Si cette année les Scouts francophones de la Colombie-Britannique soufflent leurs soixante-six bougies, ils pleurent également leur fondateur décédé en avril dernier. Retour sur les origines et missions de la seule association britannico-colombienne à proposer du scoutisme en français.
En 1955, après s’être nouvellement établi à Maillardville (Coquitlam), Jean Lambert décide de fonder les Scouts francophones de la Colombie-Britannique. « Il venait de la Saskatchewan, où il avait été scout. Il s’est aperçu que ça avait eu une grande influence positive dans sa vie, tant au niveau personnel que professionnel », raconte Lorraine Fortin, coordinatrice de l’association.
Alors que Jean Lambert s’attelle à l’ouvrage, il rencontre rapidement la pression d’un milieu linguistique majoritairement anglophone. « L’évêque me disait que j’étais mieux de rentrer dans les scouts anglophones […] Mais moi, je voulais un mouvement en français ! La Boy Scouts [Boy Scouts Canada, N.D.L.R.], n’était pas non plus en faveur de ça », écrit le fondateur en 1995.
Afin d’obtenir de l’aide, il se tourne vers les Scouts catholiques du Québec et les Chevaliers de Colomb. De fil en aiguille, l’association se développe et crée plusieurs groupes dans la province, incluant Victoria, Mission, Maple Ridge et Kamloops. Sa femme, Suzanne Lambert, fondera en 1957 l’unité féminine – Les Guides francophones de la C.-B – qui viendra fusionner avec l’unité masculine en 1995.
Au revoir « ‘Tit’ Jean »
Le décès du fondateur au mois d’avril 2021 a laissé un grand vide. « On est comme des orphelins », s’attriste Lorraine Fortin. Depuis 1955, Jean Lambert – surnommé « ‘Tit’ Jean » – n’a cessé de se dévouer corps et âme pour l’association. Son engagement lui a d’ailleurs valu de nombreuses distinctions, dont la médaille Jean Vanier, distinction la plus élevée du scoutisme canadien.
Mais son dévouement allait bien au-delà des scouts. En effet, Jean Lambert a contribué à l’épanouissement de toute une communauté francophone. Il était ainsi engagé dans une multitude d’organismes de langue française à l’image de La Fédération des francophones de la C.-B. (FFCB), l’Association Habitat, ou encore la Société francophone de Maillardville (SFM).
Son rôle à Maillardville fut d’ailleurs essentiel. Il aida notamment à fonder la chorale francophone, la paroisse Notre-Dame de Fatima, ainsi que la Caisse populaire. En 2004, il sera ainsi nommé à l’unanimité citoyen honoraire de Coquitlam, et deviendra par la suite membre honoraire de la Place Maillardville, jusqu’à son décès en 2021.
Philosophie
Si autant ont été attristés par sa mort, c’est aussi parce qu’il a changé la vie de beaucoup en créant une association dont la mission première est d’aider les jeunes à atteindre leurs pleins potentiels. « On travaille sur cinq éléments : développement moral, bien-être physique, intellectuel, social et affectif. Donc, on ne peut pas faire autrement que de former des êtres qui appliqueront l’enseignement scout à tous les niveaux de leur vie », explique Lorraine Fortin.
C’est par une éducation informelle basée sur les activités de plein air et les jeux, que l’association s’emploie à transmettre des valeurs comme la paix, le respect, l’intégrité, le service ou encore la débrouillardise. Selon Alain Pigeon, chef du groupe de Maillardville, l’enseignement de cette dernière arme les jeunes contre l’adversité. « Si on a une mentalité ouverte et qu’on se dit qu’on peut trouver une solution à n’importe quel problème, on va toujours s’en sortir. Ou, du moins, on ne va pas abandonner. Peu importe le problème qui est en face, on sera prêt à l’affronter », confie-t-il.
Enfin, l’inclusion est une valeur clef promue par les Scouts francophones. « On accueille des jeunes qui rencontrent divers défis dans la société. Parfois, on est le seul endroit où ils se sentent acceptés, où ils peuvent être eux-mêmes », livre la présidente de l’association Danielle Salles.
Scoutisme et francophonie
L’association joue également un rôle important dans la communauté franco-colombienne. « Pour une bonne partie de nos jeunes, qui viennent de l’immersion française, nous sommes leur seule activité francophone à l’extérieur de l’école », livre Alain Pigeon.
Historiquement, les Scouts francophones auraient également occupé une grande place dans la communauté franco-colombienne. Selon Lorraine Fortin, entre les années 1960 et 1990, les scouts de l’association étaient nombreux à faire partie des organisations francophones de la province. Certains auraient d’ailleurs fondé le Conseil Jeunesse francophone de la Colombie-Britannique.
Pour Lorraine Fortin, le scoutisme serait ainsi une solution aux enjeux de la francophonie en contexte minoritaire. « Nous avons besoin de la fameuse relève, de personnes qui sont convaincues qu’elles peuvent faire une différence. Et les scouts, c’est de l’action et de la solution ! Ils ne regardent pas juste une situation difficile et sont désolés. Non, ils ont les outils pour y contribuer une solution », s’enthousiasme-t-elle.
Reste que proposer du scoutisme en français dans une province à majorité anglophone est un défi. L’association, qui déplore notamment un manque de bénévoles, vient tout juste de faire un appel à animateurs et animatrices. La porte est grande ouverte à tous ceux et celles qui veulent contribuer à former la nouvelle relève francophone.
Pour plus d’information visitez le : www.scoutsfranco.com/ ou écrire à : info@scoutsfranco.com