Cela fera cent ans cette année. Exactement 36 526 jours que cette date est gravée dans nos mémoires collectives. Le 11 novembre 1918, les Alliés victorieux, dont le Canada fait partie, et l’Allemagne vaincue, signaient l’Armistice de la Première Guerre mondiale, marquant un véritable tournant dans l’histoire de l’humanité. Comme chaque année, de nombreuses commémorations sont prévues à Vancouver, dont plusieurs musicales. Si la musique adoucit les mœurs, quel rôle joue-t-elle dans le rituel commémoratif du jour du Souvenir ?
Plus de 600 000 soldats canadiens ont combattu pendant la Première Guerre mondiale, dont environ 55 000 résidant en Colombie-Britannique, et près de 66 000 ont perdu la vie. Bien que Vancouver n’ait pas été le théâtre d’affrontements, le jour du Souvenir s’est tenu dès la première année en hommage aux soldats tombés au combat. Ceux-ci chantaient déjà sur les lignes de bataille, des chants contestataires comme ceux de la trêve de Noël. Aussi on peut imaginer que les commémorations ont toujours intégré la musique. Comment expliquer le recours à la musique en ce jour solennel ?
Atténuer la douleur et unifier
L’Armistice marque le moment où les derniers canons se sont tus. Le silence observé pendant les commémorations y fait écho. Mais il peut être lourd. Aussi, pour combler ce vide, la musique apporte naturellement la force pour surmonter cette épreuve et permettre de pérenniser l’histoire.
La chorale Chor Leoni fait partie des commémorations en musique. Pour expliquer la motivation de chanter en ce jour, l’un des chanteurs souligne que grâce à la musique, « on devient plus à l’aise dans les situations inconfortables ».
Mark Haney, directeur artistique du groupe musical Little Chamber Music qui organise un concert du 11 novembre depuis 2014, pense que « plus que tout, la musique nous amène dans les meilleures conditions mentales pour se recueillir et se souvenir. Nous sommes tellement bombardés d’informations en tout genre de nos jours et à tout moment que lorsque la musique retentit, et que les téléphones sont rangés, on ne peut que se rassembler et écouter côte à côte, afin de réfléchir sur l’importance de ce jour. » Il confie également qu’il ressent la musique jouée le 11 novembre différemment d’un autre jour en raison de son « but très important : faire que les personnes qui ont tout donné il y a cent ans ne soient jamais oubliées. »
Bill Carpenter, président de la chorale amateur Vancouver Welsh Men’s Choir voit la musique comme quelque chose qui « touche l’âme humaine comme rien d’autre. Elle nous permet de garder le lien avec le passé
tout en nous aidant à entrer en contact avec les autres, de quelque horizon ou culture que ce soit. Elle nous transcende dans l’acceptation de l’autre. La musique est un vecteur d’unité et d’inspiration. »
La chorale Vancouver Bach Choir, commissionnée par la ville de Vancouver pour la cérémonie officielle municipale, interprète des chansons que l’on pouvait entendre pendant la Première Guerre mondiale, ce qui est « un moment fort pour [les anciens combattants] qui s’en souviennent », note Nina Horvath, directrice générale de la chorale. « Je pense que le lien que notre pays entretient avec l’histoire et les sacrifices faits en son nom ne se manifeste jamais de manière aussi significative que le jour du Souvenir. L’association des orchestres
militaires, les chorales, les anciens combattants, les dépôts de gerbes, la lecture des poèmes, et bien sûr, le recueillement, créent cette ambiance si particulière. Je vois par exemple nos jeunes chanteurs adoptant une attitude plus mature qu’à l’habituée car ils sentent très bien l’importance et la solennité de l’évènement. »
Le révérend Beth Hayward de la chorale appartenant à l’église Canadian Memorial United Church and Centre for Peace décrit la musique comme touchant « les personnes de manière très profonde, qui nous plonge dans un ressenti et une expérience qui sont plus profonds que ne peuvent l’exprimer les mots. Rassembler les individus pour chanter ensemble et être emportés par la musique en ce jour si fort de sens, justifie le recours à la musique. » Et de conclure : « La musique peut ouvrir nos cœurs non pas seulement pour se souvenir d’évènements passés mais aussi pour nous donner l’inspiration de vivre un futur pacifié ».
À l’unisson aux quatre coins de la métropole
La première cérémonie musicale de la Canadian Memorial United Church and Centre for Peace s’est tenue en 1928. L’église fut construite à l’initiative du prêtre de l’époque, le colonel George Fallis, qui avait enterré de nombreux soldats. Elle représente un « engagement pour la paix ». La liturgie musicale du matin sera dans la tradition chrétienne pour un moment de recueil et celle de l’après-midi est organisée de concert avec la chorale du Universal Gospel Choir dont la tonalité éloquente et soul ajoutera à l’ambiance positive et inspirante recherchée.
C’est en 2014 que la chorale Little Chamber Music a inauguré son premier concert du 11 novembre, à Falaise Park, non loin de la « Dieppe drive », développé en 1948 en l’honneur et dédié aux anciens combattants. « Mille personnes se sont déplacées, ce qui m’a fait prendre conscience à quel point il y a une demande pour une commémoration en musique », se souvient Mark Haney. En cette année du Centenaire, le souhait est que le moment soit une méditation. Ainsi, cent cuivres répèteront une phrase musicale simple cent fois. Le but est d’évoquer le défilé incessant des soldats et le bruit acharné des fusils des batailles.
Retrouvez les informations complètes sur le site des chorales citées de même que sur les sites Internet des municipalités du Grand-Vancouver.