Le début de la pandémie et le confinement ont été des chocs pour tous. Brendan Fernandes a repensé l’espace public et le rassemblement dans celui-ci avec son oeuvre The Left Space à la station de skytrain Lansdowne.
Canadien d’origine, Brendan Fernandes vit actuellement à Chicago. Ses œuvres se situent à l’intersection de la danse, des arts visuels, de la sculpture, du cinéma.
The Left Space, oeuvre tout d’abord commissionnée par le Musée des Beaux-Arts de l’Ontario à Toronto, part d’une réflexion sur le fait d’être ensemble mais de ne pas pouvoir se rassembler. « Pendant la pandémie, nous ne pouvions plus nous rassembler. J’ai donc médité sur comment se retrouver en dehors des locaux physiques », explique l’artiste.
Le confinement pousse Brendan Fernandes à réfléchir à comment travailler en dehors du périmètre habituel : « C’était censé être un spectacle mais au final, on en a fait un spectacle numérique sur Zoom. Les danseurs ont reproduit les mouvements que nous avions chorégraphiés dans les fenêtres de Zoom. Tout le monde avait le même fond d’écran numérique, en posant la question : sommes-nous tous ensemble ? Danser dans le même espace ne voulait pas forcément dire que nous nous rassemblions. »
Questionner la visibilité
Ayant des racines kényanes, Brendan Fernandes affiche ce patrimoine et une réflexion sur l’identité dans cette œuvre. Il explique que ce tissu était porté par les guerriers masaï : « C’est très, très visible. Ça crée des tensions dans l’œil et c’est censé être un mécanisme protecteur parce que les prédateurs ne voient pas ces couleurs. J’ai donc pensé à ça et à l’espace restant, que nous reste-t-il ? Où allons-nous maintenant ? Nous vivons des temps difficiles, entre la pandémie et les contestations sociales : comment aller de l’avant ? Dans quel espace pouvons-nous nous rassembler et comment en faire un meilleur espace ? »
The Left Space arbore de vifs bleus et rouges, et son motif zébré est loin d’être anodin. L’artiste explique que durant la Seconde Guerre mondiale, les bateaux étaient peints de façon à n’en pas reconnaître l’avant et l’arrière : « J’ai commencé à utiliser ces couleurs. Dans mon travail, je pense toujours à la diversité », commente-t-il. « Comme personne de couleur et personne identifiée comme queer, je pense à être vue et entendue. Mais je réfléchis aussi sur le fait de ne pas être vu, d’être invisible. Nous jouons sur ce camouflage qui nous permet de disparaître et d’être au-devant de la scène. »
La décolonisation de l’espace public
Un trou mystérieux de forme ovale intrigue dans le format rectangulaire de The Left Space : « C’est censé être une fenêtre. Je fais attention à l’architecture, à aller vers le public, à voir ce motif, de ce qui est comme une fenêtre », explique l’artiste.
Pour Brendan Fernandes, il est important de décoloniser l’espace : « Au lieu de déconstruire toute la structure, comment en construire une nouvelle avec ce que nous avons déjà ? Je pensais donc à créer de nouvelles fenêtres par lesquelles regarder, de nouvelles portes à travers lesquelles passer. Pour moi, c’est le symbole d’un regard plus large sur l’espace. »
The Left Space n’est pas sa première oeuvre sur les espaces publics. « L’espace restant est un nouvel espace, un endroit où les gens vont et viennent, où les gens prennent les transports en commun, il y a quelque chose de très agréable, un mouvement de foule activant constamment l’espace. Je pense que c’est quelque chose d’intéressant à défier dans l’architecture, de dire que quelque chose se passe là », exprime-t-il.
Artiste multidisciplinaire, Brendan Fernandes a toujours voulu s’impliquer dans différents types de projets : « En tant qu’artiste, on ne travaille pas que d’une façon. Par exemple, je travaille actuellement avec un compositeur sur une partition pour une chorale. J’ai aussi fait ce travail sur Zoom. J’aime réfléchir et travailler sur les espaces publics. De même les œuvres hors des musées, c’est un public différent, un nouveau public. Je veux que ce travail se dissémine et touche les gens de façon différente. »
The Left Space, présenté en conjonction avec la Richmond Art Gallery, Richmond Public Art, et le festival Capture Photography en partenariat avec la Canada Line Public Art Program – InTransit BC, est visible à la station de skytrain Lansdowne.
Pour plus d’informations : www.richmondartgallery.org
Site officiel de Brendan Fernandes : www.brendanfernandes.ca