La rubrique Espace francophone s’intéresse aux acteurs de la francophonie en Colombie-Britannique. Cette semaine, nous rencontrons Joshua Minsky, artiste franco-américain et canadien, présent tous les jours sur l’Ile Granville où il chante Brassens, Brel ou Trenet…
Quand on lui demande s’il se sent davantage Américain ou Canadien, il répond sans hésiter « Français ». Il faut dire que Joshua Minsky a un parcours surprenant. Son arrière-grand-mère est Française, épouse un Roumain qu’elle suit dans son pays. Sa grand-mère part ensuite pour les États-Unis, sa mère naît à New-York, lui également, en 1959. Puis à l’âge de 24 ans, il part en France. Il y apprend le français, « les cours que j’avais pris en Amérique de Nord étaient inutiles », précise-t-il, et se fait « corriger en permanence par les Parisiens », lorsqu’il a le malheur d’écorcher la langue de Molière. Il voyage beaucoup en Europe, mais reste 7 ans en France, à jouer dans le métro, dans la rue : « J’aime voyager et apprendre des langues… Mais la culture française reste ma préférée », assure-t-il. Les voyages, les langues, et la musique. Sa passion. « Depuis 1984, je ne fais que ça… C’est d’ailleurs la musique qui m’a amené en Europe. Je jouais dans les rues de New-York lorsqu’un Danois m’a dit “Tu peux gagner de l’argent en Europe en faisant ça dans la rue”. Ça a été mon déclic », raconte-t-il.
De retour en Amérique du Nord, sa femme et lui s’installent à Vancouver. Elle est Tchèque. Ils s’étaient rencontrés pendant son voyage, et lui demande d’être raisonnable maintenant, qu’en tant que père de famille, il devrait désormais exercer « un vrai boulot ». « J’ai donc travaillé pendant 5 ans pour Greenpeace, avant de revenir à la musique. Maintenant, je joue presque tous les jours ici ». Ici, c’est l’Ile Granville. Il y joue de la guitare et chante, en portugais, italien, suédois, et français bien sûr. Il assure que c’est la langue avec laquelle il se sent le plus lié, chanter en français à Vancouver est sa manière de garder cette connexion avec la France. « La chanson française est tellement spéciale, j’aime profondément son côté poétique, raconte Joshua Minsky. Les gens l’apprécient, qu’ils soient francophones ou non. Même les touristes chinois connaissent Brassens ! Si je chantais en anglais, je ne serai qu’un chanteur parmi tant d’autres. Je suis un des seuls à chanter français à Vancouver, et je joue un répertoire que même en France, on ne joue plus ! Les classiques – Brel, Brassens, Trenet – ont laissé place au R&B dans les rues de Paris aujourd’hui ».
En se démarquant ainsi, Minsky a su se faire connaître auprès de l’Alliance française ou du consulat de France, par exemple, puisqu’il est le seul à faire vivre la chanson française à Vancouver. Il regrette d’ailleurs que les artistes francophones « restent dans leur petit coin » et que de manière générale, il y ait « aussi peu de vie culturelle francophone à Vancouver ». Il lui arrive cela dit de collaborer parfois avec le Centre culturel, comme l’an dernier lors du Festival d’été : « Ils font un bon travail, avec le peu de moyens qu’ils ont, salue-t-il. Francophones ou non, les Britanno-Colombiens apprécient ces efforts ». En dehors de ces quelques collaborations, Joshua Minsky se dit « trop occupé pour se mêler de ces affaires culturelles ». Il travaille donc de manière indépendante, tout en restant en contact avec les différents directeurs d’associations francophones.
En plus de ces prestations quasi quotidiennes à l’Ile Granville, il se produit – en français la plupart du temps – lors de mariages, œuvres de charité, gala, ainsi que dans les écoles : « Cela se fait moins maintenant, car les budgets sont serrés, mais je joue devant des élèves dans le cadre de leurs cours de français. Je fais vivre la langue française, et les inspire peut-être à apprendre ce merveilleux langage ».