Si la patrie du thé est sans conteste l’Angleterre, le Japon possède également un lien très fort avec le breuvage, exemplifié par la cérémonie qui lui est consacrée.
Celle-ci est aujourd’hui bien infusée dans l’art de vivre nippon. La pratique est cependant extrêmement codifiée, et chaque accessoire a son importance. L’encens en fait partie. Or, d’aucuns ne sauraient donner son utilité précise. C’est pourquoi le centre culturel japonais de Burnaby propose un atelier le 23 juin prochain pour en savoir davantage sur son rôle méconnu et inattendu. Sortez vos tatamis, enfilez vos kimonos et découvrons ensemble ce qui rehausse la saveur du thé et accentue ce rituel bien chorégraphié.
Le thé et le temps
Rappelons d’abord que le but du sado (cérémonie du thé en japonais) n’est pas de boire du thé comme la coutume britannique. Le sado est né primo comme un moment de convivialité pour profiter de l’instant présent avant de gagner en intérêt à en devenir par la suite une véritable tradition. Celle-ci répond à quatre grands principes qui peuvent être résumés sous le nom de wa-kei-sei-jaku, signifiant respectivement la paix, le respect que l’on se doit, la propreté et la pureté ainsi que l’importance de rester serein quoi qu’il advienne. Après plusieurs étapes successives de gestes ordonnés, raffinés et réalisés avec minutie, on y déguste le thé vert, plus connu sous l’appellation matcha, et loué pour ses vertus bénéfiques pour le corps grâce à ses 13 vitamines. Ces fondements lui confèrent de facto un haut niveau spirituel et de fait, le sado est aussi un moment de recueillement.
Maiko Behr officiera en tant que « maîtresse du thé », ou sensei pour les connaisseurs. Après des études d’histoire de l’art japonais, elle était encore étudiante lorsqu’elle officia sa première cérémonie du thé, au sein d’un club y dédié, fruit de son initiative. Forte d’un premier succès notable, elle a ensuite organisé les ateliers chez elle avant de lancer sa propre société, SaBi Tea Arts, cinq ans plus tard, en 2016. L’atelier qu’elle animera au centre Nikkei, abordera à la fois un aspect théorique avant la pratique centrée sur la préparation propre du rituel. Elle précise que cet atelier sera un tour d’horizon permettant de découvrir la culture japonaise à travers le prisme de la cérémonie du thé.
Écouter l’encens
Maiko Behr explique d’abord que l’emploi de l’encens s’est fait tout naturellement, la culture du thé étant profondément ancrée dans la philosophie bouddhiste, qui a elle-même toujours intégré l’encens dans ses pratiques. Ensuite, « l’encens est consumé en conjonction avec la combustion des braises du charbon pour le feu qui sert à faire bouillir l’eau du thé. La senteur du bâtonnet répond donc à la fonction pratique de masquer cette odeur de combustible » précise-t-elle. Mais certaines conventions veulent que sa fonctionnalité soit également plus psychique, à savoir de permettre le recueillement, et grâce à cette pleine-conscience, ne rien manquer du déroulé du cérémonial. Ce rôle de vecteur de l’instant présent explique que la seule exception pour ne pas en utiliser est si l’odeur risquait de nuire au goût des pâtisseries, les wagashi, servies généralement avec le thé. Enfin, il existe plusieurs types d’encens. « En été, on a recours à des senteurs de bois odorants tels que le santal et le bois d’aloès, » indique-t-elle. « En hiver, on utilise un bois plus complexe et riche, pour coller à la saison. Et parmi ces deux catégories, chaque hôte est libre de choisir comme bon lui semble ».
Il est d’ailleurs souvent rappelé que le but de l’encens n’est pas d’être respiré mais au contraire d’être écouté, dans la ligne des vertus psychiques qui lui sont prêtées. L’invité ouvre, non pas son odorat, mais son coeur et son esprit.
Peut-être est-ce dû à la durée moyenne de la cérémonie, quatre heures, mais Mme Behr regrette que les intentions de ce rituel, à savoir atteindre la pleine conscience et apprécier la compagnie des autres, s’oublient voire se perdent en intégralité au fur et à mesure que notre société devient toujours plus « occupée » et numérique. Retourner cette tendance est l’ambitieux projet que porte Mme Behr.
Et pour vous mettre encore plus à l’aise, elle nous éclaire pour éviter tout faux-pas, hantise intrinsèque dans la culture japonaise : « La seule responsabilité des invités est de savourer et profiter à plein, » s’exclame-t-elle. Une occasion à ne pas louper.
Renseignements et inscriptions sur le site www.centre.nikkeiplace.org.