Comprendre l’autre pour pouvoir appliquer une approche décoloniale, voici le but de l’atelier participatif Paysage en mutation. France Trépanier et Chris Creighton-Kelly animeront cet atelier sur Zoom les 9 et 10 décembre.
France Trépanier, artiste en arts visuels, commissaire et chercheure d’ascendance Kanien’kéha:ka et française, cherche à ouvrir le débat et à explorer les pistes de compréhension et de construction d’un monde meilleur pour les arts.
« J’ai commencé par un travail de traduction, pas forcément linguistique mais de traduction culturelle entre les cultures autochtones, les cultures blanches et les cultures de couleur aussi », raconte l’artiste. « Je suis co-directrice d’un projet qui s’appelle Couleurs primaires (Primary colours). C’est un projet qui tend à placer les pratiques artistiques autochtones au centre du système des arts au Canada et qui fait place aux artistes noirs et de couleur pour insister sur le fait que leurs histoires doivent aussi faire partie de l’avenir qu’on imagine pour le pays. »
Pour la Québécoise, résidant en Colombie-Britannique depuis une vingtaine d’années, il est urgent d’ouvrir le débat avec des discussions.
Matinées de réflexion
Selon l’artiste, l’atelier sera interactif, facilitant ainsi la conversation et l’échange. « On va s’assurer de créer un espace où les conversations plus difficiles peuvent avoir lieu. Ce ne sont pas toujours des sujets faciles, de se confronter au racisme, des choses qui viennent parfois choquer notre conception de nous-mêmes comme pays et comme société », explique-t-elle.
Une longue réflexion de plusieurs années a mené France Trépanier et son partenaire de travail, Chris Creighton-Kelly à analyser un système des arts au Canada qui « ne tient plus la route ». Ils se sont donc « penchés sur les éléments, les phénomènes et les évènements qui ont un impact sur le paysage artistique et culturel du Canada, d’où le titre de l’atelier Un paysage en mutation.
France Trépanier dénonce une « histoire truffée de violences, d’attitudes coloniales qui ont été et qui demeurent très néfastes à l’égard d’une bonne partie de la population » et se bat sans relâche contre les clichés encore trop actuels.
« Les participants, de ce que j’ai compris et jusqu’à maintenant, viennent de Vancouver mais aussi
des Prairies canadiennes, des provinces atlantiques, de l’Ontario. Donc on va avoir quand même une représentativité géographique assez éclatée », se réjouit la chercheure.
Ces deux matinées de réflexion et de construction sont aussi l’occasion « de créer des réseaux peut-être même entre les participants pour que ce travail-là puisse se poursuivre dans l’espace francophone », poursuit France Trépanier.
Les pratiques décoloniales
Intellectuels, artistes et chercheurs se sont penchés sur cette problématiques depuis un bon moment, selon France Trépanier, une militante des arts autochtones et des gens de couleur : « Le projet colonial a eu un impact important sur notre pays, comme plein d’autres pays d’ailleurs, on pourrait en faire une longue liste. Mais on va se pencher sur les impacts de ce projet colonial sur notre pays, sur notre culture, sur les pratiques artistiques. On va réfléchir aux pratiques décoloniales pour décentrer le prisme de l’art occidental. Parce qu’au moment de la colonisation, au moment où l’on a développé le système des arts au Canada, notre compréhension de ce qui était l’art était en fait un art européen. On n’a pas du tout tenu en compte les pratiques d’ici », maintient France Trépanier.
Selon elle, ces pratiques artistiques ont été victimes d’un génocide culturel.
« On est dans l’après-génocide culturel présentement et même dans une renaissance, une revitalisation des langues et des pratiques culturelles autochtones mais il y a aussi, depuis les années 80, une migration noire et de couleur. Le paysage démographique du pays se transforme alors que nos institutions et nos organismes culturels ont résisté à cette transformation », affirme l’artiste.
Pour France Trépanier, il est plus important d’écouter plus profondément, plus attentivement ce que l’autre révèle, que de tenter de parler plus fort que tous.
« Sur les réseaux sociaux, la conversation semble nulle. Ce qu’on souhaite faire avec cet atelier, c’est permettre
une conversation respectueuse pour qu’on puisse s’entendre et qu’on puisse vraiment communiquer et comprendre et accepter des différences », conclut l’artiste.
Cet atelier est gratuit mais requiert une inscription (https://docs.google.com/forms/d/e/1FAIpQLSeUix03CUiES9SCi0IG58480YffFsLG9Hc5L67MnuLX3G8G0A/viewform). Le nombre de participants est limité à 60.