Peut-on toujours suivre son destin ? Comment vivre son identité culturelle dans un monde multiculturel qui change constamment ? Ce sont là les deux questions sous-jacentes de la création originale d’Akram Khan.
Le chorégraphe britannique de danse contemporaine présente à la fin novembre à Vancouver Chotto Desh, un spectacle musico-théâtral sur le thème de l’appartenance et du destin. Inspirée de sa propre histoire, cette création originale est mise en scène tel un conte initiatique.
Akram Khan est né au Bangladesh où, très jeune, il a développé une passion pour la danse et l’envie d’en faire son métier. Tel n’était pas le projet de son père, qu’il décrit comme autoritaire. Face à cet obstacle familial, et face à l’avenir limité pour un danseur dans ce pays, Khan a fait le choix d’émigrer au Royaume-Uni pour réaliser son rêve. Loin de sa culture, il n’a cependant pas abandonné ses racines. Dès ses débuts, il s’est illustré avec le style ancien du nord de l’Inde appelé « kathak », marqué par cette culture. Ce style visuellement fort et provocant l’a élevé au rang d’artiste de renommée internationale.
L’importance de trouver sa propre voie
Chotto Desh, qui signifie « petit pays » dans sa langue maternelle bengali, est l’adaptation pour un public plus jeune, de son précédent spectacle Chotto, qui veut dire « Terre natale ». De sa collaboration avec la directrice artistique Sue Buckmaster, Khan dit être « très enthousiasmé de voir comment sa vision révèle cette histoire d’un enfant grandissant entre deux cultures, les différences de perception qu’il existe entre les générations, et comment le concept de terre natale est raconté ». Sur fond de chant persan féminin qui confère une ambiance résolument onirique, l’univers scénique, fait d’éléments de décor et d’animations interactives, permet de saisir plus facilement les flashbacks et contextes de l’histoire racontée. Une voix en coulisse intervient également pour représenter les personnes ayant marqué la vie de Khan. Par exemple celle de son père, qui ne comprend pas et n’accepte ni cette passion ni cet art. Dans une scène marquante, le soliste enchaîne les fameux mouvements de Michael Jackson, avec des pirouettes hip hop, au kathak traditionnel. La danse se révèle alors plus efficace que les mots qui ne trouvent pas de solution face à ces situations de malentendus et de blocages.
« Chotto Desh (est) on ne peut plus pertinent de nos jours pour les jeunes. Ils sont sujets à une pression de plus en plus importante de la part de notre société multiculturelle. Cela va donner l’inspiration nécessaire à ces jeunes de réfléchir sur leur propre destinée et peut-être créer leur propre art autobiographique fait de beauté et de réalité », explique Khan. Sur cette question de l’identité culturelle qui forme notre personnalité et la manière de se présenter aux autres, Jim Smith, Directeur du Dance House ajoute que « les enfants sont très perspicaces. Ils ont conscience des tensions grandissantes sur la question de l’immigration et du multiculturalisme dans notre société. Il est donc crucial que nous les incluions dans la conversation afin de les aider à trouver leur propre identité tout en respectant l’autre ».
Chotto Desh virevolte en douceur entre émotions fortes, moments plus légers et compassion. Ce solo emmène le public sur les traces de ses propres rêves avant de le ramener avec délicatesse sur la question de l’identité, offrant un équilibre juste entre abstrait et réalisme, complexité et simplicité. Le résultat est également l’occasion de partager avec les plus jeunes – enfants, neveux, petits frères ou autres – une réflexion sur notre façon de conjuguer rêves et obstacles à contourner.
Dans une ville aussi plurielle que Vancouver, où la majorité des habitants évolue entre leur culture d’origine et celle de ce pays d’accueil et où ce sujet est si prégnant, Chotto desh résonnera particulièrement et ravira le plus grand nombre, sans notion d’âge.
Le spectacle Chotto Desh est présenté au SFU Woodward et au Théâtre la Seizième du 21 au 24 novembre en français ainsi qu’une représentation en langage des signes. Billets et informations sur www.dancehouse.ca