L’erhu, aussi appelé « violon chinois », est un instrument populaire en Chine. De nombreux musiciens amateurs en jouent et il détient en parallèle une place majeure dans les ensembles de musique classique chinoise contemporaine et les récitals. L’ehru est également présent dans la musique de chambre de tradition asiatique plus ancienne. Le violon chinois a progressivement été intégré à des compositions et à des orchestres classiques occidentaux.
Aaron Gervais, compositeur canadien connu pour sa musique éclectique et ludique ainsi que ses écrits sur les enjeux actuels de la musique classique, a composé Who Made the Inch of Grass pour le Sonic Boom Festival. Cette composition pour piano et ehru sera présentée à l’occasion de l’inauguration du festival le 25 mars 2015 à 19h30 au Hall Pyatt. La pièce sera jouée par Corey Hamm et Nicole Li de Piano and Erhu Project qui combine le meilleur de la musique occidentale et chinoise.
Pour Aaron Gervais, « la musique classique doit être en accord avec notre culture et notre société. La musique a toujours fait partie de la culture et ne peut exister séparément. La musique classique a évolué à travers les époques […], le défi actuel est de s’assurer que la musique classique que nous composons et enseignons soit ancrée dans ce qui se passe autour de nous ». La composition de Who Made the Inch of Grass relève le défi.
Un « instrument à cordes des barbares [joué à l’aide d’une] queue de cheval »
L’ehru se constitue d’une petite caisse de résonance en bois dur recouverte d’une découpe de peau de serpent et d’un long manche de bambou ou de bois. Ce manche est légèrement recourbé à son extrémité où se situent deux chevilles. Les deux cordes en soie ou en métal vont de la caisse de résonance vers ces chevilles. L’archet en bambou et en crin de cheval s’insère entre les cordes. L’instrument se joue assis. Il existe de nombreuses variantes de cette vièle suivant la taille ou le son qu’elle émet. Outre ces différentes variantes, Aaron explique que « les accords du erhu n’ont été standardisés que récemment, auparavant les joueurs accordaient leur instrument de manières diverses. Beaucoup d’amateurs jouent du ehru dans leur village de façon non conventionnelle ».
Un « instrument à cordes des barbares [joué à l’aide d’une] queue de cheval » est mentionné pour la première fois dans un ouvrage encyclopédique du XIe siècle (le Mengqi bitan de Shen Gua). Néanmoins, l’essor de l’ehru date du XXe siècle. L’instrument était important dans les opéras régionaux et dans beaucoup d’ensembles instrumentaux régionaux, mais son existence individuelle ne débute que dans les années 1920. Les années 30 sont synonymes de diversification et d’amélioration pour le violon chinois. Aujourd’hui, l’instrument « est devenu beaucoup plus populaire et occupe une place centrale dans l’orchestre chinois moderne, de nombreux récitals pour ehru ont été composés » assure Aaron.
Authenticité et originalité apportées à la musique classique occidentale
L’archet, qui est apparu en Asie centrale vers le IXe siècle, s’est répandu rapidement, notamment en Europe. Grâce à ce fameux objet, les orchestres occidentaux comptent de nombreux instruments à cordes frottées. Néanmoins, il y a peu que le violon chinois a été intégré à la musique classique occidentale. Depuis une vingtaine d’années, des compositeurs occidentaux composent pour l’ehru. « La grande majorité de ces compositeurs sont d’origine asiatique (dont Hope Lee et Dorothy Chang), ils souhaitent introduire l’ehru pour son authenticité et retourner vers leurs racines. Mais le violon chinois a aussi un son original et intéressant qui permet de renouveler la musique classique actuelle » déclare Aaron Gervais. Aaron et des artistes comme Jocelyn Morlock, John Oliver ou Emily Doolittle s’intéressent à la seconde facette de l’instrument.
Lorsque le Sonic Boom Festival demande à Aaron de composer une pièce pour piano et ehru, il saisit l’occasion. « J’appréciais le son de l’ehru depuis un certain temps et j’espère un jour avoir la chance de composer pour cet instrument ». Le nom de la composition Who Made the Inch of Grass vient d’un poème chinois traditionnel, « l’essentiel de la pièce se concentre sur les façons de réunir le piano et l’ehru afin de préserver et contraster les aspects uniques de chaque instrument ». Cette pièce est en quelque sorte à l’image de la diversité culturelle du monde qui nous entoure.
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