Dans un monde qui bouge, où la technologie est en grande croissance, il faut penser à l’éducation et la réenvisager à mesure que les changements se produisent. Aussi, faut-il apprendre des cultures originaires des Amériques qui ont su non seulement survivre mais aussi se réadapter tout en défendant leurs identités au cours des changements socio-politiques dans l’histoire.
La dialectique entre les Premières nations canadiennes et les institutions coloniales dans le développement de la vie nationale, sociale, politique, économique, etc., démontre déjà un échange culturel vivant de reconnaissance de l’autre. Cet échange principal modèle dès le début l’identité nationale et sert de guide au dialogue avec d’autres groupes culturels s’intégrant dans la vie du pays.
Jules Koostachin participera aux présentations plénières pendant la conférence Décolonisation des technologies, reprogrammation de l’éducation organisée par l’Institut des études critiques indigènes de l’Université de la Colombie-Britannique et le Humanities, Arts, Science and Technology Alliance and Collaboratory (HASTAC), qui aura lieu dans le territoire ancestral du peuple Musqueam du 16 au 18 mai. Pour elle, la décolonisation, plus qu’une initiative, est un résultat de la participation active des peuples indigènes dans les institutions. « C’est la navigation dans les institutions coloniales, la lutte pour s’y faire entendre; il y a beaucoup à faire dans les institutions. »
La voix crie sur les écrans
Inspirée par son enfance rurale et urbaine à la fois, Mme Koostachin, Crie de la province d’Ontario, cherche à mettre en relief les aspects positifs de l’appartenance aux groupes autochtones. Elle est réalisatrice de documentaires et candidate au doctorat de l’Institut de Genre, Sexualité et Justice sociale de l’Université de la Colombie-Britannique. « Pour la réalisation de mes documentaires je pense aux enfants de ma communauté, Attawapiskat, lorsqu’ils ne se voient pas représentés à l’écran d’une manière positive », affirme Koostachin. « C’est une manière de résister à l’idée répandue que nous sommes ‘le problème du Canada’, ce qui est très raciste et colonialiste… aux séries documentaires que je réalise, je vise à reconnaître l’existence des communautés, des sages gardiens des connaissances ancestrales qui aident des enfants à se relier à la terre. » Son travail ne cherche pas à éduquer les non-indigènes, il est surtout fait pour que les nouvelles générations des groupes autochtones connaissent ces protocoles, ces communautés, et s’y identifient.
Pendant ses années de recherche, Mme Koostachin découvre que les peuples indigènes font partie de l’interaction vers le progrès technologique dès l’arrivée des colons… spécialement pour l’industrie du film où
« nous avons participé activement pour partager ce que nous considérons important en tant que peuples indigènes. Nous sommes présents en face des caméras et aussi derrière. »
Se reconnaître dans le dialogue
Être capable de raconter sa propre histoire est l’un des signes les plus clairs de liberté. Les technologies de nos jours permettent aux peuples et aux indigènes du monde de dire ce qu’ils sont, comment ils se définissent. « On s’est fait imposer des idées sur ce que nous sommes… mais maintenant on a saisi nos histoires ainsi que la manière de les raconter avec les nouvelles technologies. » Mme Koostachin, qui est dans la quarantaine, préfère ne pas utiliser le terme décolonisation car elle ne se sent pas issue du système colonial, qu’elle ne nie pas, mais dont on a certainement le choix de faire partie ou pas.
Aujourd’hui, l’éducation reste l’un des aspects institutionnels où la reconnaissance du patrimoine autochtone établit les bases pour des institutions moins colonialistes. « Parfois, dans le contexte universitaire, où j’enseigne à une grande diversité de personnes, je me suis fait dire que je parle depuis une optique très indigène… ; si c’est ce que je suis il n’y a pas un autre point de vue duquel je peux parler…», dit-elle. « Alors, la décolonisation passe par avoir dans le système éducatif plus d’enseignants indigènes qui ne sont pas là pour enseigner une histoire colonialiste mais qui sont surtout capables de la critiquer. »
Les travaux de Jules Koostachin se trouvent en ligne, de courts documentaires sur la CBC qui se transmettent et qui s’utilisent de plus en plus dans les écoles. Les séries se publient en cri avec des instructions sur comment enseigner certains sujets. Elle sera aussi accessible à la conférence Décolonisation des technologies, reprogrammation de l’éducation du 16 au 18 mai dans le territoire non cédé du peuple Musqueam.
Pour plus d’information, visitez le www.hastac.org.