Regards croisés entre l’Inde et l’Afrique

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À partir du 9 avril, la galerie du Cultch fait la part belle aux voyages en accueillant deux expositions conjointes Glimpses of India de Claudine Pommier et Rhythm Stories par Nyla Sunga. Les deux artistes, expérimentées dans les excursions à travers le monde, proposent leur vision de l’Inde et de l’Afrique par la photographie et les techniques mixtes, incluant la peinture et les collages. La Source vous présente ces deux artistes complémentaires.

Alors que la photographie de Claudine Pommier examine le fossé qui se crée entre les classes sociales et la nature, Nyla Sunga retransm et l’harmonie connue durant années en Afrique par le moyen d’histoires visuelles. Ces peintures prennent racine dans les souvenirs et les croquis de sa vie africaine.

Nyla Sunga livre un vibrant témoignage de sa vie en Afrique.

Nyla Sunga livre un vibrant témoignage de sa vie en Afrique.

Intense Afrique
Elevée au Québec, au cœur d’un quotidien fait de multiples différences culturelles et religieuses, Nyla cherche très tôt à trouver cette riche diversité dans le reste du monde. À la fin de l’adolescence, elle met le cap sur le désert du Sahara et jusqu’aux montagnes de l’Atlas du Maroc. C’est le début d’une fascination pour le continent africain et surtout pour la richesse de l’expression culturelle à la disposition des diverses populations. « Mon voyage n’avait pas un but artistique mais c’est une expérience qui a changé ma vie. »

Douze ans plus tard, en 1985, elle revient sur le continent africain et s’installe dans le royaume montagneux du Lesotho, témoin des derniers soubresauts du régime d’apartheid sud-africain. Le territoire enclavé dans l’Afrique du Sud accueille de nombreux réfugiés. C’est une véritable zone de guerre où la vie est un combat quotidien mais où chaque jour est intense selon la peintre qui affirme « L’Afrique a créé bien plus d’un Nelson Mandela. »

Elle reprend alors ses pinceaux, délaissés depuis quelque temps, pour immortaliser les expressions et ses rencontres avec les villageois. « J’ai compris que rien n’est inné, que l’on sait ce que l’on sait parce que quelqu’un nous l’a appris. Cela a été une grosse claque pour moi. » Notamment ce jour où elle demande à un vieil homme de poser pour elle. Ne parlant pas la même langue, il finit par la comprendre et s’exécute durant plusieurs jours sans poser de questions. « C’est finalement en me voyant dessiner sa main qu’il découvre que c’est lui qui est représenté sur la toile. Il n’avait jamais vu son propre visage auparavant ! » C’est cette vie que l’on retrouvera aux murs de la galerie du Cultch après un long processus de maturation dans l’esprit de l’artiste. « Lorsque je suis rentrée au Canada et commencé une autre vie, j’ai décidé de laisser tout cela de côté car le choc avait été très grand, il fallait me réadapter à cette société. »

Il y a six ans, la peintre a cependant repris ses toiles et décidé de les retravailler avec un nouveau regard et une plus grande distance, en réalisant des collages, en racontant des histoires. « Les souvenirs évoluent avec le temps, ce sont des histoires sans fin. C’est pour cela qu’il s’agit d’un travail très personnel. J’ai choisi d’honorer ces visages et ces batailles. »

Scène de la vie quotidienne dans l’État du Tamil Madul. | Photo par Claudine Pommier

Scène de la vie quotidienne dans l’État du Tamil Madul. | Photo par Claudine Pommier

Bouillonnante Inde
De son côté Claudine Pommier a fait ses premiers pas dans la photographie alors qu’elle vivait encore en France. « J’étais peintre dans la « vie réelle » mais je suis une véritable touche-à-tout. » sourit-elle. Photo et film documentaire occupent aussi son quotidien.

Son inspiration trouve sa source dans les voyages. « Particulièrement lorsque l’on pose le pied en Inde, on ne peut pas échapper aux formes et couleurs si particulières à ce pays. »

Le premier coup de foudre a lieu en 1969. Alors qu’elle travaille sur des fouilles archéologiques en Israël, elle décide de prendre la route pour réaliser un vieux rêve : « J’ai traversé en auto-stop l’Iran, le Pakistan et l’Afghanistan pour finalement arriver en terre d’Inde. À cette époque, ces pays étaient beaucoup plus faciles à aborder. »

Et dès son arrivée, la magie opère, à tel point que la photographe explore le territoire durant six mois et multiplie les aller-retour. « Il est vrai que lors de mon retour en 2005, j’ai été un peu perdue devant les changements et face à l’évolution de la civilisation. » Les lieux magiques qu’elle avait connus étaient désormais surconstruits. Les éléphants qui se reposaient au bord des lacs trente ans plus tôt avaient laissé la place aux bateaux à touristes. Claudine Pommier décide alors de reprendre son appareil pour immortaliser ce qui a tant évolué, au moyen d’images colorées et frappantes des commerces, de l’industrie, des temples et des sanctuaires de l’Inde. « Il a été d’ailleurs très difficile de faire une sélection pour arriver aux trente clichés de l’exposition. Mais ils représentent les scènes de vie auxquelles j’ai assisté. » Un choix qui s’impose comme un témoignage de l’histoire d’amour qui règne entre l’artiste et ce pays d’adoption.

Glimpses of India & Rhythm Stories
8 avril au 3 mai
The Cultch Gallery
1895 rue Venables, Vancouver