Le plus grand festival des films documentaires de l’Ouest canadien, DOXA, étale sa 22e édition du 4 au 14 mai. Les productions entièrement ou partiellement francophones occupent une place de choix dans le menu de ce rendez-vous qui se déroule avec la participation de cinéastes de divers horizons artistiques et culturels dont plusieurs signent les premières mondiales, canadiennes ou britanno-colombiennes de leurs œuvres. Les projections ont lieu à la Cinémathèque, au Centre VIFF et SFU Goldcorp Centre for the Arts, tandis que les rencontres professionnelles se déroulent au Centre mondial des arts de SFU.
Grande liberté
« La marque de fabrique du festival DOXA est la grande liberté dans la programmation. Ce qui permet de présenter des œuvres qui ont peu de chance d’être programmées ailleurs, étant donné, par exemple, leur caractère expérimental à la frontière entre le documentaire et la fiction », affirme la jeune directrice de programmation Sarah Ouazzani. Elle se réjouit du fait que ce festival offre une plateforme à des cinéastes novateurs qui sont à contre-courant des conventions. À propos des films francophones (entièrement ou partiellement), la directrice met de l’avant la grande diversité des pays d’origine ou partenaires de ces productions qui sont parfois en plusieurs langues.
Abordant la programmation de cette année, Sarah Ouazzani souligne la participation de la commissaire invitée, la Franco-Béninoise Farah Clémentine Dramani-Issifou qui a concocté une programmation de documentaires du cinéma afro-diasporique sur les luttes politiques et les aspirations émancipatrices des années 1960-1970 en Guinée-Bissau, au Maroc, aux États-Unis et en France. Notamment, l’œuvre de la cinéaste française Sarah Maldoror Et les chiens se taisaient, une adaptation d’une pièce d’Aimé Césaire, Le fugitif du cinéaste marocain Ali Essafi sur les années 70 dites « années de plomb » au Maroc et Nossa Terra de Mario Marret sur la guérilla lors de la lutte pour l’indépendance en Guinée-Bissau. Par ailleurs, le festival revient aussi sur le « Printemps érable » québécois en présentant en première canadienne le film Dans le cœur signé Rodrigue Jean et Arnaud Valade. Un récit de première main vif et palpable sur les manifestations des étudiants au Québec en 2012.
Coups de cœur
Dans son documentaire Les jours, la Québécoise Geneviève Dulude-DeCelles nous fait vivre tout un spectre d’émotions en suivant le parcours plein de courage et de résilience de l’étudiante finissante en doctorat Marie-Philip qui reçoit à l’âge de 29 ans un diagnostic de cancer. Le trop-plein d’émotions est aussi au rendez-vous avec le film franco-canadien Lettre d’amour à Léopold L. Foulem de Renée Blanchar du Nouveau-Brunswick qui signe un hommage à ce céramiste de génie, méconnu, qui vient de nous quitter en février dernier.
Du côté de la Guadeloupe, la jeune cinéaste Annabelle Aventurin régale par une œuvre qui bouscule les conventions du documentaire familial typique. Son récit Le Roi n’est pas mon cousin nous fait vivre les fabuleuses expériences de sa grand-mère et nous présente un point de vue singulier sur les combats de la diaspora africaine. La thématique de cette diaspora est d’ailleurs très présente dans le menu du festival. Entre autres, soulignons le film de Chriss Itoua Muanapoto. Ce terme qui signifie : enfant de France, en lingala, décrit le fossé culturel et identitaire qui sépare des enfants d’origine africaine nés en Occident et leurs parents.
Odes à la résilience
À noter aussi l’hommage qui sera donné au regretté scénariste et producteur franco-mauritanien Med Hondo décédé en 2019, par la présentation de son documentaire Mes voisins qui fait partie de son long métrage Les Bicots-nègres, acclamé par la critique et qui explore les réalités postcoloniales en France à travers la vie quotidienne de la diaspora ouvrière notamment africaine. À surveiller également l’œuvre à la frontière entre le documentaire et la fiction du franco-marocain Adnane Baraka Fragments from Heaven (fragments du ciel, film en langues amazighe, arabe et française), une ode à la vie au Sahara où scintillent mille et une étoiles de rêve et de poésie.
En clôture du DOXA 2023, une ode à la résilience du peuple haïtien. Le film du réalisateur montréalais d’origine iranienne Kaveh Nabatian Kite Zo A (Quitter les os) présenté en première britanno-colombienne. La directrice de la programmation note le caractère multidisciplinaire de cette œuvre très inspirée à la croisée de la poésie, de la musique et de la danse et qui a été réalisée en collaboration avec des poètes, des danseurs, des musiciens, des pêcheurs, des rollers casse-cou et des prêtres vaudous. « C’est un bel hommage à la résilience de ce peuple et à sa richesse culturelle et artistique, malgré les stéréotypes. C’est le pays qui compte le plus de poètes au kilomètre carré ! », s’émerveille Sarah Ouazzani.
Pour plus d’information visiter : www.doxafestival.ca