Comment rendre les parcs de Vancouver plus inclusifs ?

Avec plus de 250 parcs et espaces naturels, la ville de Vancouver offre un cadre de vie que beaucoup envient. Pourtant, cet accès privilégié à la nature n’est pas évident pour tous ses habitants et plusieurs rapports récents montrent que l’inclusivité des parcs a encore du chemin à faire.

Suzanne Leenhardt –Réseau.Presse – Journal la Source

Quatre cents hectares de forêt en plein cœur du centre-ville. Stanley Park, l’un des plus grands parcs urbains de l’Amérique du Nord, est la vitrine de Vancouver. Avec ses plages et ses cèdres rouges centenaires, il attire des millions de visiteurs par an. Mais cette proximité avec la nature n’est pas évidente pour tous les Vancouvérois. Si les bienfaits sur la santé physique et mentale ne sont plus à démontrer, des obstacles persistent dans l’accès aux parcs urbains, notamment pour les plus démunis. 

Une quinzaine de personnes participent à la fête de la Saint-Jean-Baptiste organisée par La Boussole, le 24 juin 2023. | Crédit: La Boussole

Emmener hors des murs du « Downtown Eastside »

L’accessibilité des parcs peut se mesurer par des faits concrets comme la proximité entre son logement et un parc, les horaires d’ouverture, le stationnement alentour ou encore les aménagements disponibles. Mais franchir les portes d’un parc n’est pas aussi simple et il existe des barrières mentales.

La Boussole, le centre communautaire et social francophone de Vancouver, multiplie les randonnées et les ateliers dans les parcs en saison estivale. L’objectif est « d’emmener les bénéficiaires et bénévoles hors des murs du quartier très bétonné de Downtown Eastside »souligne la directrice des opérations, Nathalie Astruc. Situé à l’est du centre-ville de Vancouver, ce quartier concentre plusieurs enjeux liés au logement, à la pauvreté et aux dépendances. Le 19 septembre dernier, la directrice des opérations s’est rendue en binôme à Montréal pour intervenir sur la thématique de l’inclusion des personnes en précarité dans les parcs urbains, lors du Forum national des ami.es des parcs

Pour des personnes en situation de précarité, le besoin d’aller au parc n’est pas une priorité face à celui de se loger et de se nourrir. Mais il est aussi question de légitimité, notamment pour les personnes en itinérance. « Ce qui n’est pas dit mais qui se perçoit, ce sont  les réticences à se rendre dans un parc et y rester. Dans le quartier, il y a eu un traumatisme après les évacuations violentes de Crab Park », souffle la directrice. En mars dernier, une opération de nettoyage conduite par la Ville de Vancouver avait contraint les résidents des campements du parc à se débarrasser de leurs affaires personnelles dans un laps de temps très réduit. 

Malgré ces réticences, elle évoque les retours positifs des participants lors de la fête de la Saint-Jean-Baptiste, que la Boussole a tenue le 24 juin dernier au parc Strathcona. « On veut vraiment explorer les activités dans la nature pour que notre public n’ait plus de freins et qu’il bénéficie de l’espace public», pose Nathalie Astruc qui rêverait de pouvoir organiser des sorties en nature à l’extérieur de Vancouver. 

Adapter les parcs aux situations d’itinérance

Pour pouvoir proposer une activité dans un parc, il faut payer un permis à la Ville de Vancouver. Lors de la Saint-Jean-Baptiste cela correspondait à environ 200$, soit 30% du budget de l’atelier pour La Boussole. Grâce à un récent partenariat, c’est Les ami.es des parcs qui l’a financé. Le réseau national vise à bâtir des liens entre les communautés et soutenir l’existence des parcs urbains dans tout le pays. Chaque année, ils produisent un rapport sur les parcs dans les villes canadiennes en interrogeant un nombre important d’usagers et d’employés municipaux chargés de la gestion des parcs. 

Dans le dernier rapport publié en novembre 2023, ils poussent les décideurs à adopter des stratégies fondées sur les droits des personnes en itinérance. « On travaille dur sur ce sujet de l’inclusivité parce qu’on sait le bénéfice des parcs sur la santé mentale et physique. C’est pour ça qu’on engage de nouveaux partenariats comme celui avec La Boussole»appuie Mash Salehomoum, gestionnaire de programmes pour les ami.es des parcs à Vancouver. Le prochain en date est avec le Yarrow Intergenerational Society for Justice à Chinatown qui met en contact les jeunes et les plus âgés afin d’atténuer les barrières culturelles liées à l’accès aux services publics.