Le drapeau franco-colombien de la Fierté tend la main

Le drapeau franco-colombien de la Fierté est un bien public qui appartient à toute personne qui se sent représentée ou qui partage sa vision de la communauté. | Crédit : Fédération des francophones de la Colombie-Britannique

La Fédération des francophones de la Colombie-Britannique (FFCB) a adopté le drapeau franco-colombien de la Fierté en mai 2024, une étape décisive dans la construction identitaire de la communauté francophone de la province. Créé par le groupe SOGI (orientation sexuelle et identité de genre) de l’école Victor-Brodeur à Victoria pendant l’année scolaire 2022-23, ce drapeau identitaire mise sur la réconciliation, l’antiracisme et la solidarité envers les personnes 2SLGBTQIA+. 

Marie-Paule Berthiaume – IJL – Réseau.Presse – Journal La Source

Elizabeth Rush, leader SOGI et personne enseignante à Victor-Brodeur, a d’abord exploré l’importance des drapeaux comme symboles culturels et identitaires avec son groupe. Ensemble, les élèves ont réfléchi à leur rôle dans la promotion et l’acceptation des communautés minoritaires.

Inspiré des drapeaux de Raymond Lemoine (1982) et de la Fierté inclusif-intersexe (2021), le design du drapeau rend hommage au patrimoine franco-colombien, tout en affirmant un engagement envers la diversité et les enjeux intersectionnels. 

Les élèves responsables de la conception du drapeau franco-colombien de la Fierté ont remporté le prix pédagogique Henriette Moreau lors du Forum communautaire de la FFCB 2024, où le drapeau a été dévoilé. | Crédit : Fédération des francophones de la Colombie-Britannique.

« Chaque élément du drapeau découle d’une réflexion poussée. Nous revenions souvent sur le malaise lié au risque de reproduire l’effacement des communautés autochtones. La construction identitaire anglo ou franco-canadienne masque parfois le fait que nous nous trouvons sur des territoires autochtones », relate-t-iel, en saluant la collaboration du groupe SOGI avec les Premières Nations locales Songhees et Tsawout – y compris l’artiste renommé Bear Horne (Tsawout/Pacheedaht), qui a encouragé l’usage des trigons pour autochtoniser la représentation du cornouiller – la Nation Métis de la Colombie-Britannique, l’organisme 2 Spirits of BC (Deux esprits de la C.-B.), et la direction de la Réconciliation et de l’Éducation autochtone du Conseil scolaire francophone, Bonnie Lépine-Antoine (Michif/Wendat), pour concevoir le drapeau.

Dialoguer

Anastasia Trudel (il-elle) travaille désormais pour le Comité franco-queer de l’Ouest en tant qu’agent de développement communautaire. | Crédit : Courtoisie

« Raymond Lemoine, concepteur du drapeau original, souligne que chaque élément du drapeau  se rapporte au territoire. En revanche, la nouvelle version du drapeau incorpore la reconnaissance du lien fondamental des personnes autochtones avec ce territoire. « Ça montre à quel point les jeunes francophones respectent et valorisent le passé et le travail de défense des droits de leurs ancêtres, tout en se positionnant vers l’avenir en tant que protagonistes plutôt qu’héritiers passifs », explique-t-iel. 

S’identifier

Avant de travailler sur ce projet, Anastasia Trudel, alors membre du groupe SOGI, avait du mal à se relier à sa francophonie. « Souvent, la culture francodphone est rattachée à la France ou au Québec. Pour les jeunes vivant dans une minorité linguistique comme moi, il y a une coupure entre  cette culture et la communauté francophone», confie-t-il.

Prendre part à la conception du drapeau lui a enfin permis de se rallier à sa francophonie. « C’est la culture francophone du présent, celle que nous avons construite. La culture à laquelle nous avons accès est souvent en anglais, mais il existe maintenant quelque chose que nous pouvons vivre en français. C’était vraiment une expérience pendant laquelle je me suis dit “Now I am connected to it ” », confie-t-il.

Pour Anastasia Trudel, le drapeau ouvre un nouvel horizon pour la communauté francophone.  « C’est l’occasion de se rappeler le passé, de mieux comprendre notre présent et de penser à ce que nous voulons pour notre avenir », explique celui qui a récemment présenté le drapeau à son établissement scolaire, l’Université de Victoria, qui le partagera sur ses réseaux sociaux.

Accueillir

Pour Emmanuelle Corne Bertrand, directrice générale de la FFCB,  le drapeau franco-colombien de la Fierté est un drapeau conjoncturel, en fonction du message qu’on veut envoyer quand on l’utilise. « On n’a pas cette prétention de représenter tout le monde. En revanche on veut dire, “Si vous franchissez les portes de la communauté francophone, nous serons ravis de vous faire une place”», dit-elle en précisant que ce drapeau n’est pas un symbole législatif, mais un emblème communautaire qui peut être arboré lors de manifestations, son utilisation en extérieur requérant l’accord des Premières Nations locales.

«Je souhaite que chaque école du CSF établisse un dialogue avec la ou les Premières Nations locales pour demander  dans  quelles circonstances hisser ce drapeau, ou pas. Car, si les personnes ou communautés autochtones subissent à nouveau des relations non consensuelles ou l’expérience d’être mises à l’écart, ce projet communautaire aura complètement échoué», conclut Elizabeth Rush.

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