Pictures and promises fait référence à l’exposition du même nom de 1981. Les clichés d’Eugène Atget, photographe français, seront exposés aux côtés des œuvres de Roy Arden, Yasumasa Moriumura ou encore Cindy Sherman.
L’exposition a lieu à la Vancouver Art Gallery jusqu’au 6 septembre 2021. Parmi de nombreux photographes de renom, elle permet de découvrir et redécouvrir l’œuvre d’Eugène Atget.
Pictures and promises se concentre sur les œuvres réalisées à l’aide d’un objectif qui utilise les structures, les conventions et les qualités formelles utilisées dans les médias de masse, la mode et la publicité. Elle questionne le consumérisme et l’impact des choix de société, tout comme Eugène Atget, (1857–1927), en son temps. Le photographe parisien porte un regard nostalgique sur Paris en pleine transition.
Une carrière hors du commun et une reconnaissance tardive
Eugène Atget a eu un parcours hors du commun. Tout d’abord militaire, il s’évertue à poursuivre une carrière d’acteur. Il finit par décrocher le Conservatoire mais est contraint d’abandonner les planches à la suite d’un problème aux cordes vocales. Il s’essaie à la peinture mais c’est avec un objectif qu’il excellera. Hélas, il est reconnu assez tard par ses pairs. On le cite pourtant comme père de la photographie moderne.
Eugène Atget utilise tout d’abord la photographie pour documenter des sujets principalement pour les peintres mais aussi pour les architectes et les artisans. Il se tourne ensuite vers une clientèle d’amateurs de l’histoire de Paris et des institutions culturelles comme les musées et les bibliothèques (dont la Bibliothèque nationale de France et le musée Carnavalet) et crée cinq séries photographiques dont trois sur le Vieux-Paris.
De grands artistes tels que Man Ray, Maurice Utrillo et Georges Braque lui achètent des clichés. Il est finalement découvert par les surréalistes quelques temps avant sa mort. Berenice Abbott, assistante de Man Ray, le décrit même comme « un Balzac de la caméra ».
Immersion dans le Vieux-Paris
La sélection des clichés d’Eugène Atget par la Vancouver Art Gallery invite à se plonger dans le Paris populaire. Il pousse la porte des intérieurs parisiens cossus, traîne devant les théâtres et cabarets de Paris et emmène le spectateur dans les rues étroites d’un Montmartre pittoresque, à l’époque où la butte était encore une enclave rurale à l’atmosphère villageoise. Il montre la beauté champêtre de ce quartier qui a résisté au rouleau-compresseur de l’haussmannisation et qui a gardé son cachet unique avec ses petites rues, jusqu’à aujourd’hui.
Il a autant documenté que dénoncé l’haussmannisation de Paris. Haussmann, préfet de la Seine sous le Second Empire, décrit le vieux Paris comme un « dédale presque impraticable ». La ville lumière était alors en proie à une épidémie de choléra et bon nombre d’habitations furent déclarées insalubres. Le bouleversement urbain de l’époque est une transition violente : Eugène Atget met en scène des rues désertes, comme abandonnées, mises à mort. Il montre aussi la brutalité architecturale carcérale avec un fourgon cellulaire lié au modèle de la prison panoptique, plus tard dénoncé par Michel Foucault.
Le photographe capture également une autre perte : la disparition des petits métiers due à l’arrivée de l’industrialisation et de la machine capitaliste anthropophage. Les métiers de rue, les marchands ambulants sont évidemment touchés de plein fouet. Il immortalise vanniers, rémouleurs ou encore chiffonniers dans la lignée d’une tradition iconographique née au XVIe siècle.
Les clichés d’Eugène Atget sont à découvrir à la Vancouver Art Gallery du 20 février au 6 septembre