Le petit gars qui trimbalait des livres : Un parcours de vie du Soudan du Sud en guerre à Kelowna dans la vallée de l’Okanagan

Quand on pose des questions sur son passé à l’étudiant de UBC Okanagan, James Magok Achuli, son récit est tel que la majorité de ses pairs sont reconnaissants de n’avoir jamais vécu cela.

« On m’a volé mon enfance », explique James, qui est né et a été élevé au Soudan du Sud. La violence ethnique et la guerre civile ont ravagé le tout nouveau pays entre 2013 et 2020. Quand James était enfant, une journée typique s’écoulait sans nourriture dans un camp de réfugiés. « Nous étions chanceux de recevoir un repas quotidien, et certains jours, je ne mangeais rien du tout. »

Même si l’instruction n’existait pas dans les camps, cela ne découragea pas le jeune James, qui chérissait une petite collection de livres au sec dans son sac imperméable de l’UNICEF. « Je gardais toujours la pensée d’aller à l’école, et mes livres constituaient mon instruction. »

James Achuli et son équipe de cross-country, UBCO Heat. | Photo par Conan Shing

À douze ans, il reçut une bourse d’une école adjacente aux baraques militaires ; quand une seconde guerre civile éclata, son école fut ciblée et les enfants conscrits de force dans l’armée.

« Un soir, j’étudiais avec mon ami Deng. Soudain il s’est produit une forte explosion, des cris, et des enfants qui sautaient par la fenêtre. Deng a pris une balle dans l’estomac et saignait abondamment. Nous sommes restés cachés toute la nuit sous une grande table et, le matin, Deng est mort. »

James a fini par être trouvé vivant par les forces du gouvernement et a été conscrit par l’armée. Après trois mois de travail aux côtés de son commandant, James s’échappa, toujours avec son sac de livres imperméable. Il sauta dans la rivière, la traversa à la nage, puis une marche de quatre heures le mena à une ville voisine où il trouva asile avec d’autres dans une église. Ce groupe projetait de se rendre à pied dans un camp de réfugiés en Ouganda.

Arrivé en Ouganda, James fut reçu comme membre du programme de l’UNICEF pour les enfants orphelins et vulnérables.

« Bien que nous ayons la sécurité et l’accès aux écoles fondées par l’UNICEF, je m’inquiétais franchement de mon avenir. »

Le pouvoir transformateur de l’instruction
Durant ses trois années dans un camp de réfugiés ougandais, James était connu comme le petit gars qui trimbalait des livres et se portait défenseur d’autrui. Il a éduqué ses pairs à propos de la violence sexuelle, le VIH et le SIDA, ainsi que l’importance de la paix et de l’instruction.

« Là-bas dans mon pays, parce que les gens ne sont pas instruits, ils n’ont pas le courage de se faire entendre, » explique James. « C’est là une chose qui m’a aidé à m’exprimer et à penser de façon plus critique. »

Afin de réaliser son rêve d’une instruction scolaire en due forme, James courait des kilomètres du camp de réfugiés à un café Internet, où il cherchait des bourses en ligne. Un jour il trouva un article de l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés à propos d’étudiants soudanais au secondaire qui recevaient des bourses d’étude dans le monde entier grâce aux Collèges Mondiaux Unis (UWC). Quand il a postulé, et a été invité à une entrevue à Kampala, capitale de l’Ouganda, il a été « fou de joie ».

« Je suis allé à l’entrevue, et deux jours plus tard, j’ai reçu un appel du chef du comité national qui m’a dit : “James, tu pars pour l’Arménie avec une bourse qui paie toutes tes dépenses” ».

James s’épanouit à l’école et, le temps venu d’explorer des choix post-secondaires, UBC était son premier choix. Son école le proposa pour le prix Karen McKellin de Leader de Demain à UBC, une bourse englobant tous les coûts des programmes et de subsistance pour les étudiants.

Depuis son admission à UBC Okanagan, James s’est intégré à l’expérience universitaire. En plus de s’enrôler au Club afro-caraïbe et le Students’ Union, il est aussi membre du Heat Cross-Country Team sous la direction de l’olympien Malindi Elmore.

« Grâce à mon instruction, je désire aider les gens déplacés par la guerre, qu’ils soient réfugiés, immigrants ou demandeurs d’asile. Les aider à survivre est très important pour moi. »

Cet article a été traduit en français par Louise T. Dawson du journal La Source à partir d’un blogue sur le site de l’Université de la Colombie-Britannique (UBC). Veuillez trouver la version originale à : https://magazine.alumni.ubc.ca/2023/video/campus-life/boy-who-carried-books