Cette chronique n’est pas faite pour ceux qui se foutent du foot.
C’est le pied, c’est le foot, c’est le soccer, c’est le football, c’est la coupe d’Europe, c’est la Copa América, c’est tout ça, c’est mieux que ça, c’est même plus que ça, c’est plus qu’il n’en faut, c’est fou, j’en deviens fou. C’est parce que le monde du foot est en fête que je perds la tête. Depuis le 11 juin et jusqu’au 11 juillet mes yeux seront dorénavant rivés vers ces compétitions sportives en attendant, bien évidemment, la tenue des Jeux olympiques de Tokyo qui devraient normalement avoir lieu du vendredi 23 juillet au dimanche 8 août. Je dis normalement car la population japonaise d’après un récent sondage s’oppose farouchement à cette compétition alors que le pays doit toujours faire face à la COVID-19. Le Comité international olympique par contre tient mordicus à ce que ces jeux, qui étaient prévus en 2020, ne soient pas reportés. De grosses sommes d’argent et d’énormes revenus sont engagés et dépendent de la tenue de ces jeux. Les jeux se tiendront car on ne joue pas avec les jeux.
En attendant, dans l’immédiat, c’est le foot qui prévaut, c’est le foot qui me préoccupe ou plutôt, devrais-je dire, c’est le foot qui m’occupe. Cette année, petite innovation, bien qu’il y ait un pays hôte, l’Angleterre, les matchs se jouent d’un peu partout à travers l’Europe jusqu’aux quarts de finale. Arrivé à ce stade, l’Angleterre s’occupera du reste de la compétition. Durant cette période, sacrée à mes yeux, j’aimerais que l’on ne me dérange pas. J’aimerais qu’on me laisse tranquille et qu’on respecte mon engouement pour ce sport qui m’accompagne depuis ma plus tendre enfance. L’Euro me rend heureux.
Tout ça pour dire que je vais être extrêmement occupé à regarder tous les matchs qui me sont offerts à la télé. Depuis le début de ces deux coupes, chaque matin je suis les compétitions européennes et les après-midis je passe aux matchs en provenance de l’Amérique du Sud. J’ai donc très peu de temps à consacrer pour toute autre chose. Ma famille, mes amis, vont en souffrir s’ils aiment tant soit peu ma compagnie.
Cette année, ce n’est pas en hiver mais en été que je vais donc hiberner. Je me comporte déjà comme un ours. Avec l’intention de ne pas bouger de chez moi, j’ai fait provision de toutes sortes de nourriture qui devrait me suffire jusqu’à la grande finale qui se tiendra le 11 juillet à Londres au stade Wembley. Je me nourris de tartines de miel, de boîtes de conserves, de boissons non alcoolisées (je dis ça pour bien paraître). Je grogne si quelqu’un vient frapper à ma porte ou si le téléphone sonne. Nul n’est autorisé à me déranger sous aucun prétexte. Le foot est pour moi ce que le pollen est à l’abeille. J’en vis, j’en fais mon miel.
Ces coupes me mettent dans tous mes états : état d’âme, état d’esprit, état psychique, état physique, état tati, état tata, états unis pour une même cause : me laisser apprécier le ballet des meilleurs joueurs de foot du monde. J’en oublie l’actualité : le sommet du G7 et la réunion des pays de l’OTAN (en emporte le vent), la rencontre Biden-Poutine sans poutine au menu, les parties de golf manquant d’éthique de nos militaires haut gradés, la défaite bien méritée de Nétanyahou, oui, tout ça en effet, je n’y ai pas prêté attention; la victoire de Djokovic à Roland-Garros, la fête des pères sans le Saint-Père et bientôt, sans que ça m’attriste, la Saint-Jean-Baptiste. Encore une fois, c’est vrai, j’ai mis tous ces événements au rancart. Le foot me sert de rempart contre toute invasion barbare.
Depuis l’envol des deux coupes, j’ai vécu de beaux moments. Le magnifique coup franc d’une précision remarquable tiré par Lionel Messi, le phénomène argentin, m’a ébloui. Moment sombre et dramatique toutefois : au cours du match opposant le Danemark à la Finlande, Christian Ericksen, un joueur danois, s’est effondré sur le terrain suite à un malaise cardiaque qui aurait pu lui coûter la vie sans l’intervention d’un de ses coéquipiers et du service médical d’urgence. Un moment de frayeur certes mais aussi un mouvement spontané de solidarité parmi les joueurs et les fédérations de football, s’est dégagé. De quoi vous donner chaud au cœur.
À mi-chemin des deux coupes, les paris sont encore ouverts. Par soucis d’impartialité, par esprit sportif et surtout pour éviter d’offenser qui que ce soit, je souhaite que le meilleur gagne. Vous voyez je ne me mouille pas. Je vous laisse ainsi sur votre faim : vous ne saurez jamais sur qui j’ai misé les dix dollars qu’il me reste.