Les Pays-Bas sont un pays densément peuplé où plusieurs grandes villes se touchent pour former une vaste région urbaine de huit millions d’habitants. La plupart des touristes étrangers ne s’intéressent qu’à une seule de ces villes… Amsterdam. Cette municipalité de huit cent cinquante mille habitants est composée de quartiers modernes sans attrait touristique particulier et d’un centre historique relativement petit où se bousculent six millions de touristes par an.
En fait, ce chiffre n’inclut que les visiteurs qui passent la nuit à Amsterdam et ne tient pas compte de ceux qui choisissent un hôtel dans une des municipalités voisines et se rendent dans la vieille ville par train de banlieue. La renommée internationale d’Amsterdam est compréhensible : l’architecture de cette vieille ville portuaire, les grands musées et sa vie nocturne réputée en font une des grandes attractions touristiques d’Europe. La majorité des touristes étrangers ne voient qu’Amsterdam et ignorent tout du reste du pays. Or, Amsterdam est une ville spéciale où, selon les statistiques officielles récentes, les Néerlandais de souche sont minoritaires. En effet, c’est une ville multiethnique et multiculturelle (10 % de Marocains, 5 % de Turcs, etc.) où un touriste peut facilement passer la journée entière sans jamais parler à un Néerlandais d’origine. L’anglais y est tellement utilisé que l’on pourrait presque croire que c’est une langue officielle. Entre les restaurants asiatiques, les marchands de kebabs et les chaînes de hamburgers, il est à se demander si les Néerlandais ont leurs propres traditions culinaires.
Or, à une centaine de kilomètres de là, de l’autre côté du lac de l’Yssel (IJsselmeer, en néerlandais) se trouve une province presque inconnue des touristes étrangers, la Frise (Friesland, en Néerlandais). Leeuwarden, la capitale, a, comme partout aux Pays-Bas, des vélos et des canaux, mais aussi des gens accueillants qui sont contents de vanter les mérites de leur province aux rares visiteurs étrangers qui se donnent la peine de venir les voir. De là, on peut aller visiter certaines des onze petites villes de la province en louant une voiture (on est loin des embouteillages de la région d’Amsterdam) ou en utilisant les transports publics (trains et autocars). Les plus athlétiques peuvent sillonner la province en vélo grâce à un excellent réseau de pistes cyclables qui ne se contentent pas de longer les routes, mais relient les villages à travers les champs. Sur ces voies cyclables rurales, impeccablement goudronnées, on pédale au son des petits oiseaux. Comme partout aux Pays-Bas, les gens savent parler anglais ce qui est bien pratique pour le visiteur étranger. Quand le touriste canadien engage la conversation dans un café de village, il se trouve souvent quelqu’un pour s’empresser d’expliquer qu’il a un cousin à Toronto ou une vieille tante dans la vallée du Fraser, tant de Néerlandais ayant émigré au Canada après la Deuxième Guerre mondiale. Aux Pays-Bas, personne n’a oublié que ce sont des soldats canadiens qui ont libéré une grande partie du pays de l’occupation allemande et apporté de l’aide alimentaire à une population affamée.
Parmi les jolies petites villes de Frise que j’ai eu le bonheur de visiter, je note particulièrement le port de Harlingen d’où l’on peut prendre un traversier pour se rendre dans les îles de la mer de Wadden, encore plus rurales et tranquilles. Même en plein été, alors que les Européens se précipitent par millions sur les routes des vacances, la Frise et les provinces rurales avoisinantes demeurent relativement paisibles. Les touristes que l’on croise sont souvent néerlandais, surtout de la région d’Amsterdam. Ils se réfugient en Frise pour échapper aux hordes touristiques qui se sont abattues sur leur ville.