Le 27 septembre 2014, je me trouvais dans un avion et je sentais mon cœur qui palpitait de peur. L’inconnu était ce qui me terrorisait le plus. Dans mon sac à dos, j’avais un masque de sommeil, un stylo, mon journal, et des souvenirs très précieux. « Ce voyage me bouleversera pour toujours, je ne suis pas prête », ai-je écrit.
En partance de l’Égypte vers le Canada, je n’avais aucune idée de ce qui m’attendait et je ressentais cette incertitude comme un défi. Je me questionnais sur mes besoins de poursuivre mon éducation, de trouver des communautés dans lesquelles je pourrais m’impliquer, et surtout, de rencontrer de nouveaux amis. Étant donné que j’ai un tempérament très social, c’est ce qui me préoccupait le plus. J’avais bien entendu parler de la gentillesse des Canadiens et de leur accueil chaleureux envers les immigrants, mais je me demandais aussi à quel point ils les laissent s’intégrer dans leur société.
Une semaine plus tard, l’école commençait. La conseillère qui m’a dirigée vers la classe en chuchotant, m’encourageait à parler avec tout le monde. J’ai tout de suite remarqué un phénomène intéressant : tous les groupes assis ensemble étaient répartis par nationalité. Même si je ne pouvais distinguer les Chinois des Coréens, je pouvais quand même bien voir qu’aucun groupe n’avait des airs méditerranéens. Ne me sentant pas à l’aise, je me suis assise à part, seule. Il me semblait absurde que cette diversité ne se mélange pas. En fait, sans faire le moindre effort, j’ai pu dénombrer une dizaine de langues parlées autour de moi. J’ai dû faire appel à tout mon courage et, vers la pause de midi, je me suis présentée à un des groupes. Même si je me sentais comme un poisson hors de l’eau, j’ai tenté de converser, mais la barrière linguistique m’a empêché de m’exprimer librement. Par la suite, quand je ne comprenais pas quelque chose, j’ai choisi d’utiliser la technique du sourire et hochement de tête, que, bien vite, ma nouvelle amie a su déchiffrer.
J’ai fait tout mon possible pour devenir amie avec mes pairs, et j’ai réussi. J’étais fascinée par l’idée du pluralisme et par la beauté de cette diversité tout autour de moi. Dans chaque différence que j’observais, je voyais une leçon à apprendre. Cependant, j’étais limitée par quelques obstacles autres que la langue. La façon de penser diffère, les valeurs qui nous sont chères ne sont pas les mêmes et nos chemins divergent.
Toute ma réalité a été bouleversée quand j’ai finalement rencontré « des Égyptiens ! ». Pour notre premier Noël, ma famille a décidé d’aller à l’église Copte de Vancouver (Copte : chrétien de l’ancienne Égypte). J’ai immédiatement senti que j’étais chez moi. Les jeunes m’ont accueillie avec des sourires radieux. Je suis donc devenue semblable à ceux que je critiquais auparavant. C’est réconfortant de se comprendre dès la première rencontre, de partager les mêmes goûts en musique et d’aimer la même cuisine. Et à un niveau plus profond, mes amis canadiens d’origine égyptienne partagent avec moi ce qui m’intéresse le plus dans la vie : ma foi et mes principes.
Je ne défends ni la séparation des cultures, ni leur assimilation. D’après moi, il faut trouver un équilibre entre le maintien de ses racines et l’ouverture aux autres. C’est là un mode de vie très canadien.