »
Selon Carmen, ce sont surtout les anciennes générations qui sont les plus sensibles aux traditions. « Ma génération adopte le mode de vie canadien, il n’y a pas plus de malchance pour tel ou tel signe, ce sont juste des adjectifs », assure-t-elle.
Des adjectifs mais Sherman Tai, dont la fille est du signe du mouton, se veut tout de même rassurant : « Ce n’est peut-être pas une très bonne année pour le romantisme, mais il y aura des occasions, le mouton n’est pas un animal solitaire. »