Des lieux culturels de plus en plus écologiques en Colombie-Britannique

Face à l’urgence climatique qui contraint chaque industrie à revoir ses manières de créer, le secteur de la culture n’est pas épargné. Bien qu’il ne soit pas le plus grand pollueur, le déplacement d’artistes, la création de décor ou la consommation des spectateurs ne sont pas sans impact sur l’environnement. À Vancouver, des lieux culturels revoient leurs habitudes. 

Suzanne Leenhardt – IJL – Réseau.Presse – Journal La Source

Une chanteuse qui arrête les tournées internationales, un festival qui utilise des « éco-cups », ou encore l’utilisation d’une diode électroluminescente communément appelée une lumière LED… Les initiatives pour réduire la pollution du secteur culturel partent souvent de démarches personnelles mais ne font pas encore partie des normes et obligations. À Vancouver, certains lieux décident pourtant de s’imposer des objectifs et de coopérer pour réduire leurs impacts sur l’environnement.

Cory Haas, le directeur artistique et général du théâtre francophone La Seizième à Vancouver. | Crédits : Gaëtan Nerincx

En décembre dernier, le théâtre francophone La Seizième a obtenu l’accréditation de « Scène éco-responsable – niveau Or », délivrée par le Réseau des femmes en environnement et du Conseil québécois des évènements écoresponsables (CQEER). Cette reconnaissance oblige les lieux culturels à proposer des actions pour réduire leur consommation sur différents volets : alimentation, communications, énergie et ressources, engagement social, gestion des matières résiduelles et gouvernance. Tous les deux ans, ce plan d’action est vérifié et le label est renouvelé.

Une réduction de moitié des impressions papier par rapport à l’année dernière 

« Le plus gros domaine dans lequel on a eu un impact ce sont nos outils de communications : on a réduit de moitié nos impressions papier par rapport à l’année dernière. Nous n’avons plus qu’une billetterie en ligne et nous utilisons du papier certifié pour les brochures », souligne Cory Haas, le directeur général et artistique du théâtre La Seizième. Pour continuer à être visible, le théâtre a noué un partenariat avec la Ville de Vancouver qui diffuse la promotion dans les abribus.

Les deux interprètes Mia Wistaff et Thérèse Champagne dans le spectacle jeune public La Befana, du théâtre francophone La Seizième à Vancouver. | Crédits: Théâtre La Seizième.

Qui dit théâtre francophone dit spectacles en français. Alors souvent, les compagnies et les artistes viennent de loin. « Même si l’on ne va pas arrêter de faire venir des artistes, on va essayer de faire tourner le spectacle dans les villes aux alentours comme Edmonton », explique le directeur. Pour le transport des équipes, le train et les autobus sont privilégiés. Et sur place, pas de bouteilles d’eau ni d’aliments sous plastique pour les acteurs mais des aliments cultivés en agriculture biologique sont proposés. Le détail des actions mises en place et leurs échéances sont consultables sur le site internet du théâtre. On y trouve même un volet financier avec la volonté de choisir des placements bancaires éco-responsables.

Réutiliser et recycler les décors 

Si le théâtre est bien un jeu d’humains, un spectacle repose aussi sur une panoplie de décors et d’accessoires pour immerger le spectateur. La question de leur durabilité se pose alors et les lieux culturels disposent souvent d’un stock important qui dort dans des entrepôts. « Au lieu d’aller acheter des t-shirts sur Amazon, on va aller voir les autres théâtres, chercher dans les friperies », souligne Cory Haas.

Dans la même optique, le Musée de Vancouver a lancé une boîte à outils à destination des professionnels de l’art, intitulée « SAGE», dont la version française est en cours de production. Fruit d’un travail de deux ans avec l’experte en environnement Maureen Cureton, le projet est composé de ressources, formations, conseils et plateformes à destination des institutions culturelles canadiennes et internationales. « Depuis 2017, le musée revisite ses méthodes de fabrication pour réduire ses déchets et son empreinte carbone. Mais l’idée de la boîte à outils c’est de faire des ponts, notamment avec les théâtres qui, comme nous, doivent penser à la déconstruction de leurs décors », pointe Viviane Gosselin, directrice des collections et des expositions au Musée de Vancouver.

L’idée phare est le principe de circularité: comment réutiliser les matériaux produits pour une exposition ou un spectacle. Parmi les ressources du projet, un site internet « Barder.art » permet aux lieux culturels de publier et mettre à disposition du matériel comme des présentoirs, de l’acrylique ou encore des costumes. À la manière d’une boutique en ligne de seconde main, le principe est de favoriser les prêts plutôt que l’achat de produits neufs lors d’une nouvelle exposition ou spectacle. «L’idée c’est de devenir une communauté résiliente. Par exemple, on a emprunté de très grands rideaux au musée d’anthropologie, on les a utilisés, lavés puis rendus », souligne la directrice. Elle se donne deux années pour diffuser cette boîte à outils aux partenaires du musée comme l’association des musées de Colombie-Britannique mais aussi aux écoles d’art.

« On ne peut pas penser à des changements systémiques sans impliquer la nouvelle génération de créateurs », assure-t-elle.

À chaque exposition, le musée expose le pourcentage de matériaux réutilisés et rend publiques ces données essentielles. « Ça peut inspirer les gens dans leur vie personnelle et puis, on le voit déjà dans les demandes de subventions, avoir une démarche éco-responsable fait partie des exigences », assure-t-elle. L’art de repenser nos modes de consommation.

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