Prajwal Madhav, natif du sud de l’Inde, est arrivé à Vancouver à l’été 2019. Son amour de la langue de Molière lui a permis de s’intégrer à une vitesse record. Portrait d’un anglophone qui a fait le choix à priori peu banal de faire sa vie en français en Colombie-Britannique.
Né en 1984 à Bangalore, Mr. Madhav a pour langue maternelle le Kannada. Une fois scolarisé, il a appris les deux langues officielles du pays, l’hindi et l’anglais. Intéressé dès son plus jeune âge par les langues étrangères, il se découvre vers dix ans un amour du français, qui ne le quittera plus. « La France est un pays qui m’a toujours attiré et donc je découpais des publicités des écoles et des guides touristiques dans le journal. Je les gardais précieusement parce que je rêvais de visiter Paris et d’aller en France, » se souvient-il avec tendresse.
Les premiers séjours en France
Quelques années plus tard, Prajwal Madhav se rend à Nîmes pour poursuivre des études en tourisme dans une école internationale avec un cursus anglais. C’est grâce à ses camarades qu’il apprend les bases du français en leur demandant de lui parler exclusivement dans cette langue et de le corriger si nécessaire. Pendant ses vacances d’été, il s’installe chez une famille des Alpes, en immersion totale. L’expérience est tellement réussie, que lorsqu’il retourne à l’école pour son second semestre, il est dispensé de cours de français.
Après un stage à Paris pour valider sa maîtrise, il se retrouve dans l’incapacité de prolonger son visa et se voit contraint de rentrer en Inde. Afin de valider son niveau de français, il passe les examens de l’Alliance Française de Bangalore et rejoint les cours avancés. C’est après cette nouvelle réussite que l’Alliance lui propose de devenir enseignant, une carrière à laquelle il n’avait jamais pensé. Il retourne ensuite en France en tant qu’assistant d’anglais. Mais une fois encore, il doit repartir.
« La France, c’est un pays où je me sens chez moi, mais où je ne peux pas vivre pour des questions de visa, » explique-t-il.
L’arrivée au Canada
Après de nombreux voyages, Mr. Madhav décide d’immigrer au Canada en 2015, par le biais du Québec. Ses démarches coïncident malheureusement avec la mise en place du nouveau système de gestion en ligne des demandes d’immigration de la province. Après quelques ratés dus à une plateforme informatique pas suffisamment solide, il peut enfin soumettre son dossier.
En septembre 2018, ne voyant rien venir du côté québécois et inspiré par deux collègues de l’Alliance Française, il se décide à refaire une demande, cette fois par le biais de l’entrée express du gouvernement fédéral, un visa destiné aux immigrants qualifiés. Une bonne idée, puisqu’en 2019, le gouvernement québécois annule 18.000 dossiers d’immigration, dont certains datant de 2005. Son dossier est du lot. Il obtient par contre son entrée express au printemps 2019.
La vie en français dans un contexte minoritaire
Arrivé en Colombie-britannique à l’été 2019, c’est tout naturellement qu’il a décidé d’y faire sa vie en français. « J’étais quand même dans un milieu francophone dans ma vie professionnelle, » dit Mr. Madhav, professeur de français depuis 11 ans.
C’est en cherchant des organismes d’aide aux nouveaux arrivants qu’il est tombé sur le programme d’immigration francophone de la Colombie-Britannique. Partant du constat que la plupart des immigrants de la province cherchent de l’aide en anglais, Mr. Madhav a fait la démarche de rejoindre des associations francophones un peu moins en demande. En quelques semaines, il trouve des postes d’enseignant de français contractuel au Collège Éducacentre et chez Learn French in Vancouver. Chez le premier, il enseigne à des employés de la fonction publique, chez le deuxième à des petits groupes. Attiré au Canada par la diversité culturelle du pays, Mr. Madhav est ravi de son nouvel emploi. « J’ai toujours rêvé d’enseigner à un public multiculturel. Dans certains cours, j’ai 6 élèves et 6 langues maternelles, » se réjouit-il.
Quand on lui demande la clé de son intégration réussie, Mr. Madhav pointe l’importance de se bâtir un réseau, de sortir, de faire du bénévolat, de rencontrer des gens. « Il faut réseauter, réseauter, réseauter ! » insiste-t-il, pour trouver un logement ou un emploi. Il faut capitaliser sur son expérience et garder une attitude positive, face à une condition de nouvel arrivant qui peut être effrayante au premier abord.
Aujourd’hui, vingt-cinq ans après sa première rencontre avec la langue française, Prajwal Madhav peut dire avec confiance qu’il peut toujours compter sur elle pour l’épauler dans ses nouvelles expériences.