Je suis arrivée en Colombie-Britannique il y a plus d’un an, et à Vancouver il y a neuf mois. Le temps passe vite. Je n’avais pas d’attente particulière en quittant Paris si ce n’était d’améliorer mon anglais, faire plus de yoga et vivre proche de la nature. Je crois que tous ces objectifs ont été atteints avec succès : je suis devenue enseignante de yoga, je peux désormais regarder Friends sans sous-titres et j’ai l’impression que la maison où je vis est dans un arbre !
Je ne savais pas que des attentes inconscientes allaient me désarmer et créer une forme de déception. Je m’attendais à retrouver une culture semblable à la mienne. J’étais persuadée que ce qui nous séparait était la langue. Erreur. Il m’a fallu du temps à comprendre et surtout accepter que les règles du jeu soient différentes. De la façon dont on entre en relation, en passant par notre façon de nous nourrir et de travailler, il y a eu beaucoup d’incompréhensions et d’ajustements à faire. Au départ, je l’ai même parfois vécu comme un rejet et un fort sentiment de superficialité.
Je crois que ce qui a été le plus compliqué pour moi, ç’a été la nourriture. Je ne comprends pas la présence des OGM, ni des aliments trop transformés, y compris dans l’alimentation dite « santé ». Je ne comprends pas pourquoi mon corps digère moins bien le gluten ici qu’en Europe et pourquoi les fruits et légumes sont si fades. Je ne comprends pas pourquoi il y a de la mayonnaise sur les sushis et les pizzas. Et pourquoi les gens mangent seuls !
Une fois que j’ai fini par m’adapter à ce nouveau cadre, j’ai commencé à davantage m’ouvrir et à voir cette ville telle qu’elle est. Ou du moins, telle que je la vis : une ville internationale où beaucoup de gens sont de passage, une nature magnifique très présente, une ville d’entrepreneurs où les gens travaillent beaucoup, un endroit rêvé pour les amateurs de la montagne et du yoga. Vancouver offre en effet à ses habitants une qualité de vie assez agréable. A condition d’en avoir les moyens car c’est une ville très chère pour ce qu’elle a à offrir. Oups, j’ai dérapé !
Ce qui est certain est que j’en apprends tous les jours sur la culture locale mais je crois que, dans le fond, mon exploration est très égoïste. Au final, c’est surtout moi que cette expérience permet de dévoiler. Je ne connaissais pas ma propre culture ni mes schémas de pensée avant de m’installer ici. Je ne savais pas à quel point j’étais attachée à l’alimentation et à tous ses rituels, ou l’importance de l’intimité et de la relation avec les autres dans ma vie. J’en savais au final très peu sur mes attachements, mes habitudes ou tout ce que je tenais pour acquis.
D’un autre côté, je ne savais pas non plus que j’allais tomber en amour avec la liberté qu’offre ce mode de vie. Liberté qu’on apprivoise avec son lot de solitude. J’ai ainsi également appris à aimer la solitude et aujourd’hui je la chéris. Nous sommes plus libres de dire non ou « I don’t feel like it anymore ». On s’autorise à respecter ses besoins d’abord et en cela on apprend à pratiquer la bienveillance envers soi et, par ricochet, avec les autres.
Vivre ici me transforme chaque jour et il devient de plus en plus complexe de rester relié à sa vie d’avant. On apprend à se détacher, à se choisir, à s’alléger et à vivre dans le présent. À suivre.