Une divinité autochtone croqueuse d’hommes présentée à la Grunt Gallery

Ladykiller the Maneater, divinité revêtant les traits d’une anguille anthropomorphe, a vu le jour grâce à la créativité d’Alison Bremner. « Aimante et douce dans son état naturel, mais très carnivore lorsqu’elle est agitée », cette divinité moderne se réveille d’un sommeil profond et ininterrompu, pour se parer de couleurs vives sur les toiles de l’artiste. La divinité croqueuse d’hommes découvre alors un monde terrestre en proie à une violence croissante et omniprésente.

Dans cette nouvelle exposition présentée à la Grunt Gallery jusqu’au 29 avril 2023, Alison Bremner utilise le dessin géométrique linéaire propre à l’art autochtone traditionnel pour créer un nouveau mythe Tlingit, tout en évoquant l’expérience et les défis de communautés autochtones aujourd’hui.

Création moderne

Nombre d’œuvres présentées dans Ladykiller the Maneater ont recours aux collages de papiers peints dont les couleurs criardes et la saturation d’informations visuelle donnent une impression de vertige rappelant celui de la divinité sortant de son long sommeil. En utilisant une création moderne qui suit les conventions de la narration traditionnelle, l’artiste ouvre la voie à de nouveaux récits et références Tlingit capables de répondre au vécu des communautés autochtones, aux traumatismes de la violence armée, et donne naissance à une nouvelle divinité pouvant guider chacun sur le chemin de la guérison. « Je pense que cela en dit long non seulement sur les connaissances d’Alison en matière de respect de sa propre culture, mais aussi sur sa capacité à agir en tant que femme Tlingit contemporaine. Les histoires autochtones n’ont pas de date limite :
nous en faisons d’autres et nous avons le droit d’en faire d’autres », explique Whess Harman, commissaire d’exposition.

L’exposition Ladykiller the Maneater à la Grunt Gallery. | Art par Alison Bremner

Captivante

L’assurance et la sincérité de la narration d’Alison Bremner, associées aux lignes fortes de l’art de la côte nord-ouest et un choix de couleurs très osé, fait de Ladykiller the Maneater un récit captivant et permet au public d’accéder plus facilement aux récits au-delà de la toile.

« Comme Ladykiller the Maneater, beaucoup d’autochtones partent d’un état de sursaturation et de choc, car nous avons nous aussi été mis en contact avec un monde confus et violent », précise Whess Harman. Et la divinité d’Alison Bremner peut alors incarner cette confusion, ce mélange de sentiments. Ladykiller est à la fois moderne et mythique, puissante et incomprise, aimante et terrifiante au premier abord. Cette divinité, réveillée abruptement après un sommeil profond, peut aussi rappeler la résilience renouvelée et protéiforme des communautés autochtones. « Cela signifie que nous ne sommes pas toujours gentils, sages ou patients. La résilience est désordonnée, exigeante et sous la surveillance constante des politiques de respectabilité, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de nos communautés », ajoute le commissaire.

Surmonter la douleur

Il faut alors accorder à Ladykiller the Maneater plus d’espace, plus d’intérêt, pour recevoir sa sagesse, son affection et apprécier sa véritable valeur. Cette divinité mérite toute la curiosité et la bienveillance du public, qui peut alors voir de nouvelles façons de surmonter la douleur et la confusion, et accepter la part de Ladykiller, de divin, de nourricier et de monstrueux, en chacun de nous. Ces extrêmes opposés présents dans Ladykiller the Maneater peuvent aider le spectateur à mieux accepter ces contradictions en reconnaissant la puissance de celle-ci face à un environnement nouveau et hostile. « Il est ambitieux pour un artiste de s’attaquer à certains des sujets qu’aborde Alison dans cette nouvelle série d’œuvres. Mais à travers l’objectif de Ladykiller the Maneater, ils semblent moins myopes et, plus important encore et de manière un peu étrange, moins désespérants », conclut Whess Harman.

Avec ses couleurs chamarrées et sa grande variété de matériaux et motifs, Ladykiller la croqueuse d’hommes, montre qu’il peut y avoir une multitude de sentiments, de réactions, d’expériences, qui se rencontrent pour aider chacun à surmonter les états de choc, de confusion, de traumatismes. Alison Bremner démontre aussi qu’il est possible de créer sa propre voie, ses propres divinités pour s’aider à naviguer le monde, sans pour autant s’éloigner de sa culture et de sa communauté car la culture est un phénomène vivant, fascinant, nuancé qui a besoin d’évoluer et de s’adapter, tout comme Ladykiller the Maneater.

Pour plus d’informations sur l’exposition, visitez: grunt.ca

Pour plus d’informations sur l’artiste, visitez : www.alisonobremner.com