Consultation versus perception

Le processus municipal de prise de décision est probablement le plus fluide et transparent de tous les niveaux de gouvernement. En effet il y a peu, sinon aucun changement qui soit décidé et mis en pratique, sans une série de consultations publiques auxquelles tous les citoyens de la ville sont conviés. Ils sont organisés dans des endroits publics, en présence de membres du personnel des services municipaux qui peuvent répondre aux questions des citoyens concernés par les propositions.

En cette dernière année du deuxième mandat du maire Greg Robertson et de son parti Vision Vancouver, on sent nettement la pression montée du côté de ses opposants, qui se manifestent pour faire valoir leur perception d’absence ou de manque de consultation publique sur les dossiers importants en cours à l’Hôtel de Ville.

Alors, l’absence de consultation à Vancouver est-elle réelle ou perçue ? D’abord rappelons que dans l’ensemble, les projets entrepris par le maire Robertson et son équipe ont été clairement identifiés dans la dernière campagne électorale. On n’a qu’à se rappeler les plans de réaménagement de certains quartiers (West End, DTES, Grandview-Woodland, Marpole, Mount Pleasant et Norquay), la construction de logements locatifs plus accessibles pour les citoyens à revenus moyens, les démunis et les sans-abris, l’augmentation de la densification urbaine, l’augmentation du nombre des pistes cyclables, l’augmentation des déplacements à pied, pour ne mentionner que ceux-là.

Un opposant au Parti Vision Vancouver. Photo par Brent Garnby, Flickr

Un opposant au Parti Vision Vancouver. Photo par Brent Garnby, Flickr

Ce qui suscite de loin les réactions les plus fortes, touche l’augmentation de la densification, dans tous les projets de renouvellement de quartier. La critique que l’on entend partout touche à la perception du manque, ou même selon certains, l’absence de consultation des résidents, qui tout d’un coup voient comment leur quartier est en voie de changer et qui crient littéralement au meurtre. Selon eux, les nouveaux immeubles sont trop hauts, trop près de chez eux, contiennent trop de logements sociaux, vont mener à la détérioration du tissu social de leur quartier, et de toute façon : « ils ne devraient pas être dans ma cour, ailleurs, d’accord, mais pas ici. » Et puis exprimé en même temps, le désir légitime, souvent répété, de voir la ville faciliter l’accès à des logements dont les loyers sont plus accessibles. C’est là que le choc des réalités est inévitable.

En effet une augmentation de la densification, qui engendre une plus grande offre de logements locatifs, ne peut se faire sans construire plus d’immeubles dans des quartiers où la règlementation municipale autorise plus de hauteur. C’est ce qui mène la ville à conclure des ententes qui incitent les promoteurs immobiliers à conserver une portion de leurs nouveaux logements pour le marché locatif, au lieu de tous les mettre en vente au prix du marché. Sans la construction de nouveaux immeubles, la pénurie de logements locatifs ne s’arrangera pas et les loyers continueront de monter. C’est la loi du marché.

En attendant, la prochaine fois que vous recevrez une invitation à participer à une consultation publique, à un évènement portes ouvertes, à une audience publique au conseil de ville, ou encore à une séance du conseil de ville, n’attendez pas deux ans pour soudainement vous plaindre qu’il n’y a pas assez de consultations à Vancouver. Par exemple un projet de changement de zonage passe par au moins six étapes de consultations, toutes ouvertes au public.

J’entendais récemment à la CBC, un opposant au projet de renouvellement du quartier du West End, contester le processus de consultation et la validité du nombre de personnes qui se sont prononcées sur le sujet. Il avançait que le chiffre de 7 200 participants, tels que relevé par les fonctionnaires de la ville, n’était probablement pas plus que 2 500, puisque plusieurs de ces personnes s’étaient présentées à plus d’une séance de consultation. Oui, sans doute, mais cela vaut autant pour ceux qui sont en faveur du projet que ceux qui s’y opposent.

Alors où est le problème ?

« Le changement ne se fait pas par consensus, mais par leadership », selon Gil Penalosa, l’actuel directeur général de 8-80 Cities, un organisme sans but lucratif, qui se consacre au bien-être des citoyens et de leurs villes, lors de son passage à Vancouver à la fin du mois d’octobre.

PS : N’oublions pas que les prochaines élections ont lieu dans un an et que la campagne est déjà en cours. Allez jetez un œil sur les sites de Vision Vancouver (votevision.ca) et du NPA (npavancouver.ca) pour constater la différence de niveau de préparation entre les deux. Le site du NPA reproduit des articles de la presse écrite, dont le plus récent porte sur le danger que représente certains trottoirs, alors que celui de Vision Vancouver, annonce déjà en détail son programme électoral. Mais c’est là le sujet d’une chronique pour plus tard.