La Colombie-Britannique comme laboratoire culturel

En 1964, le romancier et ancien espion Pierre Nord écrivait en substance que « s’il y avait bien une chose que l’on devait reconnaître à la culture anglo-saxonne, c’est le génie du pragmatisme. La preuve, c’est qu’ils ont gagné les deux guerres mondiales en s’y investissant seulement à la fin ». Ce raccourci ne cache pas l’admiration que je ressens pour une culture qui, il faut bien le reconnaître, fait souvent d’excellents choix en matière d’efficacité.

Sur ces bases, la ville de Vancouver et la province toute entière ont la chance, ou l’occasion, c’est selon, d’y ajouter une solide composante de culture asiatique. Qu’elle soit chinoise, japonaise ou coréenne, elle explique en grande part les succès que l’on connaît dans une certaine mesure dans la lutte contre la pandémie. Car l’Asie, dans cette crise mondiale, peut se targuer d’avoir géré de manière bien plus efficace que les Occidentaux l’impact de la COVID-19 sur ses sociétés. « C’est normal, la Chine est une dictature, ils contrôlent leur population d’une main de fer », peut-on entendre. C’est oublier un peu vite que le Japon, la Corée du Sud et surtout Taïwan, qui sont de vraies démocraties, font tout aussi bien que l’Empire rouge.

Il y a un véritable avantage pour la province de pouvoir compter sur sa diversité culturelle dans son ensemble, ce qui veut dire toutes les communautés, peu importe leurs origines, lorsque vient le moment d’affronter des crises majeures comme celle que nous vivons. Si l’on décide d’observer de près les chiffres, la Colombie-Britannique s’en sort bien mieux que les autres provinces canadiennes : Québec et Ontario comptent respectivement 4,5 et 3,7 fois plus de cas. C’est normal nous dira-t-on, leur population est supérieure. Mais que dire dans ce cas de l’Alberta, dont la population est à la fois moins importante et moins dense qu’en C.-B. et qui compte pourtant presque le double des cas que l’on recense ici ?

En février, on a vu fleurir les masques et les gestes barrières dans les rues et les supermarchés autour de nous. J’étais au courant fin décembre de cette crise, et en dépit de mes avertissements à de grands médias canadiens dès le 7 janvier, on a préféré ignorer les informations que je tenais de première main. Au contraire, les médias asiatiques ne parlaient pratiquement que de ça depuis le Nouvel An. Mon épouse, sino-canadienne, a imposé le masque dans la famille en cas de sortie avant même que le premier cas ne touche la province.

La vie quotidienne en temps de pandémie. | Photo par Ketut Subiyanto

Pour des raisons impératives, j’ai voyagé dans plusieurs pays depuis le début de la pandémie, muni des recommandations de ma femme et de la « boîte de crise » qu’elle avait préparée pour mes voyages : gants, masques, gels… En dépit du fait que j’ai dû prendre l’avion dans plusieurs pays différents, que j’ai dû me rendre dans des lieux où la crise fleurissait et d’avoir été obligé de rencontrer beaucoup de monde, je suis passé à travers la Covid (plusieurs tests à l’appui) qui pourtant a frappé de nombreuses personnes dans mon entourage européen.

Faisant face à toutes les difficultés, mon entourage asiatique (et moi-même par la force des choses) n’a jamais dévié d’un iota de la ligne dure fixée sur la discipline à suivre. Réunion en tout petit comité, distances respectées, gestes barrières suivis à la lettre. Personne dans cette partie de mes proches n’a été malade. Personne n’a attrapé ce démon miniature qui a, il faut le rappeler, tué près de 1 440 000 personnes.

Si la liberté d’entreprise, de pensée et d’expression sont des piliers de notre culture britanno-colombienne, il faut bien reconnaître que la discipline, le sérieux et l’altruisme apportés par nos compatriotes asiatiques nous montrent que le mélange des deux cultures est non seulement efficace, mais en plus souhaitable à grande échelle. Oui, le virus est né en Asie, mais c’est justement parce que ces peuples connaissent mieux que nous ce type d’expérience qu’il faut s’inspirer de leur résilience et de leurs succès, et que la Colombie-Britannique sera sans doute étudiée dans les années à venir pour en tirer des leçons.

Une opinion sur “La Colombie-Britannique comme laboratoire culturel

  1. c’est une bonne analyse de la culture asiatique >> bien disciplinée durant cette pandermie !

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