La période des Fêtes ravive l’envie de retrouver ses références socioculturelles parmi les membres de la jeune communauté francophone réunionnaise de Vancouver. Ils appellent à la multiplication des événements publics mettant en évidence les temps forts du calendrier social de cette petite île multi-ethnique, qui célèbre notamment, le 20 décembre, l’abolition de l’esclavage.
Hassan Laghcha
IJL- Réseau.Presse -Journal La Source
« J’espère que l’année 2024 apportera de bonnes nouvelles quant à la mobilisation des Réunionnais pour donner à leur communauté la présence et le rayonnement qu’elle mérite. Ceci, à travers l’organisation d’événements fédérateurs mettant en valeur le patrimoine culturel de cette île de l’océan Indien, creuset interculturel entre trois continents : l’Afrique, l’Asie et l’Europe. » C’est le souhait le plus cher de Nathalie Astruc, responsable des programmes culturels et communautaires de La Boussole. « Nous sommes des pionniers ! », dit-elle, en racontant son premier contact avec ses compatriotes à son arrivée à Vancouver en octobre 2019, quelques mois avant le début de la pandémie. Compte tenu du contexte sanitaire particulier, elle a d’abord vécu une expérience virtuelle avec les membres de sa communauté par les réseaux sociaux. Par la suite, elle développe progressivement des liens directs avec des Réunionnais.
Une association en perspective ?
« Actuellement, créer une association n’est pas vraiment à l’ordre du jour. Bien entendu, cela se justifie par la petite taille de cette très jeune communauté, contrairement au Québec, où l’on retrouve une immense communauté, la Belle Province étant naturellement la première destination de cette communauté francophone », ajoute-t-elle.
Elle souligne les difficultés d’organiser des événements communautaires publics à Vancouver, comme pour de nombreuses jeunes communautés de la Colombie-Britannique. Cette insulaire dans l’âme est pourtant ravie d’avoir trouvé ses repères géographiques sur la côte Ouest. Aussi, elle s’estime heureuse des occasions uniques que lui offre son travail à La Boussole de rencontrer et de tisser des liens humains profonds avec des personnes issues d’horizons divers, notamment francophones du Grand Vancouver.
Parmi ses premières expériences passionnantes au pays, cette journaliste et écrivaine revient sur le « grand moment » qu’a été pour elle de contribuer au recueil de récits de femmes immigrantes francophones : « Autour d’elles », publié par l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne où elle évoque ses nombreuses migrations interculturelles à travers plusieurs pays et cultures avant de s’installer à Vancouver. “Je suis maintenant heureuse de découvrir le vrai sens de la francophonie, un concept lancé par Léopold Sédar Senghor, un compas ouvert à toute la Francophonie. C’est ce que je veux vivre ici en Colombie-Britannique”, souligne-t-elle.
Un contexte pas très encourageant
De son côté, Teddy Julien Kybio évoque la nécessité d’une association pour regrouper les Réunionnais de Vancouver, que l’on peut évaluer à environ de quatre à cinq cents personnes. « Mais, encore faut-il trouver des membres suffisamment motivés et qui ont la volonté et le temps de servir leur communauté dans un contexte complètement différent de celui, par exemple, du Québec ou des événements réunissant non seulement la grande communauté réunionnaise mais aussi les communautés originaires de Maurice et de Madagascar, notamment. »
Cet entraîneur sportif évoque la particularité du contexte social de la côte Ouest, qui n’incite pas beaucoup à la sociabilité, contrairement à celui de Montréal, où il a vécu à un moment, ou celui de Marseille, où il a grandi et où son père mène une activité associative communautaire très dynamique.
À Vancouver, il se réjouit de l’engouement suscité auprès de nombreuses communautés culturelles et anglophones pour la technique de self-défense qu’il enseigne, alliant deux disciplines sportives : la défense de la Savate française et le Morning Art créé par les esclaves de La Réunion au XVIIIe siècle, qui est une technique d’art martial conçue au rythme de la musique Maloya par des personnes soumises à l’esclavage pour détourner l’attention des maîtres oppresseurs afin de se préparer discrètement au combat décisif menant à la conquête de leur chère liberté.
À cet égard, Nathalie et Teddy estiment que la célébration du 20 décembre portant sur l’abolition de l’esclavage à La Réunion pourrait être un catalyseur important pour établir un calendrier d’événements réunissant toutes les appartenances culturelles et religieuses. Ce qui marque de façon viscérale la société plurielle réunionnaise.