Gourmets, gourmands, amateurs invétérés ou occasionnels de bonne chère, la ville de Vancouver est faite pour vous ! Le magazine Condé Nast Traveler, la référence internationale en matière de cuisine, vient de classer Vancouver dans le top 20 des villes où l’on mange le mieux au monde. La fusion serait l’une de ses spécificités.
Mais qu’est-ce que c’est, au juste, la cuisine fusion ? Comment se manifeste-t-elle à Vancouver ? D’après Ray Loy, chef du restaurant Bambudda à Gastown, les professionnels du milieu ne seraient pas tous d’accord sur la signification et la connotation de ce terme.
Une tentative de définition
Du latin fusio qui veut dire « mélange », le mot fusion a un sens particulier dans le domaine culinaire. D’après le Collins Canadian Dictionary, la fusion est un style de cuisine qui mêle des ingrédients et des techniques de tradition occidentale avec ceux de tradition orientale, principalement d’Asie et du Moyen-Orient. Les créations de la chef Etsuko Needham au Bistro Sakana sur la rue Mainland en sont un parfait exemple. Le « capresé roll, à la mozzarella et au pesto », ou le « tuna & avocado crêpe » montrent l’influence de la cuisine française et italienne sur sa formation purement japonaise.
Dans les faits, cette définition semble globalement acceptée par les restaurateurs de Vancouver.
Mais, comme le souligne le chef Ray Loy (Bambudda), certaines conceptions vont au-delà des cultures et des traditions. Par exemple, une cuisine est fusion dès l’instant où le chef mélange différentes saveurs ou qualités gustatives : sucré, salé, amer, aigre, acide, gras, sec, humide, etc.
Mais le terme fusion a aussi ses détracteurs. Très en vogue dans les années 1980 à 1990, beaucoup de restaurants l’ont accolé à leur enseigne pour attirer une clientèle en quête de nouveauté. Bonnes tables et gargotes ont suivi la tendance. À tel point que le mot fusion est devenu pour certains un synonyme de mauvaises surprises gustatives. Un véritable fourre-tout où l’on ne sait jamais sur quoi l’on va tomber. C’est la raison pour laquelle des restaurants fusion à proprement parler bannissent ce terme de leur carte, comme cela est le cas du Bambudda à Gastown : « Nous ne sommes pas un restaurant fusion », peut-on lire sur leur site internet.
S’adapter à la demande
Pour en revenir à la définition de la cuisine fusion, on pourrait aussi prendre en compte le mélange entre tradition et modernité. Les tendances actuelles telles que les régimes alimentaires végans sans gluten et glutamates (MSG en anglais) ont un impact sur les menus proposés.
Certains restaurants comme The Change Dining and Bar près de Stanley Park, en ont fait un atout commercial. Une manière selon Chan Liu, le sous-chef, d’en finir avec les stéréotypes liés à la cuisine chinoise. Kurshid Khan, chef et propriétaire du Simba’s Grill sur Denman street, a lui aussi fait le choix d’un menu sans gluten et glutamate. Chaque sauce est préparée sur place avec des produits frais.
Cette tendance n’est pas l’apanage des restaurants avec un service en salle. Pour celles et ceux qui ont envie de manger végan, sans glutamate et fusion, le tout sur le pouce, Vancouver a aussi de bonnes adresses. C’est notamment le cas des Food Trucks comme Chickpea ou des restaurants de vente à emporter comme Curry Fusion sur Robson Street. De quoi satisfaire tous les goûts et toutes les bourses.
Le style Vancouver dans la cuisine fusion
Par son histoire, sa position géographique et ses politiques publiques, la ville de Vancouver offre des produits alimentaires particuliers. Jusque dans les années 1960, les restaurants étaient réservés aux élites, le reste de la population se contentait de cantines de fish-and-chips ou de soupes chinoises. Les immigrants français avaient le monopole des restaurants, situés pour la plupart dans des hôtels de luxe et des clubs de golf.
Mais avec l’arrivée en masse de nouveaux immigrants asiatiques à la fin des années 1960, puis indiens et moyen-orientaux dans les années 1980, le paysage culinaire de Vancouver a totalement évolué : prix accessibles, nouvelles saveurs, arrivée des plats à partager en petites portions.
Comme le souligne le chef Kurshid Khan (Simba’s Grill), la plupart des diplômes étrangers ne sont pas reconnus au Canada. C’est la raison pour laquelle des immigrants qualifiés sont reconvertis dans la restauration. Sans compter tous ceux qui n’avaient aucun diplôme et qui ont vu dans la restauration un moyen rapide et efficace de gagner leur vie. C’est par exemple le cas de Tai Nguyen, chef au Linh Café, un restaurant fusion vietnamien-français situé sur la 4e Avenue. À l’inverse, certains chefs comme Etsuko Needham (Bistro Sakana) exerçaient déjà dans leur pays d’origine avant d’immigrer.
Autre élément spécifique à Vancouver et sa région : un sol très riche et fertile ainsi qu’une faune aquatique exceptionnelle. Afin d’offrir ces ressources de manière durable et responsable aux consommateurs, le gouvernement de Colombie-Britannique mène depuis les années 1970 des campagnes favorisant les produits locaux. À titre d’exemple, le programme Agricultural Land Reserves en 1973, ou plus récemment BC Buy Local en 2012. Cette démarche s’inscrit directement dans le nouveau défi de Vancouver : devenir la ville la plus verte et durable du Canada d’ici 2020.
Grâce à la diversité culturelle de sa population et à la richesse de ses ressources alimentaires, Vancouver offre par essence une cuisine métissée dont la qualité est acclamée par le monde entier. À quand l’Appellation d’Origine Contrôlée « Cuisine Fusion Vancouver » ?