Une étude publiée en mars 2016 dans la revue Nature et menée par le Centre sur l’évolution humaine, cognitive et culturelle de UBC s’intéressait au rôle des religions dans la psychologie humaine et à ses effets sur la vie sociale des individus. Cette étude d’envergure internationale, dirigée par Benjamin Purzycki, alors professeur en anthropologie socio-culturelle à UBC, éclaire toujours autant la réalité du fait religieux deux ans plus tard.
Le professeur et chercheur né au Missouri a fait sa maîtrise à l’université du Nebraska et son doctorat à l’Université du Connecticut. Entre 2012 et 2016, il poursuit des études postdoctorales à UBC, avant de rejoindre le Max Planck Institute à Leipzig en Allemagne. Il se dit athéiste mais ajoute qu’il a toujours été fasciné par l’idée de Dieu ou des dieux.
Pourquoi l’anthropologie ? Ce domaine lui permet tout simplement d’approfondir son intérêt pour l’évolution de l’espèce humaine. Il y mène également des études interdisciplinaires sans trop se préoccuper des barrières traditionnelles entre les différentes disciplines académiques.
Plusieurs foi(s) vers
un but commun
Ce chercheur prend comme prémisse que « lorsque les gens parlent de leur(s) dieu(x) ils mettent souvent l’emphase sur ce que ces dieux savent et veulent de nous et ce même s’il n’y a aucune évidence qui prouve leur existence ». Et donc, les religions qui ont un dieu ou des dieux qui savent tout et punissent les transgressions morales auraient comme caractéristiques de cultiver non seulement la culpabilité, mais aussi la coopération entre personnes religieuses.
« Des personnes qui partagent les mêmes principes et valeurs auraient tendance à ne pas vouloir faire de mal aux autres ni entrer en conflit avec eux, ou du moins tendre à plus de coopération ». Il ajoute que cette affirmation n’est pas absolue et que, oui, des conflits qui ont souvent des connotations religieuses continuent d’exister. Par contre, des communautés de religion différente ont souvent vécu côte à côte pendant très longtemps comme en Syrie par exemple, et les racines de ces conflits n’ont pas leur source fondamentale dans la religion.
La recherche elle-même s’attarde davantage sur comment la religion peut avoir des effets sociaux positifs sur le comportement des individus, leur psychologie et leurs actions envers les autres. Comme si le fait de penser que dieu/les dieux savent ce que l’on fait et qu’ils punissent pourrait avoir des conséquences directes sur la psychologie de nos comportements et nos actions. La religion agirait comme agent naturel de stabilité intérieure.
À partir de ses recherches sur le terrain et celles d’autres chercheurs, Benjamin Purzycki affirme que la religion peut jouer un rôle économique et social positif, en particulier au niveau de l’environnement. Il mentionne qu’à Bali, plusieurs rituels en relation avec l’eau pratiqués en l’honneur d’une déesse sont directement liés à une meilleure distribution de l’eau parmi les différentes communautés, à une meilleure qualité de l’eau et à l’amélioration des récoltes de riz.
Dans la république de Tyva, dans le sud de la Sibérie, où ce professeur fait des recherches, il semble que les gens croient de plus en plus que les « esprits » se préoccupent des ravages causés par l’abus de l’alcool. Mais à savoir si cette préoccupation aura un effet positif est encore à voir, selon le chercheur. Pour Benjamin Purzycki, les dieux/esprits et les rituels qui leur sont adressés peuvent changer les valeurs des gens et offrir une réponse aux problèmes sociaux et environnementaux auxquels ils font face.
Même l’Église catholique et son Dieu, par l’intermédiaire de la parole du pape, s’intéressent aux problèmes environnementaux. Depuis quelques années, le pape a joint le mouvement environnemental dans la lutte contre les changements climatiques. Le pape nous dit que Dieu se préoccupe de l’environnement et demande non seulement aux catholiques de joindre le mouvement mais aussi à tous les citoyens du monde de prendre soin de la planète. L’étude en question affirme aussi que des messages de coopération semblables à celui du pape pourraient être mieux acceptés par des personnes religieuses même si de croyances différentes, et ce, dans un esprit de coopération, concept central de cette étude.
Le chercheur se demande si le monde séculaire ne pourrait pas se nourrir de certains bienfaits de la religion dont celui de la coopération pour mieux fonctionner. La religion a toujours joué un rôle non seulement spirituel mais aussi social et ce, pour le meilleur et le pire.
En conclusion, Benjamin Purzycki ajoute : « Une recherche académique séculière ne pourrait-elle pas mieux étudier la contribution de la religion pour un monde plus juste et équitable ? ».
Une chose est certaine, nous avons de plus en plus besoin d’une plus grande et meilleure coopération entre les habitants de notre planète.