Le fusain artisanal de Sara-Jeanne Bourget

Questionner le sol, qu’il soit naturel ou urbain, et la relation qu’entretiennent tous les êtres avec ce médium, c’est ce que proposent trois artistes avec l’exposition Common Ground à la Cityscape Community ArtSpace du 10 juin au 30 juillet.

Rencontre avec Sara-Jeanne Bourget, l’une des membres de ce trio d’exploration artistique.

Installée à Vancouver depuis cinq ans, la Québécoise d’origine, Sara-Jeanne Bourget, est fascinée par les textures, tout comme ses acolytes artistes, Robin Gleason, une collègue et son compagnon, Mark Johnsen. Le projet Common Ground a débuté il y a deux ans.

Le fusain est devenu la marque de fabrique de Sara-Jeanne Bourget. | Photo de Sara-Jeanne Bourget

« Nous sommes de bons amis et on voyait des similarités dans nos pratiques. Chacun de nous a une fascination pour les textures donc on s’est demandé quel sujet rassemblait nos trois pratiques. C’était assez facile : le sol, l’asphalte, le milieu urbain. Mais pas juste le sol en tant que tel mais le sol qui s’érode, les crevasses qui se forment, les choses qui se font aplatir à la longue sur les trottoirs. Donc on s’est concentrés là-dessus et vu comment créer des oeuvres qui vont ouvrir la conversation à ce sujet », explique Sara-Jeanne Bourget.

Dans cette exposition, Sara-Jeanne Bourget, Robin Gleason et Mark Johnsen explorent les couches de matière sous nos pieds : la frontière construite entre le corps et la terre dans l’environnement urbain. Inspiré par les rues, les stationnements et les ruelles du quotidien, Common Ground met en évidence les strates qui se chevauchent dans les trois pratiques matérielles diverses des artistes.

Un amour des nuances de noir et blanc

Le fusain est devenu la marque de fabrique de Sara-Jeanne Bourget. Un professeur de Concordia est à l’origine de cet engouement alors qu’elle effectuait son baccalauréat : « Il nous a demandé de penser un peu plus loin au matériau qu’on utilise pour dessiner. J’ai décidé de faire des recherches sur le fusain, sur sa qualité parce que j’en utilisais beaucoup et que j’aime travailler en noir et blanc. Il y a une sorte de contraste et de nostalgie avec le fusain. »

Avec le temps et la confection de son matériel, Sara-Jeanne Bourget constate que certains types de fusain peuvent donner des effets différents : « Un peintre va toujours avoir une palette d’outils et de couleurs, il va utiliser les couleurs d’une certaine façon mais en faisant mon propre fusain, ça m’a permis d’avoir cette palette-là, d’avoir des fusains que je faisais à partir de bois qui était flotté, très poreux et ça me donnait parfois un gris pâle, des fois très brillant et je pouvais l’utiliser pour couvrir de grands espaces, tandis que si j’utilisais un bois beaucoup plus dur comme l’arbousier d’Amérique, ça donne un gris très foncé, très huileux. »

Entrelacs de nature et d’art

Photo de Sara-Jeanne Bourget

Selon l’artiste, ce matériau de base est facile à faire : « J’étais encore chez mes parents à Québec ; on avait une forêt dans le coin et j’ai décidé de faire ma propre pâte de fusain. À ma grande surprise, ce n’était pas compliqué à faire, j’étais fascinée par les résultats parce que ça marchait mais aussi parce que je trouvais que c’était un bel objet, organique, naturel tandis que celui qu’on achète en magasin est industrialisé. C’est devenu un rituel à chaque fois que j’allais faire du camping ou une balade dans la nature. J’ai toujours une petite boîte en métal dans laquelle je peux faire mon fusain. »

Sara-Jeanne Bourget renforce ainsi sa relation à la nature : « Quand je vais quelques jours dans la nature ou en voyage, j’étudie quel genre de bois je peux ramasser puis je fais mon propre matériel avec lequel je dessine. Après, je le rapporte au studio. Toutes mes œuvres sont faites à partir de ce matériel-là. Tout ce que je faisais était uniquement avec ce fusain. Depuis, j’utilise divers matériaux. Je suis un peu moins stricte avec moi-même mais je fais toujours mon propre fusain : c’est un élément très important de ma pratique, de développer cette relation-là avec le matériel. Plus je le fabriquais, plus j’apprenais à comprendre les petits détails du matériel, parce que ça m’aidait à développer quelque chose de nouveau dans ma pratique de dessin. »

Pour plus d’information visitez : https://northvanarts.ca/events-exhibitions/commonground