La religion n’est pas en déclin, elle fait au contraire plus que jamais partie de nos existences en nous apportant les réponses aux questions existentielles qui nous agitent en ces temps d’incertitude. C’est ce qu’affirme le professeur Norman Cornett, un universitaire montréalais, en écho à un débat qui s’est tenu fin juin à Maple Ridge.
Le café philosophique de l’université Simon-Fraser (SFU) se veut un moment de dialogue et de « stimulation intellectuelle » aux dires d’un de ses modérateurs, Mike Shields. Il anime depuis trois ans et le constate, les rencontres qui ont trait à la religion et à la spiritualité donnent souvent lieu à des débats « animés et surprenants », davantage que pour les thématiques éthiques ou politiques.
Les participants du café philosophique du 25 juin organisé à Maple Ridge se sont interrogés sur l’avenir de la religion, vaste sujet et des plus actuels. Qu’en est-il de nos jours où notre époque marquée par les nouvelles technologies est des plus rationnelles dans son approche à la vie ? Qu’en est-il alors que le pape François s’exprime sur l’homosexualité et l’environnement ; que certains associent l’islam au terrorisme ? L’universitaire Norman Cornett nous donne quelques éléments de réponse.
Né au Texas dans les années 1950, il est professeur spécialisé en sciences des religions à l’université McGill à Montréal. Il a enseigné à UBC et a animé deux conférences à Vancouver sur les relations entre les arts et la spiritualité. À l’invitation de la SFU, il a animé fin juin un séminaire à Paris sur le jazz et l’enseignement, auquels ont participé des professeurs et des étudiants de l’université vancouvéroise.
La Source : Comment définiriez-vous la religion ?
Norman Cornett : C’est avant tout un phénomène humain. On sait maintenant que toute communauté, en tout temps et en tout lieu, a toujours eu une forme de religion. Elle est universelle. Sur un plan philosophique, elle traite des questions ultimes : le sens de la vie, la raison d’être, la condition humaine.
L. S. : On dit que les gens ne croient plus en rien. Dans ce contexte, la religion a-t-elle encore sa place dans nos sociétés ?
N. C. : Ce n’est pas la première fois qu’on prédit la fin de la religion. Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, en Occident, on en parlait déjà, clamant que nous assistions à la mort de Dieu. On se disait dans une époque post-théologique. Des années après, elle est encore là. Elle ne peut disparaître. Elle a changé de lieu et d’adresse, mais elle est toujours là. Nous évoluons, elle s’adapte.
L. S. : La religion n’est donc pas en crise aujourd’hui, selon vous…
N. C. : La religion est plus que jamais présente et elle se renforce. Elle connaît un regain de nos jours, en particulier chez les jeunes. Et pour cause, ils errent dans un monde post-moderne sans vérité, sans repères et sans réalité, à se demander à quoi et à qui se raccrocher. Ils sont habités par un vide qu’ils cherchent à combler. Les jeunes ne sont pas les seuls dans cette situation. La question du vide est prégnante chez nous tous. C’est le propre de la condition humaine.
L. S. : D’où nous vient ce vide qui nous anime ?
N. C. : Nous sommes des êtres spatio-temporels. L’espace et le temps nous définissent, mais nous sommes aussi en quête de transcendance. Nous tendons tous vers l’éternel et l’universel. Et c’est là le dénominateur commun de toutes les religions que ce soit le judaïsme, le christianisme, l’islam, le bouddhisme, l’hindouisme, etc. Les religions sont des réponses à notre vide. Nous pouvons délaisser les dogmes et les institutions, mais nous ne pouvons pas délaisser nos rêves de transcendance. Nous avons trop d’aspirations. Nous avons trop envie de faire le Bien même si on n’y arrive pas toujours. L’être humain est foncièrement spirituel.