La reconnaissance de diplômes : un parcours du combattant pour les nouveaux arrivants

Photo par Jens Schott Knudsen

Photo par Jens Schott Knudsen

Vous voulez immigrer en Colombie-Britannique et trouver un emploi dans votre domaine d’études ? Et bien pour plusieurs, il vous faudra de la patience car la reconnaissance de votre diplôme n’est pas assurée, et ce, même si vous êtes accepté comme immigrant.

Citoyenneté et Immigration Canada offre plusieurs catégories de programmes d’entrée au Canada. Celui pour les travailleurs qualifiés est basé sur un système de points obtenus selon divers facteurs. Un haut niveau d’éducation vous donnera plus de la moitié des points nécessaires pour être accepté comme immigrant. Par contre, une fois arrivé au Canada, la reconnaissance des diplômes varie selon la profession ou le métier et celle-ci n’est pas assurée. Et ce, même si vous avez déjà un emploi qui vous attend dans votre compétence.

Aussi, plusieurs doivent faire face à la déception puisqu’ils n’obtiennent qu’une reconnaissance partielle. Dans ce cas, ils doivent obtenir des équivalences, suivre des cours pour mettre à jour leurs connaissances et remplir les conditions requises par leur association professionnelle, l’établissement d’enseignement ou encore par l’employeur. Certains peuvent même travailler dans leur profession tout en prenant les cours requis dans un délai de 2 à 5 ans. Guillaume Raùbair, professeur, qui est entré au Canada avec un emploi qui l’attendait, en est un bon exemple puisqu’il doit compléter 3 cours dans un délai de 5 ans.

Par contre, des immigrants doivent se rendre à l’évidence que leur diplôme ne sera pas reconnu. Une jeune Française, avec visa de travail, possédant un diplôme en histoire de l’art, n’a pas pu faire reconnaître son diplôme. Elle a dû accepter un emploi comme guide dans un musée, surtout en raison de sa capacité de parler français. Cette frustration se fait sentir même chez des Canadiens souhaitant vivre en Colombie-Britannique. Par exemple, une éducatrice spécialisée du Québec, qui peut travailler avec des personnes handicapées dans sa province d’origine, ne le peut pas ici. Seulement comme assistante dans les écoles ou aide-soignante pour un salaire inférieur de moitié. Il lui faudrait compléter le cours universitaire en service social pour pouvoir pratiquer comme elle le faisait au Québec.

Une étude de Statistique Canada montre que plus de 40 % des immigrants de l’an 2000 de cette catégorie ont obtenu leur reconnaissance après 4 ans, soit de leur employeur, d’un établissement d’enseignement ou d’un ordre professionnel. Mais cette reconnaissance peut être encore plus longue que 4 ans.

Les centres d’aide aux immigrants à la rescousse

Étant donné la complexité grandissante de la reconnaissance de diplômes, le gouvernement fédéral a donc commencé à financer des centres d’aide aux immigrants, dont le toujours très actif S.U.C.C.E.S qui offre une gamme de services pour aider les immigrants à naviguer dans la bureaucratie et amoindrir leurs difficultés administratives et financières. Le Collège Éducacentre, qui offre des programmes d’information et de formation aux immigrants francophones, en est un autre exemple.

Queeny Choo, la directrice de S.U.C.C.E.S., a elle-même dû passer à travers cette bureaucratie. Après 5 ans d’expérience en Angleterre comme infirmière enregistrée, elle a été recrutée par le gouvernement albertain. Elle a obtenu un emploi mais elle a dû suivre des cours pour obtenir son diplôme d’infirmière reconnu par l’Alberta. Lorsqu’elle a voulu obtenir son baccalauréat en soins infirmiers, on lui a demandé de passer l’examen TOFUL pour évaluer son anglais. « J’ai refusé. J’ai décidé de leur prouver qu’étant donné mes antécédents, je n’avais pas à faire cet examen. J’ai donc décidé de faire ma 12e année secondaire, donc pas de TOFUL. Et j’ai passé ma 12e année avec excellence. J’ai obtenu mon B.A. et aussi ma maîtrise plus tard. »

Choo mentionne que « d’abord, les immigrants doivent naviguer le processus administratif parfois byzantin puis payer pour leurs cours et les examens qu’ils doivent passer, et doivent se loger et nourrir leur famille. Et l’immigration est souvent un choc culturel et social pour la famille ». L’immigration est un déracinement, qu’on le veuille ou non. S.U.C.C.E.S offre aussi des prêts aux immigrants et les aide dans leur recherche d’un emploi alternatif dans leur domaine d’études si nécessaire.

« Les immigrants doivent comprendre qu’il faudra peut-être commencer au bas de l’échelle »

La reconnaissance des diplômes existe pour protéger le public et les standards canadiens. Par contre, il existe des barrières dites structurelles et professionnelles qui méritent d’être réformées. On mentionne souvent les associations professionnelles qui protègent leur chasse gardée et qui pourraient montrer plus de flexibilité dans leur évaluation et accréditation. Michelle Rakotonaivo, une francophone très impliquée dans la communauté francophone, a contribué à faire bouger les choses. Par exemple, le gouvernement de la Colombie-
Britannique a accepté que des médecins non reconnus au Canada puissent travailler sous la supervision d’un médecin canadien dans des régions éloignées.

Pour cette francophone, « le système de mentorat qui permet à un immigrant de côtoyer un professionnel canadien dans son travail est une des initiatives qui a beaucoup de mérite dans l’adaptation des immigrants au monde du travail ». Par exemple, un ingénieur qui n’était pas reconnu a obtenu un emploi de gérant de projet après mentorat et un emploi subalterne dans une firme d’architecture. Selon elle « les immigrants doivent comprendre qu’il faudra peut-être commencer au bas de l’échelle ».

« Être bien motivé et informé… une plus grande chance de réussite »

Si vous voulez immigrer au Canada, Michelle Rakotonaivo conseille de vous informer sur le statut de votre diplôme et le processus qu’il vous faudra naviguer. « Parler à des gens qui en ont fait l’expérience et commencer tout de suite vos démarches dans votre pays d’origine ». Être accepté comme immigrant est une chose, avoir vos études et compétences reconnues en est une autre. « Être bien informé et surtout motivé vous donnera une plus grande chance de réussite », me souligne Michelle Rakotonaivo qui travaille pour Éducacentre comme aide aux immigrants francophones. Immigrer n’est pas une sinécure et obtenir votre reconnaissance de diplôme encore moins facile.

 

Lisez un supplément d’information dans la version électronique (www.thelasource.com/fr) de cet article. Voyez les résultats d’un sondage effectué auprès de 7 716 nouveaux immigrants interviewés trois fois en quatre ans à propos de la reconnaissance de leur diplôme
et de leur expérience de travail.