Isabelle Côté, professeure en écologie marine à l’Université Simon Fraser, a posté son premier tweet en 2012. Près de 6 000 abonnés plus tard, elle a démontré à plusieurs reprises l’utilité du réseau social Twitter pour la communauté scientifique.
Après avoir conduit deux recherches sur l’utilisation de Twitter par les scientifiques, Isabelle Côté est convaincue des avantages du réseau social. Partage, accessibilité, curiosité : malgré sa limite de 240 caractères par message, Twitter ouvre selon elle un monde de possibilités aux scientifiques.
L’audience des scientifiques
En juin dernier, Isabelle Côté a co-publié, avec Emily Darling, une nouvelle recherche concernant l’audience des scientifiques sur Twitter. « Nous avions le sentiment que l’audience se diversifie à mesure que les abonnés augmentent, explique Isabelle. Nous voulions découvrir s’il y avait un certain palier au-delà duquel les scientifiques ne parlent pas seulement à d’autres scientifiques, mais si cela devient vraiment un moyen de communiquer plus largement au reste du monde. »
D’après leur étude, il semblerait qu’avec seulement 100 abonnés l’audience soit essentiellement composée de scientifiques. Au-delà de 500 abonnés, commencent à apparaître médias, leaders d’opinions, organismes scientifiques et utilisateurs non scientifiques, représentant toutefois moins d’un quart de l’audience totale.
Et, « au-delà de 1 000 abonnés, se réjouit Isabelle, les gens qui suivent les scientifiques sont vraiment divers. » Près de la moitié de l’audience n’est alors aucunement affiliée à la science.
Accessibilité et conversations
L’une des spécificités des réseaux sociaux est qu’ils facilitent l’accès aux idées et aux autres. Il est simple de poster une idée, un concept, et de récolter des réponses en quelques secondes. Comme le souligne Isabelle Côté, « si l’on veut que la science soit accessible, Twitter est un bon moyen de toucher beaucoup de monde ».
Un scientifique avec une présence numérique est plus facile à contacter, ce qui peut favoriser la curiosité et encourager les questions des utilisateurs qui ne sont, justement, pas scientifiques. Toujours dans ce souci de rendre la science accessible, Isabelle explique que « quand quelqu’un ne comprend pas quelque chose qu’ils ont vu, je suis plus qu’heureuse d’en discuter et d’expliquer le monde naturel à des gens qui en savent moins que moi à ce sujet ».
Isabelle reste cependant consciente que les choses bougent vite lorsqu’il s’agit de réseaux sociaux. « Les gens peuvent s’abonner, mais il n’y a aucune garantie qu’ils vous liront », admet-elle. De la même manière, elle garde à l’esprit qu’elle s’adresse parfois à un public moins familier avec les termes et concepts scientifiques qu’elle pourrait utiliser. « À moins que ce ne soit spécifiquement destiné à d’autres scientifiques, explique-t-elle, j’essaie de rendre la publication accessible. »
Du tweet à la collaboration
L’autre aspect dont Isabelle Côté se félicite, c’est l’occasion de collaborer avec d’autres scientifiques. Dans un article publié en 2013, qu’elle a co-écrit avec Emily Darling et deux autres confrères, elle étudiait justement comment Twitter pouvait aider les scientifiques tout au long d’une recherche, que ce soit pour appeler au partage de découvertes et informations, ou bien recueillir des retours et opinions sur un travail en cours.
Et cet article était lui-même la preuve que Twitter peut rassembler, puisque l’éditeur avait dans un premier temps twitté une annonce. Isabelle se souvient : « Cet article était le fruit de quatre individus sur Twitter, qui ont vu ce tweet, et qui ont décidé qu’ils avaient quelque chose à dire à ce sujet. »
De son côté, au-delà de partager sa passion pour la biologie marine et ses découvertes, Isabelle utilise également Twitter pour recruter des étudiants quand les réseaux plus traditionnels se montrent inefficaces.
Twitter a donc prouvé son utilité plus d’une fois pour Isabelle, qui considère ce réseau social comme « un moyen valide de diffuser la science ». Elle regrette cependant que certains chercheurs « ne comprennent pas le médium et sa valeur ». La route est longue pour que les plateformes numériques gagnent la confiance du monde scientifique.