La frénésie d’achats va bientôt s’abattre avec l’arrivée des fêtes de Noël. Certains considèrent les commerçants locaux par solidarité et pour des raisons écologiques. Qu’en est-il dans les faits ? Rencontre avec des commerçants francophones de Vancouver.
Pour Ingrid Broussillon, femme entrepreneure proposant des sessions d’improvisation théâtrale pour apprendre le français ou l’anglais aux entreprises, l’importance des petites entreprises est sous-estimée.« Je me souviens d’un message que j’ai vu circuler récemment disant qu’acheter local, ce n’est pas donner plus à un milliardaire pour s’acheter un autre yacht mais réellement aider une famille à payer les frais d’université pour un enfant », explique la fondatrice de Griottes Polyglottes.
Elle ajoute que les prix sont élevés chez les petites entreprises mais que si les grandes entreprises ont plus de visibilité, c’est qu’elles ont beaucoup plus de budget réservé à ça. « Si on ne fait pas l’effort d’aller vers ces petites entreprises-là, c’est dommage parce que dès qu’il y a une crise, ce sont les premières à mettre la clé sous la porte », explique l’entrepreneure.
Des organismes pour soutenir les initiatives locales
Le moment est toujours difficile lors de la course aux cadeaux de Noël : les consommateurs disent parfois se retrouver tiraillés entre budget serré et considérations environnementales. Deux initiatives existent pour soutenir les commerçants locaux de Vancouver : Loco (BC Buy Local) et Shop Local.
Financée par le gouvernement du Canada et mise en œuvre par l’intermédiaire des chambres de commerce provinciales et territoriales, l’initiative Shop Local offre des subventions pour des programmes et des campagnes qui encouragent les Canadiens à faire des achats locaux afin d’aider les entreprises à traverser et à dépasser la pandémie.
D’autres organismes soutiennent également les petites entreprises à Vancouver, à l’instar de Craft Council of BC. Rindala Seeman de RG Handcrafted Goods explique que cette organisation soutient les projets d’art et les artistes en ville. « Il fallait passer devant un jury, comme pour des artistes. Ils font de leur mieux pour soutenir de nombreux artistes et artisans locaux », explique la responsable de la marque de produits de tannerie personnalisés.
Ingrid Broussillon, membre de Loco depuis plus d’une année, apprécie la démarche de cette initiative : « C’est une plateforme pour aider les petites entreprises à être visibles. Ce sont eux qui m’ont approchée. Ils ont dû voir que j’avais décroché un prix. » L’entrepreuneure a repéré d’autres initiatives encore inexplorées pour l’instant : « J’ai vu des listes circuler, pour aider les femmes ou les Noirs en BC mais je ne les ai pas encore contactées. »
Et la francophonie ?
Le marché de Noël du Centre culturel francophone de Vancouver offre la chance aux commerçants.es de la province de montrer leurs produits en personne. Au niveau des initiatives, Claire Huguenot, artiste créant des œuvres artistiques et des cartes de vœux et habituée des marchés, évoque une liste de personnes qui proposaient des articles qui pourraient servir de cadeaux de Noël par la SDE. Elle a également participé à l’initiative FAM (Femmes en Affaires en Mouvement), un groupe de femmes entrepreneurs animé par la SDE. « C’est difficile à dire, j’avais déjà des clients parmi les personnes de ce groupe. Je ne pourrais pas dire si cela m’a permis d’attirer de nouvelles personnes ou si je connaissais déjà ces personnes via mon réseau personnel », explique l’artiste.
Plusieurs sources évoquent entre autres des tarifs exhorbitants pour intégrer l’Annuaire des services en français de Colombie-Britannique. « Je n’ai jamais adhéré à cet annuaire. Les prix sont quand même assez importants pour une visibilité quand même minime, je trouve », explique Claire Huguenot. Rindala Seeman niait même l’existence de ce répertoire professionnel. « Je ne savais pas que cela existait ! Mais j’aimerais en savoir plus. Je suis dans les groupes mais je ne pourrais pas dire qu’on a vraiment une connexion pour les entrepreneurs », déplore-t-elle.
La pandémie, facteur de changement d’habitudes de consommation
Le spectre de la pandémie continue de faire des ravages, selon Claire Huguenot. « Les gens aiment l’idée d’acheter local mais pendant la pandémie, ils ont tout acheté en ligne. Cette facilité de recevoir des colis, ils l’ont un peu gardée. À mon avis, les gens ont pris l’habitude de ne pas acheter local. Même s’ils aiment l’idée d’être écologiques et de soutenir les entreprises locales, en réalité, la facilité d’acheter en trois clics, je pense que ça s’est accentué. Ils n’ont pas à se déplacer, à stationner, à respecter un horaire particulier pour acheter ce dont ils ont besoin et encore moins de l’art, donc on trouve les deux : ceux qui cliquent et achètent parce qu’ils n’avaient pas le choix et les autres qui ont enfin pu ressortir après la pandémie et qui se sont dit: achetons local », explique l’artiste.
« Être en ligne seulement, ça ne suffit pas. Les gens veulent voir, veulent toucher, ils veulent parler avec l’artiste », rajoute Claire Huguenot.
Le son de cloche est différent chez Rindala Seeman. « On a eu des clients de l’Australie, de la France et d’ailleurs mais 80 pour cent de nos clients sont de Vancouver ou des îles avoisinantes. On a quelques clients à Montréal et en Alberta. En rencontrant beaucoup de petits commerçants comme nous, j’ai compris que c’est une culture en plein développement, les gens veulent de plus en plus acheter local et artisanal. » La vente en ligne pourrait donc aussi s’avérer comme moyen de trouver des artisans locaux.
Le réseau Loco organisera une semaine consacrée aux achats locaux, du 28 novembre au 4 décembre, pour mettre en valeur les entreprises locales.
Pour plus d’information:
Griottes Polyglottes : www.griottespolyglottes.com
Handmade by Claire : www.handmadebyclaire.com
RG Handcrafted Goods : rghandcraftedgoods.com