Moment idyllique. Dans quelques heures le soleil va se coucher, l’instant idéal de mes soirées d’été. Le clou de ma journée. Le marteau de ma vie. L’enclume de mon existence. La faucille de mes nuits. Chaque soir, lorsque le temps me le permet, et si mes obligations sociales ou familiales ne me retiennent pas, peu avant le crépuscule, je me rends au bord de mer sur une des plages de Vancouver. Les plages situées à l’ouest de celle de Jericho me conviennent parfaitement.
En cette soirée du début de septembre c’est sur la plage de Locarno que j’ai jeté mon dévolu. Accompagné d’une chaise pliante et de mon épouse souriante, je m’y suis installé. À mon âge j’ai besoin des deux pour être heureux.
D’un regard panoramique, j’admire le magnifique paysage qui s’offre à mes yeux. Je ne peux me retenir « Que c’est beau Vancouver », me dis-je intérieurement car je ne tiens pas à dévoiler tout haut et au grand jour ce que je pense tout bas. Pudeur, mal placée sans doute, oblige. Je n’ai pas peur du ridicule qui, comme chacun le sait, ne tue pas, mais il m’indispose, d’où le besoin que j’éprouve de me censurer. Après pareil aveu je retourne à mes bateaux à défaut de mes moutons qui ne fréquentent pas les plages de Vancouver.
Je compte les cargos et navires de commerce tranquillement amarrés en attendant d’être convoqués au port. Je suis ébloui par la dextérité des véliplanchistes, je contemple la fière allure des voiliers qui fourmillent dans l’anse et qui s’en donnent à cœur joie avant la tombée de la nuit. J’apprécie la tranquillité de l’instant. Pas de radio, pas de musique de ghetto-blasters, seuls les rires de jeunes enfants et le cri des mouettes. Tout est paisible : le paradis sur terre. J’oublie tous les déboires par lesquels le monde passe. Je sais que ceux-ci me rattraperont une fois rentré chez moi lorsque je m’installerai devant mon poste de télé pour regarder le journal télévisé. Inutile donc de culpabiliser durant mon bref moment de relâche à la plage. J’ai droit au répit.
Ma femme lit. J’essaie d’en faire autant. En vain. Lentement mais sûrement je m’assoupis. Puis, hypnotisé par le spectacle qui s’offre à moi, je me perds dans mes pensées. Celles-ci m’amènent à réfléchir sur le prochain sujet de ma chronique. Je n’ai pas envie de parler de l’actualité politique qui semble animer la pensée collective. Non, je dois trouver un autre sujet. La fête du Travail par exemple peut m’inspirer. Essayons.
Toute bonne chose a une fin. Fini les vacances, retour au labeur. « Tu travailleras à la sueur de ton front » aurait-il dit. Il faut être pas mal effronté pour sortir un truc pareil. « Le travail c’est la santé », encore une autre absurdité. Demandez aux mineurs, travaillant à 1000 pieds sous terre, pour savoir ce qu’ils en pensent. Pourquoi faut-il que tous les dictons, à ma connaissance et ceux cités sur internet, encensent et fassent l’apologie du travail ? Vanter les mérites du travail c’est faire un pied de nez au Créateur, si l’on en croit la Bible. Dieu a voulu nous punir et non nous récompenser en nous obligeant à travailler. Le travail serait donc une tare, un fléau, une punition; méritée ou non ? Question à débattre. Encore une fois je crois que les auteurs de la Bible, des gens sans doute bien intentionnés, se seraient mis le doigt dans l’œil en sortant une pareille sottise.
Trop belliqueux. Si je poursuis dans cette veine je vais mériter l’enfer. Je n’y tiens pas. Non, parlons plutôt de la rentrée.
La semaine dernière nous avons célébré la rentrée. Comme il se doit, tout est entré dans l’ordre. Les écoliers ont retrouvé le chemin de l’école et les travailleurs la direction du boulot. Impossible de faillir à cette tradition, tout le monde s’y plie, sous peine de se voir marginalisé ou ridiculisé. « Les us et coutumes doivent être respectés, sinon place au chaos » ne cessait de répéter un de mes oncles, militaire de carrière qui, contrairement à moi, ne supportait pas les anarchistes.
Voilà que je m’éloigne du sujet. Un peu de discipline ne me ferait pas de mal. La fin de l’été peut-être ?
Nous voilà donc très proches de la fin de l’été. J’ai presque envie de dire, non sans un brin de tristesse, finis les beaux jours. Mais ce ne serait pas rendre justice aux autres saisons qui se préparent à nous accueillir. Elles font ce qu’elles peuvent. Elles ont leur raison d’être. Elles aussi ont droit au chapitre.
Oui! Et alors ? Je ne suis pas sûr d’aller bien loin avec cette histoire. Non, je dois envisager autre chose. Que c’est difficile d’être cohérent, original et productif une fois bien installé sur une plage les pieds dans le sable. Et si je parlais tout simplement de mon expérience personnelle.
Un soir d’été.
Moment idyllique. Dans quelques heures le soleil va se coucher, l’instant idéal de mes soirées d’été. Le clou de ma journée…(Pour découvrir la suite de cet article, inutile de vous abonner; le tout a déjà été écrit).