Alors que les États-Unis s’apprêtent à se choisir un président (à l’heure où j’écris ces quelques lignes, rien n’est encore joué) je ne peux m’empêcher de revenir, avec un soupçon de curiosité bien placé, sur les élections provinciales en Colombie-Britannique qui ont vu l’écrasante victoire des néo-démocrates avec John Horgan premier de cordée. Ces braves gens, excusez ma condescendance, n’ont pas fait de quartier. Ils n’y sont pas allés de main morte. Les résultats, bien que provisoires, puisqu’il faut attendre le dépouillement du vote par correspondance pour les confirmer, ne laissent aucun doute. La victoire en chantant leur ouvre donc les barrières. Plus besoin de courtiser et d’accommoder le Parti vert pour gouverner. La voie est libre. Le premier ministre, toutefois, n’est pas sans savoir que cette voie peut être semée d’embûches.
Pas plus tôt une élection finie qu’une autre vient frapper à la porte. Ces derniers temps nous avons assisté à une flambée d’élections aussi bien au niveau provincial (Nouveau-Brunswick, Colombie-Britannique, Saskatchewan) qu’au niveau fédéral, où deux élections partielles se sont tenues afin de combler des postes de députés à Ottawa. J’ai eu le sentiment qu’on se bousculait un peu trop au portillon. Les élections devraient, elles aussi, maintenir une distance électorale sociale. Trop rapprochées, elles nous empêchent de
respirer et peuvent causer un arrêt cardiaque si nous les prenons trop à cœur.
La pandémie serait-elle responsable de cette poussée électorale ? Il faut croire que oui. En septembre dernier, alors que le coronavirus s’était bien installé au milieu du décor, le Nouveau-Brunswick avait montré l’exemple en déclenchant des élections provinciales. Le parti au pouvoir fut largement reconduit. Le gouvernement de la Colombie-Britannique, à la lumière de sondages qui lui étaient favorables, avait décidé d’emboîter le pas et de faire fi des critiques qui pouvaient s’ensuivre. Les résultats des élections du 24 octobre leur ont donné raison au grand désespoir des partisans du fair-play. Il va sans dire que leur gestion de la crise de la COVID-19 a certainement aidé leur cause. La Saskatchewan s’est, elle aussi, jointe à la partie en renouvelant le mandat du gouvernement sortant.
Il n’est donc pas absurde d’avancer que le coronavirus peut être un allié de choix pour tout gouvernement en place désireux de se faire réélire. De là à dire qu’un peuple inquiet préfère le statu quo plutôt que tout changement dont l’issue est incertaine, il n’y a qu’un pas que je n’hésite pas à franchir. En période d’incertitude et de moment difficile, qui veut tenter l’aventure ? Pas de carte d’invitation envoyée à l’impondérable pour assister au grand bal de la politique électorale lorsqu’une pandémie fait des siennes. Trudeau et ses libéraux seraient-ils tentés par cette logique ? Qui sait ? Les prochains mois peuvent nous réserver des surprises.
Au milieu de tout ce mouvement, de toute cette fièvre électorale, histoire de nous changer les idées, l’Halloween s’est frayé un chemin dans notre emploi du temps. Les craintes et les soucis, face à la crise du coronavirus, ont refroidi quelque peu l’enthousiasme des petits et des grands. Le fantôme de la COVID-19
a dû en effrayer plus d’un. La prudence était de rigueur et dans l’ensemble, je crois, fut respectée. En tant que grand-père par exemple, je me suis abstenu de faire la tournée des bicoques en compagnie de mes petits-enfants comme je le faisais les années précédentes alors que le coronavirus n’avait pas fait son apparition monstrueuse. Quelle drôle d’époque que celle que nous vivons. Comme il se doit, contrairement aux années précédentes, je porte un masque à la recommandation de ceux qui me veulent du bien. Du coup, comble d’ironie, faute au virus, malgré mon accoutrement, pas d’Halloween. L’absurdité du COVID-19 enfin démasquée.
Mais revenons à nos brebis égarées. Oui, c’est fait, John Horgan a gagné son pari. Possiblement 55 sièges sur 87 pour le NPD. Une belle majorité. Un beau mandat. Deux de suite. Un record, un moment historique pour les néo-démocrates qui ont obtenu ce qu’ils désiraient au détriment des libéraux partis à la dérive. Les verts ont survécu en remportant trois sièges. Une victoire donc remportée haut la main, les deux mains en l’air, sans qu’il y ait eu vol à main armée. Ah ! Le Far West.
Au cours de cette épreuve, John Horgan a ainsi fait ses preuves. Ce politicien d’allure un peu fruste, rugueux aux angles, qui, souvent, doit réprimer son tempérament combatif, possède un don fort envié : l’art de convaincre. Il est venu, il a vu, il a conquis. Impérial. Le premier ministre a surtout démontré un sens de leadership qui n’est pas donné à tous. Il rassure. S’il poursuit sur sa lancée, il est capable de battre son record d’endurance et d’obtenir un troisième mandat. Prochain rendez-vous ? 2024… en principe.