Halloween est aujourd’hui célébrée dans de nombreux pays à travers le monde, et fait partie des incontournables de la culture nord-américaine. Mais que sait-on vraiment des origines de cette fête ? Citrouilles, lampions et fantômes ont-ils toujours été les archétypes de l’Halloween ?
Chaque année au mois d’octobre, magasins et maisons se parent de couleurs orange et noir, les étales débordent de citrouilles, de bonbons et de décorations de toutes sortes rappelant le monde des morts et de la sorcellerie. Les décorations vont crescendo, atteignant leur paroxysme le jour J du 31 octobre, avec d’étonnants défilés costumés dans les rues. Celui qui rivalisera de créativité ou de bizarrerie décrochera la meilleure couverture médiatique.
Les origines celtiques de l’Halloween
Halloween serait inspirée d’une célébration d’origine celte appelée Samhain. Cette célébration incorpora dès l’an 308, avec l’empereur romain Constantin, des rites en l’honneur de la déesse Pomone, divinité des fruits.
Samhain se répandit en Écosse, dans les îles britanniques et en Gaule. Au 8e siècle, les papes Grégoire III, puis Grégoire IV, instaurèrent le déplacement de la Toussaint du 13 mai au 1er novembre pour la faire coïncider avec les fêtes préexistantes de Samhain. Ce glissement de dates fut à l’origine même de la terminologie Halloween, contraction de All Hallow’s Eve (veille de la fête de tous les saints, la Toussaint).
Samhain, devenue Halloween, essaima dans le Nouveau-Monde avec la diaspora irlandaise, émigrée massivement en raison des grandes famines du milieu du 19e siècle. Ainsi sa célébration revêt aujourd’hui une ampleur particulière en Irlande, en Écosse, au Pays de Galles, aux États-Unis, au Canada et en Australie, bien que très populaire dans la plupart des pays du monde.
Les rites traditionnels de Samhain
Les festivités de Samhain s’étendaient sur plusieurs jours au début du mois de novembre, à mi-distance entre l’équinoxe d’automne et le solstice d’hiver. Elles marquaient le passage de la saison claire à la saison sombre dans le calendrier celte, la fin des récoltes, la mise en étable du bétail, le repos de la terre cultivée et des pâturages, et le commencement d’une nouvelle année.
À cette période charnière du calendrier celtique, la frontière entre le monde des vivants et celui des morts était réputée plus ténue qu’à l’ordinaire, facilitant la manifestation furtive de défunts auprès des vivants et la pratique de l’art divinatoire. Ce passage entre deux mondes permettait aussi de se recueillir et de célébrer les morts.
Pour Antone Minard, spécialiste des études des peuples celtes et professeur à Simon Fraser University, « C’est une période cruciale pour les Celtes, une période d’occasions favorables et de dangers ».
On sait que beaucoup de rituels lors de ces festivités célébrant le passage de la lumière à l’ombre permettaient de s’enquérir de la fertilité des hommes, du bétail et des récoltes de l’année qui s’annonçait. S’adonner à l’art divinatoire, à l’interprétation des rêves était alors de bon aloi.
Les femmes pouvaient entrapercevoir le visage de leur futur mari dans un miroir, dans de la cire ou du métal fondu. Les hommes, mains ligotées dans le dos, pouvaient tenter de mordre et de soulever une pomme flottant dans un tonneau. Leur réussite signifiait qu’ils connaîtraient l’amour dans l’année. De nombreux aliments consommés pendant Samhain contenaient des objets, d’autres étaient choisis les yeux bandés, et permettaient généralement de prédire l’avenir.
« Ce que l’on sait moins, c’est la crédibilité qu’ils accordaient à ces rituels et jeux divinatoires. Était-ce sérieux ou juste pour rire ? », se questionne Antone Minard. Dans tous les cas, ces moments permettaient de se rassembler, de former de nouveaux couples et de renforcer les valeurs de la culture celte.
Lampions et citrouilles, archétypes de l’Halloween
Le feu était un symbole et un élément important des célébrations de Samhain. Les druides et les personnes faisant du porte-à-porte les soirs de Samhain pour récolter des dons ou des sacrifices se seraient éclairés de lampions transportant des tisons, sculptés dans un légume-racine tel que le navet ou la betterave fourragère.
C’est après le 19e siècle, à la suite de l’émigration irlandaise, que le navet s’est transformé en citrouille. « Essayez de creuser un navet cru, c’est presque impossible ! Et cuit, il n’a plus aucune tenue pour en faire un lampion ! Alors vous comprendrez pourquoi cette coutume a évolué pour laisser place à l’engouement invétéré que l’on connait aujourd’hui pour l’évidage de citrouille », s’amuse le professeur.
Il serait commode de se dire que les couleurs orange et noire, si représentatives d’Halloween de nos jours, puisent leur origine dans la palette des couleurs automnales d’un pays tempéré comme l’Irlande. Mais il n’en est rien car il ne faut pas oublier que la citrouille est une plante venue des Amériques.
L’origine du costume
La proximité du monde des morts pouvait causer des problèmes pendant le temps de Samhain. Les vivants se déguisaient alors pour ne pas être confondus et emportés avec les esprits rôdeurs ou pour les garder à distance. Certains sacrifices étaient alors honorés pour apaiser les esprits rôdeurs et les dieux. D’où peut-être l’origine du fameux « trick or treat » (« un bonbon ou un sort »).
Antone Minard rappelle que les rites religieux des Celtes nous sont mal connus du fait du peu d’écrits existants. « Il existe aujourd’hui beaucoup de désinformation sur le sujet. Je pense qu’en l’absence de nombreux écrits, il est primordial de s’intéresser davantage à la culture, à la langue et aux mythes celtiques afin de mieux comprendre ce peuple et ainsi avoir plus d’éléments pour séparer le bon grain de l’ivraie », explique le spécialiste.