Juillet, je viens de l’apprendre, nous est tombé dessus avec une seconde de retard. En effet, il a fallu rajouter une petite seconde au mois de juin pour remettre les pendules à l’heure. C’est ce qu’on appelle la seconde intercalaire. Je vous entends. Vous n’en avez cure. Cela n’a guère d’importance, après tout, nous ne sommes pas à une seconde près. Mais, comme le dit mon banquier qui surveille mes finances et non les aiguilles de sa montre, les bons comptes font les bons amis. L’heure, c’est l’heure. Ah! quel bonheur.
Le compte y est, nous pouvons donc aller de l’avant. Chemin faisant, une dame m’a gentiment fait observer que juillet 2015 nous réserve une autre surprise. Nous allons avoir deux pleines lunes en ce beau mois, m’a-t-elle prévenu. Un phénomène rare. Je devais être dans la lune, je ne le savais pas. Sans entrer dans les détails, je ne suis pas astrophysicien, il faut savoir que tous les deux ou trois ans, une treizième pleine lune fait son apparition au cours d’une année qui, comme chacun le sait, ne comprend que 12 mois d’après mes derniers calculs. Cette treizième pleine lune, il faut bien la caser quelque part. Cette année, c’est notre mois de juillet qui en a hérité.
Récompense bien méritée, car n’est pas juillet qui veut, ni qui peut. C’est le mois des festivités de l’été. Les nations se bousculent au portillon pour célébrer leurs fêtes nationales. Le Canada en tête de file. Puis ça défile. Juillet semble être le mois de prédilection d’une grande partie des nations qui, pour célébrer, se mettent dans tous leurs états. Alors, avec deux pleines lunes au programme, à quoi doit-on s’attendre? Nous avons déjà eu la première, le 2 juillet, la deuxième arrive le dernier jour du mois. Ce phénomène, deux lunes dans le même mois, est connu sous le nom de blue moon. Pensez à la chanson. Pourtant, une question se pose : Des deux pleines lunes, laquelle est blue ? Celle du 2 ou du 31 juillet ? Je l’ignore. Si vous le savez, faites-le moi savoir.
En français, on s’est beaucoup creusé les méninges pour trouver une traduction. Finalement les pontes de la langue ont abouti à cette trouvaille: la lune bleue. Fallait y penser. Why blue? Pourquoi bleue ? Les avis sont partagés et le mien ne compte pas d’où mon silence sur la question. N’essayez pas de me tirer les vers du nez ou de me faire chanter au clair de la lune mon ami Pierrot. Vous ne tirerez rien de moi. Je ne suis pas comme Tintin. Je n’ai jamais marché sur la lune. Je dois être daltonien. Le bleu me donne les bleus. Demandez à Armstrong, pas Neil, ni Lance mais Louis qui l’a trompeté sur tous les toits. Et puis si vous tenez absolument à connaître la véritable couleur de la lune bleue, consultez votre astronome le plus proche, si celui-ci n’est pas déjà parti explorer la face cachée de la lune.
Autre élément à considérer: vous connaissez sans doute l’expression Once in a blue moon. En français: tous les trente-six du mois, d’après les différents dictionnaires qui, de toute évidence, viennent de foutre leur doigt dans l’œil de la lune, comme dans un film de Georges Méliès. Tous les trente-six du mois équivaut à la semaine des quatre jeudis. Tous deux indiquent l’impossibilité. C’est à dire que ce n’est pas français alors que Once in a blue moon indique la rareté et la plausibilité. Traducteurs à vos ordis.
Par ailleurs et d’autre part, autrement dit, d’une autre façon, vu d’ici, histoire de tourner autour du pot, afin de gagner du temps, puisque nous en perdons et que nous sommes continuellement à la recherche du temps perdu comme disait Marcel qui n’était pas accordéoniste mais plutôt friand, sans en être épris, de Madeleine, (excusez cette phrase brelo-proustienne), je me demande combien de gens s’intéressent véritablement à la question de la lune bleue? Combien se sentent concerné par ce phénomène spatial? Très peu j’imagine. Il faut dire que je suis de nature pessimiste. Je vois toujours une lune à moitié vide, c.a.d. une demi-lune, plutôt qu’une lune à moitié pleine. L’une ou l’autre qu’importe. L’univers est ainsi fait. L’unique lune qui nous tourne autour nous joue des tours. D’un petit quartier, chaque mois, elle s’en va croissant pour devenir pleine. Une fois pleine, elle influencerait notre humeur, notre comportement. Ainsi, traitez-moi de lunatique si vous voulez. Je dois l’être. Pendant une seconde, mettez cela sur le compte de la lune bleue.